François a reçu en audience, jeudi 2 mai, les archevêques, évêques présidents et modérateurs des Églises de la Communion anglicane, réunis à Rome pour la réunion des primats de 2024.
«Notre communion imparfaite ne doit pas nous empêcher de marcher ensemble»; François ne met pas de côté les questions qui divisent encore l’Église catholique de la Communion anglicane. Il souligne évidemment les nombreux progrès réalisés au cours des cinquante dernières années grâce à la commission internationale anglicane-catholique, et au lien spécial qui le lie à son «frère Justin» Welby, primat de l’Église d’Angleterre depuis le 21 mars 2013, au moment où Jorge Maria Bergoglio était élu évêque de Rome.
Ces onze années ont d’ailleurs été l’occasion de nombreuses rencontres entre les deux hommes, et elles ont permis de nouvelles avancées. Le Saint-Père rappelle le mandat commun donné à «des couples d'évêques catholiques et anglicans d'exercer ensemble leur ministère». Ces relations entre «bâtisseurs d’unité» aident à surmonter les craintes respectives; la présence du Ressuscité «au milieu de nous», qui «veut nous donner sa paix et son Esprit», offre des perspectives capables de surmonter le «découragement», les «attentes insatisfaites» et les «inquiétudes».
Partant des Actes des Apôtres, le Successeur de Pierre explique combien l’Esprit Saint parvient à ramener la concorde entre les apôtres alors qu’ils sont traversés par «des moments de tension et d'incompréhension, souvent nés de la fragilité des disciples, ou d'interprétations différentes du rapport avec la tradition passée».
Cependant, ils ne se découragent pas «face à la persécution» de répandre l’annonce joyeuse de l’Évangile. «Nous ne devons pas avoir peur des discussions, mais les vivre, poursuit François, en laissant la primauté au Paraclet. Nous devons prier et nous écouter les uns les autres, en cherchant à comprendre l'âme des autres et en nous demandant - avant de demander aux autre - si nous avons été dociles aux inspirations de l'Esprit ou si nous avons succombé à nos opinions personnelles ou de groupe».
C’est une nécessité dans «le monde déchiré d’aujourd’hui» qui «a besoin de la manifestation du Seigneur Jésus», dit le Pape en s’adressant à ses hôtes dont certains viennent de régions «où la guerre, la violence et l'injustice sont le pain quotidien des fidèles». Dans ces conditions, et même dans les pays riches et en paix où les souffrances ne manquent pas, catholiques et anglicans ne peuvent que renforcer leur «mission» pour faire connaitre le Christ.
La primauté du Pape
Cette mission commune ne doit pas empêcher parallèlement d’aborder des questions controversées, comme «le rôle de l’évêque de Rome», qui «divise les chrétiens». Son rôle, continue François en citant Grégoire le Grand est d’être servus servorum, serviteurs des serviteurs de Dieu. Et, citant le saint Pape Jean-Paul II, il ajoute: «Une telle définition permet de mieux se prémunir contre le risque de séparer le pouvoir (et en particulier la primauté) du ministère, ce qui contredirait le sens du pouvoir selon l'Évangile: “Je suis au milieu de vous comme celui qui sert”».
Le Pape invite donc à poursuivre un dialogue «nécessaire», «fraternel et patient» en laissant de côté les controverses inutiles «afin de comprendre comment le ministère pétrinien peut être exercé comme un service d'amour pour tous». La primauté comme «un don à partager» est l’un des résultats obtenus dans les différents dialogues œcuméniques.
Des progrès peuvent encore être faits, grâce notamment au processus synodal dans lequel l’Église de Rome s’est engagée, et auquel la contribution des délégués fraternels présents lors de la première session d’octobre et qui le seront encore lors de la prochaine session en octobre 2024, est saluée par le Saint-Père, lequel «prie pour qu'une meilleure compréhension du rôle de l'évêque de Rome soit l'un des fruits du synode».
Mais, quels que soient les obstacles, «prions, marchons et travaillons ensemble, avec confiance et espérance», soutient François, car «il serait scandaleux qu'en raison de nos divisions, nous n'accomplissions pas notre vocation commune à faire connaître le Christ». C’est l’Esprit Saint, conclut le Pape, qui «ouvrira de nouvelles portes et nous guidera» sur le chemin de l’unité. Le dialogue et l’approfondissement mutuel aideront à «discerner la volonté du Christ pour son Église».
Le rassemblement anglican à Rome
Les plus hauts responsables de la Communion anglicane ont choisi la capitale italienne cette année pour la réunion des primats. La rencontre qui a commencé le 29 avril se conclura le 3 mai. Pour leur premier rassemblement à Rome, les primats anglicans ont organisé leur rencontre comme un pèlerinage alternant séances de travail et visite des lieux saints. Ils avaient au programme, outre la rencontre de ce jeudi avec le Pape François, une conversation avec le cardinal Mario Grech, secrétaire général du Synode, sur la question de la synodalité pour l’ensemble de l’Église.
Les primats devaient initialement se retrouver à Rome en 2020, mais la réunion avait dû être reportée en raison de la pandémie de COVID-19. Pour le primat d’Angleterre, Justin Welby, cette rencontre romaine «est un moment important de pèlerinage et de fraternité».
Jean-Charles Putzolu pour Vatican News