
Des jeunes citoyens européens en selle pour promouvoir une initiative en faveur de l’environnement (C)EcoScore Européen
Driiing driing! Cet été, une trentaine de jeunes étudiants et travailleurs, portant un T-shirt arborant le logo de leur projet « European EcoScore », s’est mise en selle pour conscientiser sur l’impact écologique de notre consommation. Voici les premiers échos d’une initiative concrète proposée aux citoyens européens.
Afin de mieux préserver les ressources de notre planète, des jeunes ont décidé de proposer une initiative citoyenne à l’échelle de l’Union Européenne (UE). C’est ainsi qu’un projet d’EcoScore européen pourrait voir le jour. Le défi est à la hauteur de leurs ambitions: ils ont un an pour récolter un million de signatures dans au moins 7 pays membres de l’UE.
L’équipe belge de l’EcoScore européen est l’initiatrice du projet. Pour démarrer la campagne de promotion, elle a organisé un tour à vélo (voir la vidéo). De Bruxelles à Luxembourg-ville en passant par Leuven, Hannut, Huy, Liège, Spa, Vielsam, Clervaux, Ettelbruck, ils sont partis rencontrer les gens, les écouter, les conscientiser, nouer des contacts et, bien sûr, récolter les premières signatures (environ 900 en dix jours). « Nous commencions par jouer de la musique puis nous présentions le projet d’EcoScore. Chaque jour, deux heures étaient consacrées aux rencontres avec la population. Le reste du temps c’était pour nous déplacer et pour nos rendez-vous », explique Emily qui relève par ailleurs que « chaque rencontre était l’occasion d’un partage. Les producteurs et les commerçants nous ont montré leur réalité. Nous avons logé chez des amis et un fermier. Avec les élus communaux, provinciaux, nationaux et même le gouverneur de la province de Liège nous avons échangé sur les solutions qu’ils mettent en place. Au Luxembourg, Jean-Marie Van Strydonck, le Consul Général de Belgique nous a ouvert des portes. » Antoine se réjouit: « Nous avons été accueillis par toutes ces autorités. Cela donne de la crédibilité à notre projet ».
Ni la météo pluvieuse, ni les longs détours imposés par les inondations, ni les pneus crevés, vélo volé et autres soucis techniques n’ont entamé le moral de l’équipe. « Notre objectif – largement atteint – était d’élargir le réseau, de récolter des contacts, de trouver d’autres ambassadeurs du projet, de créer des partenariats avec les communes… » Parfois, ils ont adapté leur programme pour des rencontres non prévues. Ainsi le bourgmestre de Hannut qui a appelé son homologue de Huy pour proposer de rencontrer les cyclistes de l’EcoScore.

L’EcoScore européen est une solution parmi d’autres pour préserver la santé de notre planète_(C)EcoScore Européen
Faire écho à l’urgence climatique
En parcourant les régions dévastées par les inondations, les jeunes cyclistes ont vu les dégâts catastrophiques pour les gens et pour la biodiversité. Antoine – qui est à l’origine de ce projet d’Initiative Citoyenne Européenne (ICE) – s’est senti conforté dans ce qui le motive à agir. « Depuis quelques années déjà, je prends conscience de l’urgence climatique. Cette impression que tout change si vite – on voit les conséquences désastreuses des inondations en Belgique – et, en même temps, notre difficulté à changer nos comportements; même moi! Notre difficulté à changer est parfois due à un manque d’outils. Je pense que l’EcoScore européen peut être un de ces outils et nous permettrait de nous orienter vers une consommation plus durable et plus respectueuse de notre environnement ».
Soyons donc des « consomm-acteurs ». Et justement, l’EcoScore européen peut nous y aider car il veut prendre en compte de nombreux critères d’impact sur l’environnement tels que l’extraction des matières premières, le transport, l’emballage et l’utilisation du produit, l’impact sur la biodiversité, la préservation des sols et la consommation d’eau, etc.
Ecouter les questions
Certes, Camille relève que tous ces contacts ont amené de nouvelles questions. Par exemple, la petite brasserie Lupulus à Gouvy note qu’elle ne dispose pas des mêmes moyens financiers que les grands groupes tels que AB Inbev pour répondre à l’Ecoscore. Ces derniers peuvent faire des économies d’échelle. Les gérants de Lupulus posent aussi la questions de la consommation en eau et des déchets. Notons que l’EcoScore européen devrait calculer l’impact d’un produit sur tout son cycle de vie. Le Consul Général du Luxembourg les a questionné, lui, sur la place à donner à l’éthique, par exemple le travail des enfants.
Même des participants se sont interrogés au départ. Quentin est très sensibilisé à la problématique environnementale mais « quand Antoine m’a parlé du projet, j’étais sceptique. Je trouvais qu’il y avait beaucoup d’idéal mais je me demandais ce qu’il en ressortirait concrètement. Je me demandais si le nombre de critères rendrait ils possible cet EcoScore européen? Maintenant, j’ai rejoint l’équipe car je vois que ce sont des ambitions réalistes. Et puis, c’est important de rêver! Par ailleurs le Nutriscore a changé ma façon de consommer car j’ai appris à être plus critique. C’est devenu un réflexe. Je pense donc que l’EcoScore peut aider les citoyens à être plus conscients ».
Ce n’est pas mon problème ?
Marion relève que beaucoup de gens font le lien entre leur consommation et les atteintes à l’environnement mais elle a l’impression que les défis des changements climatiques concernent davantage les jeunes. « Certains aînés nous ont dit qu’ils ne se sentent pas concernés. » Antoine se permet alors de leur rappeler de penser aux jeunes car « nous serons encore là! » Cela a permis de débattre sur la question des responsabilités.
Roger est le vétéran de la bande à qui il a donné un beau coup de main logistique. « Quand un projet part des jeunes, je les soutiens à 200%! Si les jeunes ne changent pas, qui le fera? Je trouve que les adultes ne croient pas assez à la force de la transition. » Un avis que nuance Jean-Marie Van Strydonck, bientôt à la retraite: « Contrairement aux jeunes qui pensent qu’ils ont la vie éternelle, les aînés sont très sensibles sur le sort de leurs enfants, petits-enfants et générations suivantes. Ils comprennent les dangers et sont souvent les décideurs. Je ne suis pas pessimiste sur leur rôle. C’est dans leur intérêt d’agir avec les jeunes. Tout le monde a un rôle à jouer, il faut en prendre conscience. Les jeunes peuvent donner le coup de pouce et ils sont les futurs électeurs. Il ne faut pas les ignorer. »
Alexander, néerlandophone, a aussi roulé pour l’EcoScore: « Je trouve que c’est un projet incroyable. Comme je ne suis pas très au courant de l’impact des produits que j’achète sur l’environnement, je pense que l’EcoScore va m’aider à y voir plus clair. La problématique environnementale est très importante. Il ne faut pas être milliardaire pour changer nos habitudes. »
Une chose est sûre, relève Hélène, expliquer en direct aux gens c’est plus parlant que de lire une information sur internet. Ce que confirme Jean-Marie Van Strydonck: « J’avais déjà lu ou entendu le terme EcoScore. Mais avec leur explications c’est plus clair. C’est un projet concret et très large qui peut toucher beaucoup de domaines et tous les citoyens. »
Relayer et diffuser
« Un an pour récolter des signatures, c’est un énorme travail », reconnaît Nicolas. « Nous devons être créatifs et nous associer à d’autres groupes ». Par exemple, à Hasselt, ils ont rencontré une coupole de 53 associations environnementales (la Limburgse Milieukoepel) qui fera le relais pour soutenir cette ICE. Joséphine complète: « Nous allons créer des équipes dans chaque université, rencontrer les écoles, participer à des événements sur la transition et le climat… » Manuel s’est senti « boosté » par ce tour. En Espagne, son équipe European EcoScore se développe mais le pays est plus grand. Il y a donc du travail et toute aide est bienvenue!
Ricardo fait partie de l’équipe autrichienne qui compte déjà 6 membres. « J’ai participé au tour pour rencontrer l’équipe fondatrice et m’inspirer. Avec mon équipe, je compte aussi faire un tour de promotion du même genre. Du haut de ses 20 ans, il ajoute: « Participer à ce tour et à ce projet est une des meilleures décisions de ma vie ».
Cet EcoScore-tour citoyen se terminait au Grand-Duché, les jeunes espéraient y rencontrer l’ambassadeur. « Il était très enthousiaste mais en congé », explique le Consul-Général de Belgique. C’est donc lui qui a accueilli les cyclistes dès leur arrivée sur le sol luxembourgeois.
« Les ambassades sont facilitateurs et catalisateurs: notre rôle est de susciter les contacts. Je suis fort content que nous ayons pu démontrer que la Belgique donne son support. Personnellement, je suis aussi touché par leur idéalisme et cela me paraissait évident de les soutenir, de leur consacrer du temps. C’était du temps bien utilisé. » Et il ajoute: « Ils avaient besoin de contacts utiles sur place. J’avais contacté une journaliste de Paperjam (un magazine économique important au Luxembourg) et l’article est paru. Ensuite, je leur ai offert un dîner car c’est toujours sympathique pour des jeunes qui ont fait une randonnée hardie. Ils ont parcouru des centaines de kilomètres. Et, en dernière minute, j’ai organisé une rencontre avec une représentante du Ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable du Grand-Duché de Luxembourg. Elle fera le suivi d’éléments qu’ils ont demandé. C’est une aubaine. J’espère que cette rencontre aura un effet boule de neige. Je suis confiant que les modestes contacts donnés pourront bien les aider. »
Tous ensemble !
« La plupart d’entre nous a participé aux marches pour le climat. On a été sensibilisés aux questions environnementales depuis plusieurs années et on a vraiment envie d’agir. On est face à cette urgence climatique qui nous pousse à agir. Et puis, je pense que plus spécifiquement dans ce contexte de pandémie mondiale, on a tous besoin de retrouver des projets fédérateurs. L’objectif de récolter 1 million de signatures, nous oblige à toucher beaucoup de monde et à convaincre d’autres de nous rejoindre. Et c’est ce bel enthousiasme qui est contagieux et qui est important, surtout maintenant. C’est quelque chose qui me nourrit chaque jour dans ce projet ».
Jean-Marie Van Strydonck est convaincu que c’est le momentum: « Une idée dont le temps est venu on ne peut pas l’arrêter! Les mentalités peuvent changer, pourvu – comme le disait Archimède – d’avoir le bon levier. Ici, le levier c’est la réalité, c’est dans l’intérêt même des gens de consommer autrement. » Alors, pour créer cette société qui tienne compte des défis des changements climatiques, les citoyens ont le pouvoir. Il reste onze mois à l’ICE Ecoscore Européen pour atteindre le million de signatures dans toute l’Union Européenne (40.000 en Belgique).
Parmi les nombreux événements auxquels l’équipe belge participera pendant toute cette campagne de collecte de signatures, citons RivEspérance 2021, les 8-9 octobre prochains, qui a pour thème « La transition: des idées aux actes ». Ce sera pour ces jeunes citoyens une belle occasion de promouvoir autrement leur ICE en y animant un atelier « Consommer, c’est voter, mais comment bien consommer? »
Nancy GOETHALS
Il y a deux liens pour signer l’Initiative Citoyenne Européenne (ICE) EcoScore Européen: https://eci.ec.europa.eu/018/public/#/screen/home ou via le site (seulement en anglais) www.europeanecoscore.com
Les jeunes présentent leur ICE et leur tour à vélo: voir la vidéo
Pour mieux comprendre ce que vise le projet d’EcoScore européen, lire dans lire Dimanche n°30 « Un EcoScore européen pour des consomm-acteurs »