Le 2 février dernier, le Premier ministre pakistanais Yousaf Raza Gilani a informé l’Assemblée nationale que son gouvernement n’avait jamais eu l’intention d’apporter un quelconque changement aux lois anti-blasphème. Le comité qui avait été formé pour étudier une refonte de ces lois a été dissous.
"C’est un acte de capitulation." C’est par ces mots que Mgr Lawrence Saldanha, archevêque de Lahore et président de la Conférence des évêques catholiques du Pakistan, a accueilli la nouvelle du retrait d’un projet visant à amender la loi anti-blasphème, rapporte l’agence Eglises d’Asie. Le chef du gouvernement a effectivement annoncé que Sherry Rehman, membre du Parti du peuple pakistanais (PPP), au pouvoir, qui avait déposé "à titre personnel" une proposition d’amendement demandant l’abandon de la peine capitale pour les crimes de blasphème contre Mahomet, avait retiré son texte.
La décision du Premier ministre s’inscrit dans un contexte politique de plus en tendu pour le PPP. Dans les grandes villes, les manifestations se sont multipliées pour appeler à une plus forte islamisation de la société. Pour Sherry Rehman, ancienne ministre de l’Information et grande figure libérale du PPP, la situation devenait intenable. Avec l’assassinat de Salman Taseer, elle était devenue quasiment la seule personnalité du pays à réclamer une révision des lois sur le blasphème. Menacée de mort par les islamistes, la députée avait déclaré le 3 février devant une nuée de journalistes: "Je n’ai pas d’autre option que de me ranger à la décision de mon parti. Ce projet de loi n’avait pas pour objet d’abroger la loi anti-blasphème, mais de mieux protéger le nom de notre grand Prophète Mahomet contre les injustices." Elle ajoutait: "La politique qui consiste à satisfaire aux exigences des extrémistes aura des conséquences funestes."
Pour Mgr Lawrence Saldanha, "céder aux pressions des partis musulmans est une erreur. Le gouvernement cède sur tout et il est clair qu’à court terme, il n’existe plus aucun espoir de voir amender ces lois controversées". Il a rappelé que "ce sont les pauvres et les chrétiens qui ont le plus souffert des lois anti-blasphème".