Le nouveau projet de loi sur l’élargissement des conditions pour avorter doit être voté, cette semaine, au Parlement. Hier, quelques représentants du collectif « Stop IVG 18 semaines » se sont exprimés lors d’une conférence de presse. Pour expliquer les raisons de leur opposition à cette nouvelle modification de la loi sur l’avortement.
Hier mardi 10 mars, ils étaient plusieurs à prendre la parole lors d’une conférence de presse, notamment le Dr Xavier De Muylder – Gynécologue (Clinique Saint-Jean, Bruxelles), la Dr Chantal Kortmann – Médecin pédiatre en médecine de l’enfance, scolaire et de la famille (ONE), membre depuis 2003 de la commission nationale d’évaluation de l’IVG, le Prof. em. dr. Bernard Spitz – Gynécologue (UZ Leuven), la Dr Elisabeth Zeller, gynécologue médical (Mons), la Dr. Arielle Nuchowicz, Gynécologue-obstétricienne (Uccle) ainsi que d’autres médecins et sages-femmes.
Ils ont rappelé que l’actuelle proposition de loi relative à l’IVG a été déposée par le Parti Socialiste en juillet 2019. Elle a ensuite fait l’objet d’un consensus rejoint par le sp.a, DéFi, Ecolo-Groen, le PTB-PVDA, l’Open VLD et le MR. Le vote sur le texte est prévu pour ce jeudi 12 mars 2020. Bien que la proposition de loi vise à modifier profondément non seulement la pratique mais aussi la conception-même de l’IVG, ses auteurs n’ont pas jugé nécessaire d’auditionner les experts sur les mesures qu’ils s’apprêtent à voter.
Alerter politiques et citoyens
Le collectif des “soignants opposés à l’extension de la loi sur l’avortement” est né d’un mouvement de soutien à la carte blanche parue dans La Libre Belgique et De Morgen en décembre 2019 et rédigée par 7 gynécologues et médecins. Rejointes par des milliers de citoyens et de praticiens, leur démarche a permis de lancer un premier signal d’alerte aux parlementaires au sujet des implications concrètes de la réforme proposée. Elle a fait prendre conscience aux soignants qu’ils devaient personnellement et collectivement, témoigner de leur vécu professionnel et de leur opposition à cette réforme.
A l’heure d’aujourd’hui, la pétition en ligne a recueilli les signatures de près de 11 000 citoyens et 2520 professionnels.
Entre novembre 2019 et mars 2020, plus de 70 professionnels de la santé ont contacté personnellement des députés. Trop rares ont été les échanges écrits ou téléphoniques constructifs, encore plus rare l’octroi d’entretiens, étant donné le peu d’intérêt ou de disponibilité des élus, pour un sujet pourtant grave, expliquent notamment les membres du collectif des “soignants opposés à l’extension de la loi sur l’avortement” qui a donc décidé de passer à l’action.
Pas d’unanimité des experts
Parmi les 20 experts entendus lors de la précédente modification de la loi sur l’avortement (mai-juin 2018), seuls 4 se sont montrés favorables à un délai de 18 semaines de grossesse, 4 étaient opposés à tout allongement, 7 ne se sont pas prononcés sur la question, 4 ont proposé un délai soit plus court, soit plus long que 18 semaines, et 1 expert n’a pas précisé l’allongement qu’il préconisait.
Et sur les autres mesures, comme le raccourcissement du délai de réflexion de 6 jours à 48h par exemple, aucune majorité du côté des experts ne s’est exprimée pour appuyer les mesures figurant dans l’actuelle proposition de loi. La plupart des experts ne se sont tout simplement pas exprimés sur ces changements.
Selon les données d’Eurostat, la quasi-totalité des habitants européens ont un délai d’avortement limité à 12 semaines de gestation. Les Pays-Bas font figure d’exception, alors que 25 pays sur 27 limitent le délai à moins de 14 semaines. Donc l’argument, souvent mis en avant, de l’alignement sur les pays voisines ne tient pas, selon les médecins.
Mesures choquantes
Le collectif dénonce en fait 4 mesures choquantes dans cette proposition de loi : l’augmentation du délai légal d’avortement qui serait porté à 20 semaines d’aménorrhée c’est-à-dire jusqu’à la moitié de la grossesse; la diminution du délai de réflexion minimum, de 6 jours à 48h; la suppression du devoir d’information sur les aides psychologiques et matérielles disponibles pour poursuivre la grossesse; définir l’IVG comme “un acte médical à part entière”. Dans le même esprit, la loi supprime toute sanction pénale en cas d’IVG pratiquée en dehors des conditions légales (par exemple au-delà des 18 semaines). Selon le projet de loi, “il n’y a aucune raison de maintenir des sanctions pénales spécifiques à l’encontre des médecins qui agiront pour ces actes médicaux avec la même conscience professionnelle que lorsqu’ils accomplissent tout autre acte médical”.
S.D. avec communiqué de presse
Illustration: capture écran conférence de presse – pixabay CCO