Dans une lettre dense et sincère, Mgr Koen Vanhoutte, évêque auxiliaire pour le Brabant flamand et délégué de la Conférence épiscopale belge au Synode sur la synodalité, partage son regard sur la deuxième session, qui s'est clôturée il y a un mois. Entre réussites liturgiques et relationnelles, limites des débats et aspirations pour l’avenir, il rappelle que la transformation de l’Église reste un chantier ouvert.
« Mon impression globale sur la récente assemblée synodale est qu’on a pu vivre une session d’approfondissement après la session inaugurale d’octobre 2023. » Ainsi commence Mgr Koen Vanhoutte dans sa lettre, mettant en lumière l’atmosphère fraternelle qui a marqué cette deuxième session. Il évoque « d’agréables retrouvailles » entre participants, qui avaient déjà fait connaissance lors de la première session.
Cette session d’octobre 2024 a recentré les débats sur une question précise : "Comment devenir une Église plus synodale ?" Contrairement à la session inaugurale, où « toutes les thématiques furent pour ainsi dire en discussion », celle-ci a été perçue comme plus structurée. « Le tableau de la session inaugurale de 2023 a été, pour le dire d’une manière imagée, effacé au début de 2024 », écrit-il.
Pour autant, cette focalisation a eu un coût : « Un certain nombre de thèmes d’octobre 2023 ne furent presque plus abordés cette fois-ci. Ainsi, il ne fut pratiquement plus question d’une Église "inclusive". »
Une méthodologie qui porte ses fruits... mais qui a ses limites !
Dans sa lettre, Mgr Vanhoutte ne manque pas de souligner les moments liturgiques marquants « avec la belle célébration pénitentielle au début, puis une veillée de prière œcuménique à la fois très animée et sereine ; et enfin, la célébration eucharistique finale. ». Ces instants, selon lui, ont nourri l’esprit de communion entre les participants.
Au cœur des discussions, la méthode de la "conversation dans l’Esprit" a prouvé son efficacité. Il raconte: « La parole libre et une écoute intense se sont succédées dans une bonne ambiance. Parfois, cela a fait émerger une discussion plus vive avec un bon échange d’arguments, même si ce fut de manière limitée. »
Cependant, il relève quelques points négatifs. Il déplore que ces interventions libres aient parfois entraîné « une écoute longue et, par moments, difficile ». Un autre regret concerne les apports programmés, qui, bien que nombreux, étaient « forcément plus brefs, avec aussi l’évocation de thèmes très divers qui ne s’inscrivaient pas toujours dans le sujet de la session ».
Enfin, le représentant de la Conférence épiscopale belge à Rome raconte que, sur place, « moult participants regrettaient que les théologiens avaient été trop peu et trop tard impliqués », eux qui auraient pu, « à l’aune de leur expérience, diriger notre processus doctrinal et les débats sur de bonnes voies ».
Ainsi, « il n’y a pas eu dans les discussions de textes martyrs élaborés dans cette perspective par les théologiens » évoque-t-il notamment.
Des groupes d’étude encore en rodage
Un des défis soulevés par l’évêque concerne les groupes de réflexion et d'étude mis en place par le pape François pour travailler sur des thématiques spécifiques. Bien qu’il salue la démarche, il note certaines limites dans l’articulation entre leurs travaux et la session d'octobre. « Dans les rangs des participants au synode (...), ont surgi beaucoup de questions sur les liens plutôt vagues entre les groupes d’étude et la deuxième session synodale. »
Si les objectifs à long terme sont louables, leur intégration immédiate au processus synodal semble encore perfectible. Il donne un exemple : « Au début de la session d’octobre 2024, ces groupes d’étude ont présenté un bref bilan de ce qui avait été discuté. » Cependant, cette synthèse a laissé certains participants sur leur faim. « Il est apparu que ce fut trop court pour répondre aux attentes. »
Heureusement, plus tard durant la session, les participants au synode « ont eu l’occasion de rencontrer les membres de ces groupes d'étude ». Et le pape François leur « a promis qu’après la clôture finale de ces groupes d’études (été 2025 ndlr), il y aurait une consultation des conférences épiscopales. »
Un texte final prometteur, mais exigeant
Le texte final, résultat d’un long travail, a surpris par sa destination. « À la grande surprise de tous, le pape François a précisé lors de l’approbation du texte final qu’il confiait désormais celui-ci au Peuple de Dieu. » Pour Mgr Vanhoutte, cette décision reflète une confiance du souverain pontife dans la capacité des fidèles à transformer les idées en actions.
« Il est temps maintenant de transformer ces mots en actes et de passer de la théorie à la pratique », a insisté le pape. Cela impose, selon l’évêque, « de voir comment nous pouvons implémenter, traduire concrètement certaines propositions dans notre Eglise belge (diocésaine ou interdiocésaine) ». En commençant, d'après lui, par « mettre en ordre les priorités et établir un calendrier ».
Réformes et conversion : deux piliers indissociables
Mgr Vanhoutte insiste sur le fait que la transformation de l’Église ne peut se limiter à des ajustements organisationnels. « Le renouveau de l’Église va de pair avec une conversion spirituelle et une réforme structurelle. »
Il souligne également l’importance de reconnaître les missions confiées à tous les baptisés : « Nous avons fortement renforcé la reconnaissance et la promotion d’une grande quantité de missions de service pour les femmes et les hommes dans l’Église, à partir de leur baptême. » En revanche, il constate que « la spécificité des ministères consacrés fut cependant plus difficile à exprimer ».
Enfin, sur la question de la décentralisation : « Nous avons retenu le désir fort de mieux préciser ce qu’on entend par une saine décentralisation au sein de l’Église. On a aussi parlé des compétences propres des conférences épiscopales et des assemblées épiscopales continentales. On a aussi constaté qu’il y avait une forte conviction que l’Eglise catholique existe par et travers les églises locales. »
Une Église en chantier
S’inspirant des travaux de rénovation visibles à Rome pour l’Année jubilaire 2025, notamment des bâches portant la devise "Giubileo 2025. Roma si trasforma", il conclut par ce parallèle marquant :
« La Chiesa si trasforma ! L'Église se transforme ! Le passage vers une Église plus synodale et missionnaire a démarré mais est loin de se terminer. Il reste tant à faire. »
👉 Retrouvez ici l’intégralité de la lettre de Mgr Koen Vanhoutte
C.L. (avec cp)