
François n’aime-t-il pas la France? C’est l’une des micro-polémiques qui a agité nos voisins de l’Hexagone au cours des dernières semaines. En cause: l’insistance des services du Saint-Siège à présenter le déplacement du Pape à Marseille comme une visite… à Marseille et non pas en France. « Je n’ai rien contre la France », insistait pourtant le pape dans l’avion qui le ramenait des Journées mondiales de la jeunesse. « C’est une politique », expliquait-il. « Je visite les petits pays européens. Les grands, je les laisse pour après, pour la fin. » (Même si on ne sait pas trop pour quand…).
Rien de personnel, donc. Mais rien d’anodin non plus. François est allé à Marseille après avoir été à Lampedusa et à Lesbos. Que ces villes se trouvent en France, en Italie et en Grèce lui importe peu. François sait que les pays sont délimités par des frontières, et que celles-ci risquent toujours de diviser. Voilà pourquoi il préfère les plages et les rivages. Les mers relient les continents. Au bord de la Méditerranée, François est venu nous rappeler notre appartenance à une commune humanité.
Ajoutons que la polémique franco-française a quelque chose à nous dire. Si François s’était rendu en France, les Français auraient pu se contenter de… l’accueillir. Ici, il les a invités à se déplacer. A se mettre en marche. A se rendre aux marges. A tendre l’oreille. A entendre les cris. Et tel est bien le sens des différents voyages que l’évêque de Rome effectue depuis plus de dix ans. Si François aime tant voyager, c’est parce qu’il veut nous faire voyager. Chaque fois qu’il se déplace, c’est l’Eglise entière qu’il essaie de mettre en mouvement. Nous prenant dans ses valises, il nous invite à nous décentrer.
Reste qu’il n’est pas toujours facile de le suivre. « J’espère avoir le courage de dire tout ce que je veux dire », avait prévenu François alors qu’il s’envolait vers Marseille. Et force est de constater la radicalité de son discours. Condamnant la peur et l’indifférence, il nous invite à accueillir tous les migrants et à favoriser leur intégration. Certains lui reprochent un manque de nuance, une absence de réalisme, et même de susciter les oppositions? Peut-être. Mais n’est-ce pas ce qu’on a toujours reproché aux prophètes?
Vincent DELCORPS