Encerclés dans un mouchoir de poche en Syrie, les derniers soldats du califat autoproclamé pourraient négocier leur sortie contre la libération de trois otages importants, à commencer par le célèbre jésuite italien disparu en juillet 2013.
L’information vient du sérieux quotidien britannique The Times, basée sur les dires des forces kurdes et arabes qui assiègent le dernier carré syrien de Daech. Leur porte-parole a toutefois démenti, peut-être pour garder les mains libres. Néanmoins, l’espoir renaît pour la première fois après tant de rumeurs sur la possible exécution de cet « amoureux de l’Islam, croyant en Jésus »*, aucune preuve et plus de cinq années passées depuis sa disparition.
Aucune preuve de vie mais…
Interpellé à propos des révélations récentes, «Ce serait une très belle nouvelle si cela était vrai», a commenté le Cardinal Zenari, non apostolique en Syrie. Le 7 février, le directeur de l’agence de presse vaticane a enchaîné « nous continuons à prier pour que le Père Paolo Dall’Oglio soit vivant ». La situation de ce prêtre estimé préoccupe le pape, qui avait appelé à sa libération et a convoqué récemment la famille pour lui exprimer sa sympathie.
Jusqu’au boutiste du dialogue
D’origine italienne, Paolo Dall’Oglio s’était installé depuis les années 80 dans les ruines du monastère de Mar Moussa, auxquelles il avait redonné vie en y installant une communauté, phare rayonnant du dialogue interreligieux. Après avoir donné trente ans de sa vie à ses frères et à sa terre d’adoption, la Syrie, il en est expulsé en 2012 suite à ses critiques ouvertes du régime et ses prises de position en faveur de la révolution. Face à la guerre fratricide qui embrasse les zones dites libérées, le bouillonnant prêtre ne put s’empêcher de tenter une ultime négociation et se rendit le 29 juillet 2013 au siège du pseudo Etat islamique à Raqqa d’où il n’est plus réapparu.
L’heure de vérité et les craintes
Le glas est en train de sonner dans les derniers retranchements syriens des plus farouches combattants de Daesh, dont le calife Al- Baghdadi pourrait faire partie. Si le P. Dall’Oglio est vivant, il risquerait de servir de dernière cartouche dans sa fuite ou de bouclier humain. Il ne faut pas perdre de vue non plus le récent rapprochement des forces kurdo-syriennes avec le régime suite à la perte annoncée de l’allié américain. D’où le risque pour le prêtre trop populaire, bête noire de Bachar, d’être exécuté par des hommes à la solde du régime, en maquillant le crime. Les jours et heures à venir seront déterminants, la tension extrême se mêle à l’espoir.
Une bougie pour Paolo ce 13 février à 18h30
Veillée d’armes. Ce mercredi à 18h30, devant l’église Sainte-Marie Majeure à Rome, l’association des amis journalistes de Paolo Dall’Oglio organise une procession aux flambeaux pour le jésuite romain mais aussi pour les otages qui l’accompagneraient, ainsi que les milliers de Syriens et d’étrangers enlevés ou arbitrairement détenus pendant des années en Syrie.
Dans l’esprit du prêtre, passionné de dialogue et de fraternité, de nombreuses organisations et communautés de différentes confessions allumeront « une lumière, symbole des croyants et des non-croyants, pour leur dire que nous ne les oublions pas », explique Riccardo Cristiano, à la base de l’initiative. On y retrouvera des musulmans aux côtés des jésuites, de la communauté de Sant Egidio, d’Amnesty international, etc.
« Nous espérons – écrivent les membres de l’association – que la lumière nous aidera à sortir de l’obscurité dans laquelle nous tâtons depuis le 29 juillet 2013, de la même obscurité que celle qui entoure quiconque a perdu un ou plusieurs milliers de Syriens et de Syriens plongés dans ce cauchemar. L’inhumanité de cette maladie nous fait encore plus mal chaque jour. Il ne s’agit pas de demander quelque chose, mais de garantir à Paolo et à tous les autres une heure d’affection, de solidarité et de proximité. »
En Belgique, en France, et dans les pays des amis du monastère de Mar Mousa, invitation est lancé à chacun(e) de s’unir au même moment par « une bougie, une prière pour Paolo Dall’Oglio ».
Béatrice PETIT
Photo © Cécile Massie