En 2010, 43 personnes sont mortes d'avoir trop longtemps vécues dans la rue. Pour rendre hommage à ces indigents, Le collectif "Les morts de la rue" organise chaque année une cérémonie dans la salle Gothique de l'Hôtel de Ville de Bruxelles. Celle-ci a eu lieu hier matin.
"Gabriel, Monsieur Gabriel, c'est ainsi que tu voulais être appelé et que nous te connaissions. Gabriel, comme l'ange Gabriel. Non pas un ange mais un archange, pour les chrétiens comme pour les musulmans: un messager de Dieu…" Quand Kris, débute ainsi son hommage à ce Gabriel (son vrai prénom était Bruno), "envolé" à 66 ans, le recueillement est de mise dans la salle Gothique de l'Hôtel de Ville archipleine. Nul murmure, nulle distraction, toute l'assemblée est à l'écoute, comme elle le sera pendant plus d'une heure à l'évocation d'autres disparus: Eddy, qui avait tout juste 20 ans; Charel, un vrai bruxellois de 81 ans avec les plus belles moustaches de la place Sainte-Catherine; Karine, une mère de 45 ans qui avait 4 enfants... En tout, plus d'une quarantaine de personnes. Jeunes, vieux, hommes, femmes, avec ou sans famille, tous sont morts d'avoir vécu trop longtemps dans la rue.
Pour Chantal Noël, qui ouvrait cette cérémonie, c'est évidement le genre d'hommage qu'on espère un jour ne plus avoir à organiser… Un espoir qui avait d'ailleurs déjà été formulé il y a six ans, lors de la première édition de cette cérémonie. "Mais la réalité continue de nous rattraper et puisqu'il est de notre devoir d'y faire face, nous allons à nouveau, le cœur gros, rendre hommage aux personnes oubliées de notre capitale, à ceux qui sont morts de la rue", regretta-t-elle avant de saluer quelques instants plus tard tout le travail effectués par les différentes structures et associations (CPAS, Restos du Cœur, Jamais sans toit, Maisons de quartier, Samu social, etc.) qui oeuvrent à la solidarité et tous les volontaires qui donnent de leur temps pour plus d'humanité dans notre société.
Une cérémonie Inter-cultuelle
Outre les hommages des gens de la rue à leurs compagnons d'infortune, plusieurs représentants religieux ont également témoigné au cours de cette cérémonie qui se veut intercultuelle. Parmi elles Marie-Thérèse Reul, Fille de la Charité et infirmière à La Fontaine (dans les Marolles), qui a notamment rapporté ces paroles révélatrices des blessés de la vie: "l'essentiel dans la vie, c'est d'être quelqu'un pour quelqu'un".
A l'issue de la cérémonie, tous les participants se sont ensuite retrouvés en contrebas de la place de l'Albertine, pour planter un arbre. Il sera le témoin silencieux et paisible d'une réalité qui n'est pas toujours facile à regarder. Mais aussi le symbole vivant de l'espoir pour les 2.000 sans-abri qui vivent dans la capitale belge.
Pierre GRANIER