Le premier symposium international de grande ampleur sur les abus sexuels dans l’Eglise s’ouvre lundi 6 février à l’Université grégorienne de Rome. Après plusieurs années marquées par la révélation de scandales de pédophilie au sein du clergé catholique, essentiellement en Occident, cette rencontre se base sur un échange d’expériences dans la lutte contre ces crimes afin de réaffirmer la volonté de l’Eglise de réagir avec détermination.
"Aucune organisation, ni aucun Etat n’a organisé un événement similaire", relève le Père jésuite Hans Zollner, responsable de la rencontre. Mis sur pied en étroite collaboration avec le Vatican, ce symposium intitulé : "Vers la guérison et le renouveau" verra la participation d’une centaine évêques du monde entier, d’experts et de cardinaux de la curie romaine.
Parmi ces intervenants chevronnés, le ‘promoteur de justice’ de la Congrégation pour la doctrine de la foi Mgr Charles Scicluna. Au micro de Radio Vatican, Mgr Charles Scicluna a expliqué que l'Eglise veut une politique claire et efficace en réponse au dramatique phénomène des abus sexuels commis au sein de l'Eglise (1). Les quatre journées de travail verront la participation des représentants de quelque 110 conférences épiscopales à travers le monde, de plusieurs responsables d’ordres religieux. Parmi eux, nous rappelons la présence de nos deux évêques référents en matière d'abus sexuels commis au sein de l'Eglise : Mgr Harpigny (fr) et Mgr Bonny (fl). A leur côté, participeront également au Congrès, frère René Stockman, supérieur général des Frères de la Charité et le Père jésuite Mark Rotsaert, membre de la Commission théologique qui accompagne ce symposium. Il s’agit d’expliquer que le phénomène n’est pas seulement occidental, et d’aider les responsables de l’Eglise mondiale à comprendre comment réagir, à avoir des "instruments concrets".
Pour ce symposium les jésuites et le Vatican ont particulièrement soigné la communication. Outre la participation d’une centaine de journalistes, cette rencontre inédite sera largement présente sur internet (https://thr.unigre.it), avec la mise en ligne des différentes interventions et même l’ouverture d’un compte ‘Twitter’.
Préparé de longue date, ce symposium organisé sous les auspices de l’Université Grégorienne de Rome a reçu un appui clair de la curie et du Saint-Siège, a assuré le Père Federico Lombardi. Le directeur du Bureau de presse du Saint-Siège a également annoncé qu’un message de Benoît XVI aux participants serait lu à l’ouverture des travaux. Il a aussi assuré que le pape, à travers un don de la ‘Papal foundation’, avait souhaité offrir une contribution "consistante" au Centre de formation pour la protection des enfants sur internet qui sera lancé à la fin du symposium et installé à Munich, en Allemagne.
Pour le Père Zollner, psychothérapeute en charge du symposium, cette rencontre entend être "un signe clair et ferme qu’il y a beaucoup de forces qui veulent travailler ensemble" pour faire face au fléau de la pédophilie. Il s’agit d’ailleurs à ses yeux de faire passer ce message à l’extérieur comme à l’intérieur de l’Eglise.
Venue d’Irlande pour témoigner, Marie Collins, souhaite que cette rencontre ne soit pas une simple opération marketing de l’Eglise. Abusée dans son enfance, son témoignage constituera un temps fort dans le déroulement du colloque. Cette Irlandaise reconnaît que son rapport avec l’Eglise "est passé par des moments très difficiles", mais elle affirme qu’elle a tenu à venir à Rome pour s’assurer que l’Eglise entendait protéger le plus grand nombre d’enfants aujourd’hui et à l’avenir. Si elle déplore que les directives ecclésiales en la matière aient longtemps été ignorées par nombre de responsables d’Eglise, elle juge désormais que l’Eglise est en mesure de "devenir protagoniste de la protection des enfants dans le monde entier". Marie Collins, victime d’un prêtre de Dublin alors qu’elle était enfant, insiste sur la différence entre "excuses" et "pardon". Après les excuses exprimées, elle souhaite que les responsables d’Eglise demandent désormais pardon à l’ensemble des victimes.
Dans la soirée du 7 février, lors d’une veillée pénitentielle, des représentants de prêtres ou religieux pédophiles demanderont pardon à Dieu, et aux victimes. En l’église Saint-Ignace, au centre de Rome. Sept membres de l’Eglise, au nom de divers groupes, demanderont pardon à Dieu et aux victimes pour les abus pédophiles et les négligences coupables. Un texte "très profond, très clair et explicite" sera alors lu, indique le Père Zollner, avant qu’une victime ne demande pour sa part à Dieu la force de pardonner.
(1) Lire l'entretien sur l'agence Zenit
Apic/imedia/zenit/bl