Carine Dequenne – Une consacrée belge au service du Vatican


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Carine Dequenne – Une consacrée belge au service du Vatican
Par La rédaction
Publié le - Modifié le
5 min

Juriste de formation, Carine Dequenne est célibataire consacrée dans la communauté de l’Emmanuel depuis une vingtaine d’années. Après s’être spécialisée en droit canon, elle a rejoint le dicastère pour les Instituts de Vie Consacrée à Rome depuis 2010. Portrait d’une "official" belge.

© CathoBel

La vocation de Carine n’est pas récente. Le souvenir qui lui revient lorsqu’on aborde le sujet remonte à ses sept ans, peu après sa première communion. En sortant de la messe, elle sent quelque chose qui jaillit de son cœur: un désir de vie religieuse. Elle se confie alors à sa grand-mère qui l’accompagne sur le chemin du retour. Carine explique avoir été un peu déçue par la réponse qu’elle reçut alors: "Ecoute Carine, on en reparlera un peu plus tard". Cependant, avec le recul, elle confie avoir toujours gardé ce désir en elle, sans savoir comment, ni pourquoi. Ce qui ne l’a pas empêchée de vivre une adolescence qu’elle qualifie de "normale" – ni de rêver au prince charmant.

Si Carine n’a finalement pas choisi de suivre un prince charmant, elle n’est pas davantage entrée au couvent, ni ne vit au sein d’une communauté religieuse. Elle a choisi de consacrer sa vie à Dieu par le biais du célibat consacré en vivant dans le monde, au sein d’une communauté où se vit la complémentarité des états de vie, avec une large majorité de laïcs et aussi des prêtres. Dans le fond, sa vocation est alignée avec son désir de jeunesse: "Je ne suis pas religieuse, mais ce désir de vie célibataire consacrée, je pense que c’est vraiment ce qu’il y avait de plus profond en moi."

De Namur à Rome

Après des études de droit à Saint-Louis et à L’ULB, de nombreuses expériences professionnelles l’ont conduite à Namur. C’est là que Mgr Léonard, alors évêque du diocèse, lui propose de se spécialiser dans le droit canonique. "Et j’ai accepté avec joie", sourit-elle.
A la fin de sa spécialisation, à sa plus grande surprise, on lui propose d’aller à Rome et de rejoindre le Dicastère pour les Instituts de Vie Consacrée et les Sociétés de Vie Apostolique. Cet organe compte cinq bureaux qui traitent les différents aspects et formes qui coexistent dans ces états de vie. Aujourd’hui, cela fait treize ans que Carine Dequenne travaille au Vatican, au sein d’un dicastère dans lequel elle trouve le sens de sa vocation. Elle est actuellement affectée au cinquième bureau, à la section qui s’occupe du début et de la fin des instituts de vie consacrée relevant du droit pontifical. C’est à dire les instituts internationaux, répandus dans plusieurs pays, comme les frères franciscains ou les sœurs de Notre-Dame. Il en existe aux alentours de 1.500.

Un début et une fin

Carine explique que la création d’un institut de vie consacrée ne se fait pas du jour au lendemain. Il faut accompagner les fondateurs, les aider à prendre de bonnes habitudes et à rédiger des statuts qui leur permettront de vivre de manière de plus en plus autonome et équilibrée, dans le respect des personnes et de la foi de l’Eglise.

Parallèlement, il peut aussi arriver qu’un institut arrive en fin de vie. Après des siècles ou des décennies de dévouement et de prière, on constate que de nombreuses congrégations accueillent de moins en moins de vocations. Leurs membres devenant âgés, l’autonomie prévue pour les instituts de vie consacrée leur est plus difficile à vivre seuls, nous explique l’experte. La mission du dicastère est alors d’aider les membres, de les entourer afin qu’ils puissent rester fidèles à leur vie religieuse jusqu’au bout. Il s’agit aussi de protéger ces personnes qui pourraient devenir des proies et devenir l’objet d’abus, au sens large, de la part de personnes extérieures.

Les abus dans les communautés sont hélas une réalité qui impacte le travail de Carine. Lorsqu’on interroge la consacrée belge, elle nous confie qu’il y a aujourd’hui une meilleure sensibilisation à ces questions. "Les gens ne supportent plus nécessairement tout ce qu’ils supportaient par le passé. Il faut donc aider les personnes et instituts qui sont dans des situations difficiles à les traverser." Pour elle, il est important de veiller à ce que ça ne se reproduise plus, il y a un vrai besoin de formation et d’accompagnement face à toutes ces réalités, notamment lors de la naissance des mouvements.

Carine en profite pour souligner un regret: le fait que l’on ne parle pas beaucoup des personnes de l’ombre qui aident celles et ceux qui traversent ces phases difficiles à retrouver un chemin de vie. "On parle beaucoup des personnes qui abusent, et il faut effectivement qu’on en parle. Mais des personnes extraordinaires se dévouent, des religieux, des religieuses, des laïcs, des prêtres, des évêques sans lesquels on aurait beaucoup de mal à traverser ces épisodes très douloureux."

L’Eglise est un peuple

Quant au synode actuel sur la synodalité, notre invitée trouve la démarche intéressante. "On n’attend pas que tout nous vienne de la hiérarchie et du sommet, mais on part du terrain", nous confie-t-elle. "Je pense aussi que c’est quelque chose qui émerge de la vie de l’Eglise."
La consacrée fait rapidement le lien avec le concile Vatican II. Elle rappelle "l’appel commun à la sainteté, le fait que nous sommes tous finalement fidèles du Christ, enfants du père et temple de l’esprit". Pour la canoniste, le temps a été nécessaire afin de prendre du recul sur le fonctionnement de l’Église pour pouvoir maintenant réfléchir sur une institution devenue très et sans doute trop hiérarchique. Pour elle, l’Eglise est avant tout un peuple en marche vers la réalisation du projet de Dieu. "Cela ne veut pas dire que tout d’un coup, on ignore le sacerdoce! Ce sont plutôt deux réalités qui doivent être vues ensemble. Le squelette de l’Eglise, c’est la structure sacramentelle et la parole de Dieu, ce qui implique effectivement une institutionnalisation. Et puis il y a cette autre réalité qui est la dimension du peuple de Dieu et les deux doivent grandir ensemble. Concrètement, on peut dire que nous sommes, ensemble, unis dans la diversité. Chacun a son poste, chacun a sa mission. Ce sont des missions différentes qu’il faut respecter. L’Eglise est plus qu’une hiérarchie, elle est un peuple."

Jacques GALLOY et Jean LANNOY

Retrouvez Carine Dequenne dans God’s Talent, un podcast de 1RCF, sur www.rcf.be

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