Les coptes ne pensent pas que l’Égypte puisse tomber entre les mains d’extrémistes islamiques. Certains hauts responsables restent toutefois prudents concernant les Frères musulmans, même si ceux-ci ont récemment déclaré qu’ils n’aspiraient pas au pouvoir.
Hosni Moubarak se présentait auprès des coptes comme un rempart contre l’islamisme. Pourtant, sa démission, le 11 février dernier, n’inquiète pas vraiment les chrétiens d’Égypte, qui ont participé à la révolution aux côtés des musulmans. « Il est magnifique de voir que ces événements ont créé un dialogue extraordinaire et durable, vu que chrétiens et musulmans font corps pour protéger leurs biens, rues et maisons, leurs églises et mosquées, sans se poser la problème de la religion« , a confié le cardinal Antonios Naguib, patriarche d’Alexandrie des coptes, dans un entretien accordé à l’agence Zenit. « Ils partagent les mêmes repas et passent la nuit ensemble en plein air. Je suis donc convaincu que ces sentiments fraternels serviront à créer une nouvelle et meilleure forme de coexistence. »
Il y a bien sûr une petite inquiétude concernant les Frères musulmans, mais la plupart des coptes ne pensent pas que l’Égypte puisse un jour basculer dans le fondamentalisme. De toute façon, les membres de cette confrérie fondée en Égypte en 1928 ne veulent pas que « la révolution soit présentée comme une révolution des Frères musulmans, une révolution islamique« , a expliqué leur porte-parole Rashad Al-Bayoumi, dans un entretien paru dans « Der Spiegel ». Ils se sont d’ailleurs maintenus en retrait lors des manifestations, a expliqué ce dernier, parce que « c’est un soulèvement du peuple égyptien« . « Le groupe n’a pas de plans, son objectif est de servir les personnes, et c’est ce qu’il fait depuis 80 ans« , ont également déclaré les Frères musulmans, le 4 février dernier. « Ils n’aspirent pas à la présidence, ou à une quelconque autorité ou place. Ils comptent sur une réforme populaire mesurée. » Le cardinal Naguib reste toutefois prudent: « Notre espoir est que ce soit le reflet de leur véritable position, de leur réelle intention. »
Un nouvel Irak ?
Les chrétiens d’Irak sont, pour leur part, beaucoup moins optimistes et craignent que l’Égypte ne devienne un nouvel Irak. « L’Égypte est un pays qui a une grande influence dans le monde arabe et s’il devait tomber dans les mains d’extrémistes islamiques, il y aurait des conséquences pour tous les chrétiens de la région« , a déclaré Mgr Louis Sako, archevêque chaldéen de Kirkouk, à l’agence italienne Sir. Interrogé par Radio Vatican le 14 février dernier, le cardinal Leonardo Sandri, préfet de la Congrégation pour les Églises orientales, espère lui aussi que l’Égypte ne deviendra pas le théâtre d’un exode massif de chrétiens, comme c’est le cas en Irak depuis la chute du régime de Saddam Hussein. À ses yeux, les autorités de transition et à venir doivent donc garantir la sécurité de tous les citoyens et surtout de ceux qui forment des minorités, « non pour des raisons de privilèges mais surtout parce qu’ils sont tous des citoyens égyptiens et qu’ils peuvent offrir leur collaboration » à leur pays. Le cardinal Naguib encourage également les chrétiens à « participer à l’action politique et sociale, exprimer leurs opinions et voter lors des élections« . (Apic/Zenit/PA)