Dignitas infinita : la définition que l’Église donne à la dignité humaine


Partager
Dignitas infinita : la définition que l’Église donne à la dignité humaine
Lors de la conférence de presse de présentation de "Dignitas infinita", ce lundi 8 avril, Mgr Fernández a répondu sans ambages aux questions tout aussi directes des journalistes. © Vatican News
Par Armelle Delmelle
Publié le
4 min

Ce lundi 8 avril, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a publié, avec l’aval du Pape François, la déclaration Dignitas infinita. D'une vingtaine de pages, le document définit le concept de dignité de la personne humaine au sein de l’anthropologie chrétienne, en illustrant la portée ainsi que les implications positives au plan social, politique et économique. Certaines des violations à la dignité développées ont retenu l’attention de nos décrypteurs. La liste des violations à la dignité humaine est longue. Cela va de la pauvreté et la guerre à la théorie du genre et l’avortement en passant par les abus sexuels et les violences faites aux femmes. De l’universel à la bioéthique donc. Une lecture approfondie du document nous permet de comprendre quelques points de vue, d’autres un peu moins. Afin de nous assurer de bien comprendre la logique de la Congrégation, il est nécessaire de préciser que le document se concentre sur la dignité ontologique. Cela signifie que la liste des violations se limite à ce qui entache la dignité de l’homme en tant que créature de Dieu.

Une dignité inaliénable

Une chose que l’on comprend assez vite à la lecture de la Déclaration, c’est que la dignité ontologique non seulement prime sur les autres aux yeux de l’Église, mais qu’elle est inaliénable. La dignité ontologique ne pourrait en aucun cas être retirée à un être humain. Si cette dignité donnée par Dieu ne peut être retirée, elle pourrait cependant être abîmée. Notre dignité ontologique pourrait être abîmée par des situations comme la pauvreté ou la guerre, des actions menées à notre encontre comme le "bizutage numérique", ou des actions que nous menons nous-mêmes comme le changement de sexe.

Pauvreté, guerre et migration, tout est lié

Il y a donc des violations de la dignité humaine que l’on peut considérer comme universelles. Peu de gens vous diront que vivre dans un pays en guerre ou en situation de pauvreté ne diminue pas la dignité d’une personne. Il en va de même quand on pense aux migrants qui, une fois arrivés "à destination", travaillent dans des conditions déplorables. Et s’ils travaillent, c’est qu’ils n’ont pas été enfermés à leur arrivée comme le prévoit le pacte migration approuvé par le parlement européen le 10 avril dernier. Dans ce pacte, il est en effet prévu que le tri soit fait à l’arrivée aux frontières et que les migrants attendent le traitement de leur dossier dans des centres de détention. "On dit qu’ils sont illégaux", nous a dit Pierre Granier, secrétaire de rédaction du journal Dimanche, "mais même s’ils n’ont pas les papiers pour entrer sur le territoire, comment peut-on dire que quelqu’un est illégal sur la Terre ?"

"La GPA peut être un don"

Un point qui interpelle Manu van Lier, journaliste pour CathoBel et Dimanche, dans le document est la présence de la gestation pour autrui (GPA). "Je peux comprendre la violation si c’est fait pour un gain d’argent, mais la GPA peut être un don", a-t-il expliqué dans Décryptages. En effet, il y a de multiples raisons pour lesquelles un couple peut avoir recours à la GPA parce qu’il leur est impossible de le faire naturellement. On peut penser notamment à l’impossibilité de porter un enfant à la suite d’une maladie. La Déclaration justifie cela par le fait que faire d’un enfant l’objet d’un contrat est contraire à sa dignité. De plus, cela signifie que l’enfant sera inévitablement arraché à la femme qui l’a porté et qui aura certainement créé un lien avec l’enfant à naître. Et cela est contraire à la dignité ontologique de la mère porteuse.

"L'Église reconnaît ses errements"

De prime abord, la dernière partie du document de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi semble assez critique. A relever : en prêtant attention à la liste des éléments présentés comme des violations à la dignité, on peut y repérer des actes… commis par l'Église elle-même ! Pensons aux enfants retirés à leurs parents ou aux abus sexuels.

Comme le relève Pierre Granier, "l'Église actuelle se repent de ses errements. Il y en a eu beaucoup dans son histoire. Elle a une incarnation qui a ses défauts aussi." En ce qui concerne les abus, Manu van Lier souligne que l'Église a l'audace de les mentionner et de l'élégance dans la formule quand il est précisé que "ces abus ont laissé de profondes cicatrices dans le cœur de celui qui les subit." L'Église a un "engagement constant pour mettre fin à tous les types d'abus, en commençant par elle-même." (Dignitas Infinita, 43). "Ce n'est pas juste une Église moralisante pour les autres. C'est une Église qui se veut moralisante pour elle-même aussi", ajoute-t-il.

Manu Van Lier conclut en citant le cardinal Victor Manuel Fernandez, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi qui explique dans une interview que deux papes peuvent se contredire. "Ce n’est pas parce qu’un Pontife s'est exprimé d'une certaine manière sur un sujet que cette position sera arrêtée à tout jamais".


Dans la même catégorie