Célébration d’adieu à Jodie Devos


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Célébration d’adieu à Jodie Devos
Par Diocèse de Namur
Publié le
6 min

Mgr Warin : « Jodie nous reste présente autrement »

Les funérailles de la soprano Jodie Devos ont eu lieu, en partie, ce samedi. Funérailles en deux temps avec un hommage, le matin, à la cathédrale Saint-Aubain. Outre le volet religieux, ses amis dont la plupart du monde du chant ont tenu à saluer « la belle personne qu’elle était ». La cathédrale était remplie d’amoureux du chant lyrique, le plus souvent très émus. Ce lundi, c’est à Neufchâteau en présence uniquement de la famille et des proches que les funérailles auront lieu.

Il est à peine 9h30 et toutes les chaises de la cathédrale sont déjà occupées. Les retardataires trouveront place dans les allées latérales pour cet hommage ouvert à tous. Ce sont ainsi plus d’un millier d’amoureux de la musique comme du chant lyrique qui étaient présents.  Sur la place Saint-Aubain quelques personnes attendent le convoi funéraire des fleurs à la main. Des fleurs blanches comme toutes celles choisies pour rendre un ultime hommage à Jodie Devos.

Une jeune femme qui, avant de s’installer à Paris, pour sa carrière, a vécu dans le diocèse. Si la jeune chanteuse lyrique -elle avait 35 ans- est née à Neufchâteau, elle a vécu à Lahérie. Très vite, sa voix a séduit. Partout où elle est passée, elle a fait des merveilles que ce soit à l’Imep ou encore à la Royal Academy of Music de Londres. Lors de son cursus à l’Imep, elle faisait ainsi régulièrement partie de la Maîtrise de la cathédrale.

Les mélomanes n’ont bien sûr pas oublié qu’elle a été la deuxième lauréate - elle remportait aussi le prix du public-, c’était en 2014, au prestigieux Concours Reine Elisabeth. Le 16 juin dernier, un cancer fulgurant l’a emporté.

« Le premier spectacle de l’éternité »

Mgr Warin, évêque du diocèse, présidait ce temps de recueillement avec, à son côté, l’archiprêtre de la cathédrale, le chanoine Van Cauwenbergh. Un écran géant a permis, à chacun, de vivre pleinement cet hommage. Sur cet écran avant qu’il ne s’anime à plusieurs reprises, une photo, celle de la soprano, belle, souriante. Solaire comme il sera dit à plusieurs reprises. « Ce ne sont pas ses funérailles que nous célébrons. Nous voulons plutôt vivre, sera-t-il dit, avec elle la « première » de tous ses spectacles d’éternité. Sur l’écran géant, les premières images sont celles de sa prestation au Concours Reine Elisabeth où elle a interprété « Gitter and be gay » de Léonard Bernstein lui-même inspiré par Candide, de Voltaire. Elégante, brillante, elle était aussi une sacrée comédienne faisant vivre son personnage. N’hésitant pas à adopter les mimiques voire les grimaces les moins flatteuses. Dans la cathédrale, ils sont nombreux à écraser une larme. Sourire des facéties de l’artiste n’aura jamais été aussi douloureux.

Les hommages s’enchaînent. Que retenir ? Elle faisait l’unanimité par sa bonne humeur, sa joie de vivre, son amour de la vie… Une perfectionniste encore qui ne serait jamais entrée en scène sans connaître tous les pièges de sa partition.

Où est Dieu ?

Avant la messe de funérailles qui sera célébrée ce lundi à Neufchâteau, cet hommage comportait un volet religieux. C’est l’évangile de Luc, Lc7, 11-17 qui a été choisi. Mgr Warin a souhaité que son homélie soit aussi message d’espérance. Voici cette homélie qui pourra réconforter bien des personnes dans la souffrance, le deuil.

« Jodie Devos vient d’achever trop tôt sa course ici-bas. Son départ creuse en nous, famille, artistes et mélomanes, un vide douloureux. Permettez-moi de vous exprimer ma profonde sympathie et de prononcer une parole de foi : la foi chrétienne animait la soprano de renom international.

Où est Dieu lorsqu’un cancer d’une rare violence fauche la vie d’une personne trop jeune ? A la terrible question qui monte sur nos lèvres lorsque brutalement nous nous trouvons confrontés au mal et à la souffrance, Dieu ne répond pas avec des mots. Sa réponse, c’est sa présence : Jésus venu habiter de sa présence nos souffrances.

Qu’il me soit permis de la rappeler. C’est l’histoire d’un homme chargé d’années et proche de la mort. Cette nuit-là, il fait un rêve, un rêve dans lequel repasse tout le film de sa vie. Il voit deux traces de pas dans le sable. Il se dit : « Ah le Seigneur a été, comme il l’a promis, auprès de moi. » Mais voici que repassent les phases les plus douloureuses de son existence, et cette fois il ne voit plus qu’une trace de pas dans le sable. Il se tourne vers le Seigneur : « Seigneur, serait-il possible que tu m’aies abandonné aux moments où j’avais le plus besoin de toi ? Alors le Seigneur prit ses mains dans les siennes et lui dit : « Mon enfant, je ne t’ai jamais laissé seul, et encore moins à l’heure de l’épreuve. Si tu ne vois plus qu’une trace de pas dans le sable, c’est parce qu’alors je te portais sur les épaules. »

Quand nous souffrons ou voyons souffrir, que tout notre être proteste. Proteste, parce que nous ne sommes pas faits pour la mort, mais pour la vie. Que tout notre être proteste oui, mais jamais contre Dieu. Notre mal l’atteint plus que nous-mêmes. Elle est juste, la remarque de Georges Bernanos dans « Journal d’un curé de campagne : « Une douleur vraie qui sort du cœur de l’homme appartient d’abord à Dieu, il me semble » (Œuvres romanesques, La Pléiade, p 1096).

Sur la croix, c’étaient nos souffrances qu’il portait. Jésus souffre en tout homme qui souffre. Et parce que Jésus souffre en tout homme qui souffre, nos jours d’épreuve peuvent être des vendredis saints, et aussi conduire au soleil du matin de Pâques, parce que le surlendemain du vendredi saint est un jour qui chante.

Il est ressuscité, et nous ressusciterons après lui. Sa résurrection est le gage de la nôtre. Il est revenu à la vie, premier-né d’entre les morts. Au-delà de notre mort, il nous attend sur le rivage.

Depuis le premier matin de Pâques, même le couchant d’une vie est la promesse d’un jour nouveau. Notre vie n’est plus un sursis avant l’échafaud. Le vieillissement n’est plus la catastrophe. Aucune pierre, si lourde soit-elle, n’est à jamais scellée sur nous-mêmes ou sur nos frères. Parce qu’un homme est sorti vivant du tombeau, les autres n’y resteront pas.

Jodie Devos, qui à l’heure qu’il est doit enchanter le ciel, nous reste présente, autrement. »

Un hommage qui s’est terminé par des applaudissements, de nombreux applaudissements comme tous ceux qui ont émaillé cette matinée.

C.B.

Photos : Maxime Bollen

Ses amis chanteurs lyriques avaient écrit un opéra imaginaire avec un personnage central bienveillant, rigoureux, qui avait le sens de la fête.
Plus de 1000 personnes étaient réunies à la cathédrale.
Mgr Warin dans son homélie : « Jodie Devos qui, à l’heure qu’il est doit enchanter le ciel, nous reste présente, autrement. »
L’évêque ponctuera ce moment en bénissant le corps puis en l’encensant.
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