Habitués de s’isoler temporairement, les religieux installés à Lavaux-Sainte-Anne proposent quelques pistes pour vivre cette période au mieux.
Un confinement au cœur du confinement, c’est ce que vivent six frères de Tibériade depuis deux semaines. Un petit groupe est isolé du reste de la communauté puisque ces membres souffrent de quelques symptômes du Coronavirus. « Heureusement, jusqu’ici les nouvelles sont plutôt rassurantes!« , précise le frère Marc, « les frères vont de mieux en mieux. » En attendant la fin de leur quarantaine, ils vivent au noviciat tandis que les autres frères sont quelques centaines de mètres plus loin. Même distants, « il y a une grande attention fraternelle entre nous » comme cela peut se ressentir au sein d’une famille éloignée géographiquement. Dans le cas de Tibériade, la notion de service se ressent plus fortement. Frère Marc raconte: « nous préparons les repas de nos frères avec attention, nous prions en union avec eux. » La communauté n’étant plus occupée à accueillir des pèlerins ou des visiteurs extérieurs, l’attention fraternelle se porte mutuellement entre frères.
Depuis quelques jours, les amis de la Fraternité peuvent rejoindre virtuellement la communauté de Lavaux-Sainte-Anne par le biais des réseaux sociaux. En effet, les laudes, offices de milieu du jour, eucharisties et complies sont diffusés sur la page Facebook de Tibériade. Les internautes y retrouvent une manière toute simple de célébrer, avec le talent vocal de certains frères ou le jeu musical des autres. C’est aussi le lieu où des intentions particulières peuvent être confiées pour être incluses dans la prière des frères. La communauté s’est donc adaptée aux consignes du confinement, mais reste présente à l’écoute des besoins.
Cette expérience de l’isolement social qui est imposée par les mesures sanitaires n’est pas sans rappeler leur vécu de « désert » chaque lundi. Dans la vie habituelle de Tibériade, ce jour-là les frères et sœurs se retirent dans des ermitages pour un temps de solitude et de prière, un cœur-à-cœur poussé avec Dieu. Frère Marc reconnaît que « nous avons choisi de vivre cette solitude de manière positive, puisque nous la savons habitée par la présence du Seigneur à nos côtés. Aujourd’hui, nous sommes en communion avec ceux qui le vivent moins bien. » Alors, quels conseils les religieux de Lavaux-Sainte-Anne peuvent-ils donner pour vivre ce quotidien d’isolement?
De la couleur au quotidien
Frère Marc parle d’abord de l’attention à tous ces petits détails qui embellissent la vie. « Je me souviens qu’une coccinelle est venue se poser sur mon missel. Plutôt que de la chasser, j’ai pris le temps de la regarder. » Un autre exemple avec la préparation des repas: les frères font attention à mettre de la gaieté dans l’assiette en jouant sur plusieurs couleurs et saveurs. Rien de trop compliqué bien sûr, en fonction des ingrédients disponibles. Si la communauté de Tibériade a la chance de pouvoir s’inspirer de la nature environnante, c’est plus difficile en appartement. Frère Marc propose alors de faire appel à la créativité pour réinventer son décor quotidien. Ranger, repeindre éventuellement, planter quelques fleurs sur la terrasse… Bref, mettre de la couleur pour que le printemps apparaisse plus clairement.
Ce temps de confinement donne certes moins d’occasion de côtoyer du monde extérieur, mais sans doute plus de temps pour voyager intérieurement. Frère Marc fait par exemple quelques suggestions pour la Semaine sainte :
– pourquoi ne pas relire la Parole de Dieu, un chapitre chaque jour?
– ou alors de faire son chemin de croix en marchant dans le quartier
– ou encore se renseigner sur le saint du jour.
Les dons de Dieu
Les jours où nous sommes limités en sortie extérieure donnent l’occasion de s’intéresser également à ce qui se vit ailleurs, grâce à Internet, la télévision, le téléphone ou la radio. Frère Marc propose encore de réfléchir en fin de journée, à la manière dont Dieu a pu faire signe par des petits clins d’yeux dont Il est le spécialiste. « Tiens, Untel m’a appelé, ça m’a fait du bien… » Le religieux remarque : « Notre œil a besoin de voir ces petites choses, elles font du bien au moral. »
Finalement, la communauté de Tibériade subit autant que le reste de la population les effets du Coronavirus. Les risques de propagation du Covid-19 sont venus interrompre la mission qui se déroulait à Liège début mars. Et pourtant la présence des frères de Tibériade était très appréciée: « Les gens étaient étonnés de cette rencontre immédiate entre nous. Nous avons aussi remarqué, conclut Frère Marc, que les communautés paroissiales les plus vivantes sont celles qui ont l’esprit de famille. » C’est aussi une mentalité très présente au sein et autour de Lavaux-sainte-Anne, confinement ou non.
Anne-Françoise de Beaudrap
Photos : Fraternité de Tibériade