Ces dernières semaines, des médias italiens fleurissent de potins, rumeurs, fuites ou révélations sur des prétendus complots ou corruptions au sein du plus petit Etat du monde,. Entraînant ainsi un climat malsain de suspicion et de défiance. Au point que le directeur de la Salle de Presse du Saint-Siège, le P. Frederico Lombardi a publié une mise au point à ce propos, diffusée le 12 février, au soir sur Radio Vatican.
Si plusieurs documents confidentiels publiés dans la presse semblent bien réels, si des médias ont également trouvé là un nouveau filon en ces temps de crise, beaucoup s’interrogent pour savoir qui a réellement intérêt à montrer un Vatican en proie à la confusion. La note du P. Lombardi appelle à garder la tête froide: " Le gouvernement américain a eu wikileaks et maintenant on a les Vatican leaks, ou fuite de documents, (…). Cela favorise une mauvaise presse du Saint-Siège et de son gouvernement, et au-delà de l'Eglise même. Il faut donc garder raison et calme, ce que peu de media font". Le père jésuite déplore que des documents confidentiels soient sortis du Vatican, il y a là une responsabilité partagée entre celui qui transmet et celui qui reçoit, dénonce-t-il.
Pour le P. Frederico Lombardi, ce qui est de l'ordre du complot ne doit pas être repris au sérieux, en parlant de "l’affaire Viganò" . Après cette affaire, avec son lot d’accusations de corruption et de malversation dans l’administration vaticane, après des soupçons de blanchiment d’argent pesant sur la "banque du Vatican", le "complot" visant à assassiner Benoît XVI révélé par un quotidien italien a tout d’une construction romanesque à la Dan Brown. On y apprenait ainsi qu’un cardinal colombien âgé avait rédigé, en allemand, un rapport secret dans lequel il soutenait qu’un cardinal italien avait eu vent, en Chine, d’un complot contre la personne du pape ! Le même document confidentiel indiquait que Benoît XVI préparait en secret sa succession et faisait état de son "rapport très conflictuel" avec son secrétaire d’Etat.
Si abracadabrantesque soit la nouvelle, le rapport existe bien. Qui donc alors organise ces fuites dans la presse ? Dans de nombreux bureaux, la perplexité domine. "Qui veut la peau du cardinal Tarcisio Bertone ?", se demandent certains à mi-voix, ou encore : "qui a intérêt à lancer d’ores et déjà les préparatifs du prochain conclave ?"
Le directeur du Bureau de presse du Saint-Siège ne peut que dresser le constat amer d’attaques de plus en plus fortes contre le pape et l’Eglise, déplorant dans le même temps que quelques récents procès contre l’institution aient été remportés, aux Etats-Unis, dans un silence médiatique assourdissant. Pendant ce temps, les rumeurs continuent de courir. Un journal sicilien assure ainsi que si le pape n’a plus que quelques mois à vivre c’est parce qu’il souffre d’un cancer de l’estomac. Un archevêque italien à la retraite assure, pour sa part, que le pape est sur le point de démissionner.
"Le fait que les attaques soient plus fortes est le signe que quelque chose d’important est en jeu", soutient d’ailleurs le Père Lombardi pour qui toutes ces attaques entendent discréditer l’effort du Vatican en vue d’une véritable transparence de ses institutions. La lutte en cours contre le blanchiment d’argent et la corruption semble gêner.
Mais n’est-ce pas toute la "glasnost" ratzingerienne qui dérange ? Près de 7 ans après le début de son pontificat, celui que certains avaient imaginé comme un pape de transition a, doucement, sans faire trop de bruit, bousculé certaines pratiques : de "l’affaire Maciel" à la gestion des scandales de pédophilie qui ont éclaboussé l’Eglise, de l’aveu d’une "difficile" réception du Concile Vatican II à sa main tendue aux franges les plus traditionnelles de l’institution, du bras de fer avec Pékin au dialogue avec l’islam…
Le Père Federico Lombardi assure que le pape ne se laissera pas intimider par ces révélations. Joseph Ratzinger, arrivé il y a 30 ans dans la curie romaine, savait d’ailleurs à quoi s’en tenir en s’installant dans le trône de Pierre. "Priez pour moi, demandait-il aux fidèles le 24 avril 2005, afin que je ne me dérobe pas, par peur, devant les loups". Prononcée au jour de l’inauguration de son pontificat, cette phrase prend tout son sens aujourd’hui. De même que la devise qu’il s’était donnée dès 1977 : "collaborateur de la vérité". Pour preuve, la ligne de conduite donnée par le pape aux chefs de la curie romaine fin janvier : "Soyez des témoins, soyez transparents en toute chose et travaillez comme des pasteurs prêts à donner leur vie pour les autres".
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