
(c) Bastogne War museum
Le Bastogne War Museum dévoilait le 11 septembre les résultats du concours d’écriture « Plaidoiries de la mémoire ». Neuf jeunes rhétos ont été récompensés comme lauréats.
« Au jour d’aujourd’hui, j’ai peur pour mon avenir. J’ai peur de grandir dans un monde où on prône l’individualisme, un monde nourri par la haine, un monde où on reproduirait les erreurs du passé. Je ne suis pas censée avoir peur de mon avenir à 17 ans. Je ne suis pas censée déjà ressentir cette pression sur mes épaules. Je ne suis pas censée être pessimiste face à l’avenir peu glorieux qui se dresse devant moi… » C’est par ces mots que Chloé a plaidé un nécessaire travail de mémoire dans le cadre d’un concours d’écriture lancé par le Bastogne War Museum. Une cinquantaine de jeunes y ont participé avec elle. Neuf lauréats sont venus présenter leurs travaux oralement devant des jurys composés de trois personnes. Les prix ont été remis lors d’une cérémonie le 11 septembre dernier, autre date symbolique pour la mémoire.
Le travail a en fait commencé fin de l’année dernière quand les classes de terminale des trois écoles secondaires de Bastogne (ARBH, INDSé et ICET) étaient invitées à une « journée de découverte » du Bastogne War Museum. 108 élèves de rhétos ont répondu favorablement à cet appel. Lors de cette visite, il leur a été proposé d’écrire une composition littéraire de forme libre sur un événement de la Seconde Guerre mondiale les ayant marqués et de mettre celui-ci en lien avec une actualité que nous vivons en Europe : crise migratoire, défis climatiques, questionnements géopolitiques etc. Les élèves pouvaient par exemple associer l’exode des Belges vers le sud de la France en 1940 et la gestion des flux migratoires en Europe à l’heure actuelle. Le texte devait enfin être porteur de valeurs et d’espoirs pour les générations futures.
Vendredi dernier lors de cette cérémonie-concours, Michel Cornélis, le président de l’Asbl Tourisme Culture et Patrimoine, a largement insisté sur la nécessité de s’approprier les valeurs de « trace », d’ »exemplarité » et de « transmission » afin de pérenniser le souvenir et les traces écrites du passé. Citons par exemple la plaidoirie d’Arnaud, un autre jeune étudiant de Bastogne : « Et sur cette place Mac Auliffe qui grouille de monde, 75 ans après, j’éclate en sanglots. J’exprime ma tristesse et je célèbre la paix retrouvée. Je pense avec chagrin au Yémen, à l’Afghanistan, à la Syrie, à l’Irak, au Darfour, au Kivu… et à toutes ces populations qui vivent encore dans ‘mon décembre 1944’ »
D’une génération à l’autre
Armel Job était l’invité d’honneur de cette cérémonie prévue initialement en mai dernier, mais reporté au 11 septembre pour cause de Coronavirus. L’écrivain dont le renom a dépassé depuis longtemps l’échelle locale a pu profiter du temps de la délibération des jurys pour donner une très belle allocution sur les enjeux de la mémoire en paraphrasant les textes des 9 lauréats.
Le Bastogne War Museum souhaite par ce travail réalisé par les jeunes que les textes collectés deviennent les enseignements d’une compilation d’un « passé », celui des faits perpétrés entre 1940 et 1945 mais aussi celui de l’interprétation de ceux-ci à l’aune des prises de position de chacun des rhétos lauréats sur ces questions et observations multiples. Tous les jeunes ayant participé à ce concours d’écriture laisseront une trace puisque les textes de tous les lauréats ont été placés dans une urne de la mémoire. Cette urne ne sera ouverte que dans 24 ans par les rhétos de Bastogne la promotion 2044-2045 pour célébrer le centenaire de la Bataille des Ardennes. Une façon pour les jeunes de communiquer avec les générations à venir et de faire perdurer la mémoire des sujets qui les préoccupent…
Laissons le mot de la fin à un troisième élève, Florian : « Mais comment se fait-il que tous cas pays soient en guerre alors que nous vivons en paix. Tout repose sur un mot mon garçon, un mot qu’il est impératif de respecter et d’appliquer, un mot qui peut, et même qui doit changer le monde s’il est correctement appliqué. Ce mot c’est la Mémoire. Ce mot est bien plus qu’une suite de lettres. C’est un objectif que chaque génération se doit de perpétuer et de transmettre aux générations à venir afin de ne pas oublier les erreurs commises par le passé et ainsi ne jamais les commettre à nouveau… »
AF de B. (avec cp)