Mgr Bonny écrit dans les médias flamands : « Amis juifs, je ne peux plus rester silencieux »


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Mgr Bonny écrit dans les médias flamands : « Amis juifs, je ne peux plus rester silencieux »
Par La rédaction
Publié le
4 min

L'évêque d'Anvers qui "vit dans la ville flamande qui compte la plus grande communauté juive du pays" publie une lettre ouverte sur la situation de Gaza. Il rappelle: "Israël a le droit d’exister et de se défendre, personne n’en doutera. Mais les Palestiniens ont aussi le droit d’exister et de se défendre." Mgr Bonny s'exprime surtout en tant que chrétien, en puisant dans l'histoire de notre religion.

Je pense rarement, voire jamais, au pape Pie XII (1876-1958). Sauf ces derniers jours et semaines, depuis les violences du Hamas du 7 octobre et les bombardements à Gaza. À partir des années 1960, le pape Pie Il serait resté neutre trop longtemps. Il n’aurait pas réagi assez durement contre la puissante Allemagne. Cela lui a valu le surnom de « pape nazi » dans certains milieux.

Où commence et où finit le silence coupable ?

Du passé au présent, il n’y a qu’un petit pas. Dans le journal de ce matin, j'ai lu que quatre mille enfants sont déjà morts à Gaza, soit environ quatre cents chaque jour. "Gaza est devenue un cimetière pour les enfants", a déclaré le porte-parole de l'UNICEF, James Elder . "Et pour tout le monde, c'est un enfer."

L’Occident réagit dans la confusion et la contradiction. Beaucoup adoptent une position "neutre". Pendant ce temps, les grandes puissances militaires soutiennent l’armée israélienne. Parce que "tout est très complexe !" Ou : "Nous devons soutenir une démocratie occidentale comme Israël !" Pourquoi suis-je assis ici en tant qu'évêque et me tais-je ? De qui ou de quoi dois-je me retenir ?"

L'alibi idéal

Je vis dans la ville flamande qui compte la plus grande communauté juive du pays. J'ai de bonnes connaissances dans la communauté juive. Je suis membre de l'Organe consultatif des chrétiens et des juifs de Belgique (OCJB). Dois-je parler ou me taire, et pour qui ? Qui sera mon ami ou mon ennemi lorsque je parlerai ? C'est en effet une histoire complexe. Israël a le droit d’exister et de se défendre, personne n’en doutera. Mais les Palestiniens ont aussi le droit d’exister et de se défendre.

Malheureusement, tous les efforts visant à parvenir à une solution à deux États ont été systématiquement et stratégiquement boycottés. Jusqu'à ce qu'une explosion prévisible fournisse l'alibi idéal.
L'explosion s'est produite. L'offensive finale semble avoir commencé. Personne ne croit désormais à la coexistence pacifique dans l’ancien territoire sous mandat de la Palestine. Les enfants doivent mourir. Les jeunes doivent partir. Les autres se radicaliseront (que feraient-ils d’autre ?). Et après Gaza, la Cisjordanie suivra. Où sont les droits de l’homme et le droit international ?

En tant qu'évêque, je veux me limiter à mon domaine, celui de la foi. Chrétiens et juifs partagent en grande partie les mêmes écrits sacrés, les livres que nous appelons l’Ancien Testament. Mais dans notre interprétation de ces écrits, nous ne sommes en aucun cas sur le même chemin depuis la mort et la résurrection de Jésus-Christ. Cette différence ne concerne pas des accessoires, mais le cœur du problème: le fait que l'amour de Dieu et le salut de Dieu ne sont plus liés à un pays, une race ou une culture spécifique. Au cœur du christianisme se trouve l’universalité du salut. Tous les droits et devoirs associés à la foi chrétienne ont une signification universelle. Ils transcendent tout intérêt privé, même tout intérêt religieux privé.

Religion, sang et violence

Par conséquent, selon l'opinion chrétienne, il n'y a aucune parole de Dieu dans l'Ancien Testament qui, après la mort et la résurrection de Jésus, puisse légitimer une récupération violente ou une expansion militaire du soi-disant « pays biblique ». Le Dieu d’Israël est le Père de tous les peuples, comme le dit la Genèse.

Il est exaspérant de constater que certains dirigeants politiques et militaires israéliens abusent des thèmes bibliques pour légitimer leurs actions meurtrières.
Ils nuisent à l’image de leur religion et de toutes les religions du monde. Ils pervertissent le sens des plus belles expressions bibliques comme celles de l’Élection, de l’Alliance, de la Promesse, de l’Exode, de la Terre promise ou encore de la Jérusalem de la fin de vie. Ils renforcent l’impression que la religion est liée au sang, à la terre et à la violence.

Certes, je dis cela en tant que chrétien. Et en tant que chrétien, je dois également traiter notre passé avec prudence. Mais en parlant ainsi, je suis obligé par la différence essentielle – et donc par le message même – pour lequel Jésus de Nazareth est mort sur la croix. Déjà à cette époque : un juif de Palestine, âgé de 33 ans.

(Mgr Bonny, publié sur Kerknet)

Titre, chapô: CathoBel

Catégorie : Eglise Belgique

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