Sous l’égide de l’Académie catholique de France, instance d’analyse et de réflexion, huit scientifiques signent un rapport mettant en question certaines conclusions du rapport de la CIASE. Interrogeant la méthodologie suivie, ils discutent aussi la validité de ses recommandations.
Jusqu’à présent, peu de voix s’étaient publiquement élevées contre les conclusions du rapport récemment présenté par la CIASE. Logique: toute remise en question (émanant de l’Eglise) risquait de passer pour une forme d’illégitime défense.
Voilà donc pourquoi cette note de 15 pages mérite que l’on s’y arrête. En tant que tel, ce n’est pas le principe d’un rapport indépendant qu’elle met en cause. « Il était nécessaire et beaucoup de questions qu’il soulève doivent être traitées avec lucidité », estiment les auteurs. « Cependant le rapport de la CIASE, en dépit de son volume, ne remplit que très partiellement ce cahier des charges dont il s’éloigne par ailleurs de troublante façon. »
C’est sur le nombre présumé de victimes que les chercheurs s’arrêtent en premier lieu. Et de rappeler que la CIASE n’a pas reçu plus de 2738 témoignages. « On est en droit de s’interroger sur la méthodologie de l’enquête quantitative qui a conduit à lancer à l’opinion le chiffre de 330 000 victimes, le seul chiffre retenu par les medias. » Les chercheurs dénoncent une « évaluation disproportionnée du fléau ». Conséquemment, ils interrogent aussi sa dimension « systémique », tant évoquée au cours des dernières semaines. « Le choix de cet adjectif emporte des conséquences fatales : les membres de l’Église sont impuissants à y remédier par eux-mêmes. »
« Pour retrouver son honneur et sa légitimité »
La note se penche ensuite sur les recommandations. Et relève différentes étrangetés. Un exemple: « La commission reconnaît qu’ « il n’y a clairement pas de lien de causalité entre le célibat et les abus sexuels (§ 894). Pourtant la recommandation 4 porte sur le célibat des prêtres et invite « à identifier les exigences éthiques du célibat consacré au regard, notamment, de la représentation du prêtre et du risque qui consisterait à lui conférer une position héroïque ou de domination ». »
La question de la responsabilité est aussi posée. Et les chercheurs de dénoncer l’idée de « responsabilité collective » attribuée aux différents acteurs de l’Eglise de France. « En quoi devrait-on trouver juste de faire supporter les fautes de quelques-uns par d’autres qui n’y ont en aucune manière contribué ? »
Au final, l’Académie catholique de France dénonce « méthodologie défaillante » et « carences » de différents ordres, de la part d’une Commission « sans autorité ecclésiale ni civile ». A présent, elle invite surtout l’Eglise à reprendre la main. « C’est à l’Eglise catholique seule, dans sa synodalité, qu’il revient d’entreprendre librement et dans l’esprit des actions lancées depuis vingt ans, les réformes nécessaires pour retrouver son honneur et sa légitimité. »