Si l’ouvrage collectif « Questionnements de genre chez les enfants et les adolescents » est clairement orienté, voire militant, il n’en pose pas moins les bonnes questions, éclairées par de nombreux experts, confrontés à la dysphorie de genre dans leur domaine respectif (juridique, médical, psychologique, scolaire).

De plus en plus de mineur(e)s se déclarent transgenres – présentant ce qu’on appelle une dysphorie de genre, décalage entre le sexe biologique et le sexe ressenti – et souhaitent même entamer une transition, sociale mais aussi médicale. Si leur détresse doit être accueillie avec sérieux, la prise en charge actuelle inquiète. A plusieurs titres.
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Se méfier du discours mensonger des réseaux sociaux
Alors que plusieurs études ont montré que, la plupart du temps, le trouble cesse avant l’âge adulte, les réserves émises par certains médecins – taxé de transphobes – quant à la manière de traiter la dysphorie chez les enfants et adolescents les ont, paradoxalement, discrédités. Certains l’ont même payé de leur carrière !
Les auteurs de l’ouvrage dénoncent cette approche dite trans-affirmative qui valorise la transition sociale et/ou médicale tout en oblitérant les effets pervers de celle-ci. Par ailleurs, le rôle des réseaux sociaux est flagrant, où la transition est mise en scène sous son plus beau jour.
Or, alertent nos experts, les transitions médicales menées jusqu’au bout impliquent des chirurgies génitales lourdes, complexes, aux conséquences parfois dramatiques. Même incomplet, un parcours de transition n’est pas sans risques, la seule prise d’hormones entrainent des effets secondaires, pour certains irréversibles, et des problèmes de santé à long terme.
Dépathologiser la transition, bonne ou mauvaise idée?
La prise de bloqueurs de puberté chez l’enfant le prive en réalité d’une étape capitale de son développement corporel et cérébral, et le condamne en réalité à rester un enfant. Car beaucoup oublient, selon nos experts, que l’enfant est un être en développement et pas un adulte en miniature. De plus, les traitements hormonaux ou chirurgies transforment en définitive un adolescent en bonne santé en malade chronique, en patient à vie.
Dès lors, parvenir à une dépathologisation complète du parcours médical, comme le réclament les partisans de l’approche trans-affirmative, signifierait autoriser la prise d’hormones ou l’intervention chirurgicale sans consultation psychiatrique préalable ni aucun suivi même pour des enfants ou adolescents. Est-ce bien raisonnable?
On peut sincèrement en douter quand on écoute le récit des « détransitionneurs » et de leurs souffrances pour retrouver leur corps d’origine. Ceux-ci regrettent souvent l’absence de prise en charge psychologique et d’information autour des aspects négatifs de la transition. Si l’enfant ou l’adolescent souffre de dépression, l’engager dans un parcours de transition fera diversion un moment, mais la dépression demeurera.
Mieux vaut atte(i)ndre la maturité
Sachant que la prise d’hormones – à vie – entraine notamment la stérilité, des effets irréversibles et possiblement des problèmes de santé. Sachant que la chirurgie ne crée généralement que des organes génitaux dysfonctionnels, inconfortables voire douloureux. Sachant que le cerveau d’un adolescent n’a pas encore atteint sa pleine maturité, ce qui affecte notamment sa perception des risques à long terme.

Comment pourrait-on laisser prendre une décision aussi lourde de conséquences à des individus mineurs et immatures ? Mieux vaut avoir attendu une majorité effective, disent les psychologues, pour opérer un tel choix. Ajoutant que la prétendue faculté d’autodétermination de l’enfant ou de l’adolescent est un leurre.
Sophie DELHALLE