Prononcer l’homélie d’une messe en wallon, à Namur, le lundi des Fêtes de Wallonie est, à chaque fois, un défi. L’abbé Bernard Van Vynckt, doyen de Marche qui a succédé il y a neuf ans, à l’abbé Paul Malherbe, en est bien conscient. D’où la boule à l’estomac qui l’accompagne jusqu’à lundi midi ! Il sait qu’il est attendu. Ou plutôt que son homélie est attendue pour les quelques rosseries qu’elle contiendra.
Un réel engouement populaire entoure cette messe. Le prêtre s’empresse de préciser: « Cette messe n’est pas un show. Une messe, c’est sérieux. Ici, elle est célébrée par des gens qui ne se prennent pas au sérieux. » Jusqu’au dernier moment, l’abbé Bernard Van Vynckt peaufine son texte d’homélie. L’auteur se doit d’être réactif. L’abbé Van Vynckt vient ainsi d’intégrer un passage dédié aux victimes du séisme qui vient de secouer le Maroc ou encore des inondations qui ont ravagé la Libye.
Chaque année, au moment d’écrire le premier mot de son homélie, l’abbé Van Vynckt se pose toujours la même question : « qu’est-ce que je vais bien pouvoir dire ? » Et en cette année qui marque les 100 ans des festivités, l’abbé Van Vynckt avait le sentiment, plus que jamais, que tout aurait déjà été dit lorsqu’il prononcerait son homélie !
Marcher aide à réfléchir
Avant de démarrer l’écriture de l’homélie, il faut choisir l’évangile. Il a jeté son dévolu sur les Paraboles, s’inspirant spécialement de la parabole des ouvriers de la 11e heure. « Mon prêche, je le compose d’abord dans ma tête. Et après, cela va très vite. » Ses longues promenades dans la région de Marche sont un moment idéal pour réfléchir à ce qu’il va dire.
« On attend un curé arsouille. Ça, c’est dans la première partie de l’homélie. » Après, l’abbé mise sur sa connaissance de la langue pour faire passer son message en utilisant toute la richesse du vocabulaire wallon, ses subtilités. « Je dis des choses mais toujours avec retenue. » Une langue savoureuse qui fonctionne aussi avec beaucoup d’images. Si l’abbé Van Vynckt reconnait être stressé avant cette messe c’est justement parce qu’il s’interroge toujours quant à savoir comment son message va passer. Comment il va être entendu.
Pourquoi pas une messe en wallon ?
Une messe en wallon qui est célébrée, dans le cadre de ces fêtes, depuis 71 ans. « Joseph Calozet et Lucien Léonard deux auteurs wallons accompagnés d’Ernest Montellier, musicien, chef d’orchestre… ont sollicité, à l’époque, un rendez-vous avec Mgr Charue alors évêque de Namur. Ils lui ont demandé de pouvoir, lors de ces fêtes, célébrer la messe en wallon. Et celui-ci de répondre : « Poqwè nin » (pourquoi pas). » Et depuis, chaque lundi des Wallos, cette messe est un véritable rendez-vous, incontournable pour beaucoup. « C’est une messe du souvenir » ponctue l’abbé Van Vynckt. C’est ainsi que le drapeau de 1830 est présent comme ceux des conflits de 14-18 et de 40-45. « On se souvient encore de toutes les personnes, membres de l’organisation, décédées ».

L’abbé Van Vynckt est heureux que cette messe soit célébrée, en wallon, comme d’autres ailleurs dans le diocèse. Il ne peut cependant s’empêcher de s’inquiéter sur l’avenir de ces célébrations. Bien peu de prêtres peuvent, aujourd’hui, se lancer dans un tel exercice. Par ailleurs, les plus jeunes ne sont plus des familiers de cette langue tellement savoureuse… Mais, ça c’est une autre histoire.
Christine Bolinne (👉 Diocèse de Namur)