Nous vivons dans une société marquée par la violence et l’injustice. Pire: par des mécanismes d’humiliation. N’est-il pas urgent de formuler des pistes de résistance, cohérentes avec le message de l’Evangile? Tel est le pari que fait un collectif d’associations d’inspiration chrétienne réuni sous la bannière de la théologie par les pieds.
Dans les médias, sur les réseaux sociaux, dans les conversations et les lieux engagés, la violence et l’injustice occupent le devant de la scène. C’est qu’elles sont bien visibles, identifiables si l’on veut bien s’en préoccuper. L’humiliation, elle, œuvre dans les angles morts de la société. L’humiliation est ce poison lent qui réduit au silence celui qui la subit. Le jeune contrôlé plus souvent qu’à son tour en raison de sa couleur de peau. Les familles précaires dont les services sociaux vérifient le frigo pour voir si elles ont de quoi assurer la garde de leurs enfants. Les travailleurs moins adaptés sur lesquels on colle l’étiquette "d’inemployables"… L’humiliation produit l’insensibilité de celui, de celle qui ne la perçoit même pas, par habitude ou par aveuglement.
Des humains superflus
Ainsi l’humiliation est-elle véritablement la "défaite" de l’humain, touchant aussi bien les rapports interpersonnels que les institutions et les rapports sociaux. Elle est un facteur majeur dans maints phénomènes de nos existences et de nos sociétés. Mais elle est largement sous-estimée. "Notre hypothèse, écrit Olivier Abel, repose sur l’idée que les humains sont moins massivement tenus en esclavage et servitude que de plus en plus exclus et tenus comme superflus, inutiles, insignifiants. Comment penser le lien social quand les liens les plus intimes s’avèrent souvent précaires et ne cessent de se défaire? Et comment penser le lien intime quand les solidarités sociales sont démantelées?"
Quelles voies tracer?
S’appuyant sur la pensée d’Avishaï Margalit (1), Olivier Abel constate: "Faire progresser la justice sociale va devenir de plus en plus difficile (en particulier en raison des limites écologiques qui s’imposent). En revanche, il y a une énorme marge de progression dans nos sociétés, c’est celle de faire des institutions non humiliantes. A quelles conditions peut-on penser des institutions non-humiliantes (prisons, polices, frontières…)? Comment ne pas humilier? Ce n’est pas facile…".
Quelles voies tracer pour sortir de l’humiliation, de ses mécanismes et de ses effets sociaux? Comment résister et agir en commun? Comment penser et bâtir des institutions non-humiliantes?
Telles sont les questions que se poseront les participants à cette journée du 16 novembre. Fidèle à la méthode "voir - juger – agir", la "Théologie par les pieds" proposera une démarche collective en trois temps :
- Des clés d’analyse des mécanismes de l’humiliation, en référence à la réflexion d’Olivier Abel
- Une mise en lien avec l’expérience vécue des participant·e·s
- La recherche en commun de pistes d’action, inspirées par la rencontre et le débat avec l’Évangile.
(1) Se montrer, s’effacer in La Dignité aujourd’hui, Bruxelles, éditions des Facultés Universitaires Saint-Louis, 2007.
Le collectif proposant la démarche de "théologie par les pieds"
(titre et intertitres de la rédaction)
La théologie par les pieds ? Un chemin !
Depuis 2021, à l’initiative du Cefoc, vite rejoint par des partenaires (Entraide et Fraternité/Action Vivre ensemble, Lumen Vitae, le Vicariat de la santé du Diocèse de Liège, La Focap, La revue L’appel et RCF Sud Belgique), une journée annuelle de rencontre et de réflexion est proposée au grand public, dans une démarche de "Théologie par les pieds ".
"La théologie par les pieds est un chemin. A l’écart des grand-routes, il prend la direction des périphéries, il atteint les lieux où l’humanité vit à l’épreuve de la fragilité, de l’exclusion, de l’injustice: ces lieux où vivent des femmes et des hommes dont la voix est si atténuée qu’on les nomme souvent les sans voix. Et c’est pourquoi, en portant ses pas sur ce chemin et en ces lieux de vie, la théologie par les pieds n’est pas d’abord un discours, mais une pratique: celle des rencontres humaines, de l’hospitalité, du dérangement, des luttes partagées et des solidarités patiemment tissées."
Après deux journées consacrées au dépassement des peurs (2022) et aux "personnes à qui on ne demande rien" (2023), l’équipe a choisi le thème de l’humiliation pour son rendez-vous de 2024 Quand les sociétés sont humiliantes. Résistance et reconnaissance. Ce choix est inspiré par le livre récent d’Olivier Abel, philosophe protestant français, traitant De l’humiliation. Le nouveau poison de notre société (Éditions Les liens qui libèrent, Paris, 2023).
Quand ? Samedi 16 novembre 2024, de 9h30 à 16h30
Combien ? PAF de 30 euros.
Où ? Au Collège Notre-Dame de la Paix d’Erpent, Place Notre-Dame de la Paix 5, 5100 Namur
S’inscrire ? Avant le 5 novembre à l’adresse theologie.parlespieds@gmail.com
Plus d’information : www.latheologieparlespieds.be