La culture populaire est-elle obsédée par les « nonnes » ?


Partager
La culture populaire est-elle obsédée par les « nonnes » ?
Par Clément Laloyaux
Journaliste de CathoBel
Publié le - Modifié le
4 min

Une couverture de magazine, mettant en scène Rihanna en religieuse "sexualisée", a déclenché la controverse sur la toile. Pendant ce temps, en Italie, une marque de chips se retrouve également au cœur d'une polémique impliquant des sœurs. Ces deux cas récents illustrent l'impact durable de certaines figures religieuses dans la culture populaire

Le dernier numéro du Interview magazine, bimensuel co-fondé par Andy Warhol, consacre sa Une à Rihanna. Sur la couverture, la chanteuse pop porte un habit monastique noir et blanc avec un décolleté très plongeant, un fard à paupières bleu vif et un rouge à lèvres rouge. Le tout dans une pose particulièrement suggestive. Sur son visage est aussi tatouée une petite croix chrétienne.

Rihanna, persona "nonne" grata ?

Publiée sur le compte Instagram de la "star de la pop", la photo a immédiatement déclenché une avalanche de réactions négatives dans l'espace commentaires. "J'en ai assez que l'on tourne le christianisme en dérision", "Je suis musulman, et c'est très irrespectueux" "C'est de mauvais goût, je ne suis même pas chrétien ou catholique et j'ai l'impression que c'est un manque de respect" peut-on retrouver parmi les commentaires les plus likés.

Alors que certains internautes appellent au boycott de la chanteuse, l’accusant de "blasphème", d’autres tentent de la raisonner en citant des versets de la Bible : "Et que sert à un homme de gagner le monde entier, s'il vient à perdre son âme? [Matthieu 16:26-27]" écrit une jeune instagrammeuse.

Oli London, chanteur et influenceur anglais, interroge ouvertement : "Se moquer du christianisme, comme d'habitude ! Vous moqueriez-vous d'une autre religion comme l'islam ?" Eh bien la réponse est... oui ! Dans le passé, Rihanna s'est attaquée - toujours à des fins artistiques - à des symboles religieux issus de différents cultes.

Rihanna, 2018 © Youtube

Refaisons un petit récap'... Il y a d'abord eu sa tenue "sexy pope" (pape sexy), portée lors du Met Gala 2018, qui avait là encore scandalisé nombre de catholiques. A noter qu'à l'époque, l'Église s'était associée à l'exposition annuelle du Metropolitan Museum of Art - dont le gala marquait le lancement officiel - en prêtant plus de quarante vêtements pontificaux du Vatican. L'archevêque de New York, le cardinal Timothy Dolan, avait non seulement donné son aval à l'événement, mais avait également pris part au gala.

En 2020, la chanteuse défrayait à nouveau la chronique, cette fois-ci en diffusant le remix d’un hadith, un texte sacré de l’Islam, lors du défilé de sa marque de lingerie Savage x Fenty. Et en 2021, Rihanna a été accusée d’appropriation culturelle lorsqu’elle a été photographiée portant un pendentif représentant la divinité hindoue Ganesha.

Au final, la photo de Rihanna en "nonne" récoltera 1,9 million de likes rien que sur son compte Instagram, ce qui démontre le succès de cette stratégie marketing, vue comme audacieuse par les uns, controversée par les autres.

Hosties et hérésies en Italie

De son côté, l'entreprise italienne de chips Amica ne semble pas rencontrer le même succès avec leur dernière campagne marketing.

Début avril, la firme diffuse sur les chaînes de télé un spot publicitaire montrant des soeurs communiant avec, non pas des hosties consacrées, mais des chips Amica. L’entreprise subit une vague d’accusations de blasphèmes, notamment du fait qu’en italien, “chips” se dit "patatina", mot qui dans le jargon populaire désigne aussi le sexe féminin. Sur demande de l'Aiart, la puissante Association italienne des utilisateurs de radio et de télévision (d’inspiration catholique), le spot publicitaire sera finalement retiré de l’antenne, puis remplacé par une version plus consensuelle.

Des cas typiques de "nonnesploitation"

Ces deux cas montrent que les nonnes conservent un fort impact dans la culture populaire. Un phénomène qui a donné lieu à un sous-genre cinématographique : la "nonnesploitation". La nonnesploitation (de l’anglais "nunsploitation", mot-valise formé de "nun" et "exploitation") désigne les films - souvent controversés – qui jouent de l’image des religieuses « pieuses et pures », quitte à la déformer jusqu'à l'offense. La plupart du temps, les "nonnes" y sont représentées dans des situations sexuellement suggestives, où le divin et le profane se croisent et s'entremêlent. Un film récent s'inscrivant dans ce sous-genre cinématographique est Benedetta (2021) avec la Belge Virginie Efira.

C.L.

Catégorie : Culture

Dans la même catégorie