Poursuivant son déplacement en Afrique, le pape François s’est rendu, du 3 au 5 février, au Sud-Soudan, le plus jeune pays du monde. Avec 12 millions d’habitants majoritairement chrétiens, il figure parmi les plus pauvres du continent africain.

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Dès son arrivée à Djouba, la capitale, le pape François a expliqué le sens de son pèlerinage œcuménique et exhorté les responsables du pays à un engagement véritable et concret en faveur de la paix et de la réconciliation : « Assez de destructions, c’est l’heure de la construction ! » Aux côtés de l’archevêque de Canterbury Mgr Justin Welby et du modérateur de l’Église d’Écosse Iain Greenshields, le Souverain pontife a exhorté ses dirigeants à s’engager vers une paix véritable : « la jeune histoire de ce pays déchiré par des affrontements ethniques, a besoin de retrouver la mystique de la rencontre, la grâce du fait d’être ensemble ». En avril 2019, le pape avait déjà donné une forte impulsion au processus de paix, en rencontrant au Vatican les principaux responsables institutionnels du pays, qui avaient signé un accord de paix la même année. Saluant la visite de ce début d’année, qualifiée « d’étape historique », le chef de l’Etat, Salva Kiir s’est dit prêt à reprendre les pourparlers de paix, sous la médiation de la communauté de Sant’Egidio, avec les groupes d’opposition non signataires.
Malgré d’immenses richesses, le Sud-Soudan est ravagé par la guerre civile et les affrontements entre les différents groupes ethniques, avec un bilan de 400 000 morts en six ans de conflit. Un pays touché aussi par le changement climatique qui a provoqué le déplacement de quatre millions de personnes, deux à l’intérieur du pays, les deux autres millions dans des pays voisins. Le pape a d’ailleurs qualifié la situation de « tragédie humanitaire » en raison du nombre exponentiel de déplacés, de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition endémiques. Pour Mgr Hubertus Matheus Maria van Megen, nonce apostolique au Soudan du Sud, « chaque famille compte au moins quelques membres, voire toute la famille, qui sont déplacés ». Ajoutant que désormais ce sont « les catastrophes naturelles, écologiques qui pèsent sur cette nation ». Comme les six autres évêques du Soudan du Sud, Mgr Christian Carlassare est venu à Juba pour accueillir François, mais à pied. Evêque de Rumbek depuis mars 2021, il a parcouru 400 kilomètres en neuf jours, avec des haltes pour découvrir neuf paroisses différentes. Le prélat d’origine italienne était accompagné de nombreux jeunes de son diocèse pour accomplir ce pèlerinage. Du clergé local, celui-ci souligne « une Eglise sans grandes structures ni institutions, mais vraiment proche du peuple ».
Une « tragédie humanitaire »
Lors de sa rencontre avec les évêques, les prêtres, les diacres, les religieuses et les séminaristes Sud-Soudanais, le pape les a exhortés à la docilité. Prenant appui sur l’histoire de Moïse, il a insisté sur l’importance de l’intercession, qui signifie « descendre pour se mettre au milieu du peuple, pour ‘devenir des ponts’ qui le relient à Dieu ». Et d’ajouter : « Notre premier devoir n’est pas d’être une Eglise parfaitement organisée, mais une Eglise qui, au nom du Christ, se tient au milieu de la vie souffrante du peuple et se salit les mains pour les gens ».
A l’écoute des personnes vivant dans des camps, le pape a déploré une nouvelle fois : « dans ce pays martyrisé, être déplacé ou réfugié est devenu une expérience habituelle et collective », tout en rappelant combien il est nécessaire « de se mélanger, de former un seul peuple à travers les défis de l’intégration, y compris en apprenant les langues parlées dans tout le pays, et pas seulement dans sa propre ethnie ». S’il a lancé un appel à la communauté internationale pour un soutien à la population locale, François n’en a pas pour autant oublié de recommander une « croissance plus autonome », notamment dans les domaines de l’agriculture et de l’élevage.
Et de citer en exemple Joséphine Bakhita, la sainte « qui a transformé en espérance la souffrance endurée ». Une manière de mettre en valeur le rôle des femmes dans ce pays malmené.
A. T.
Pour en savoir plus sur le séjour du pape en République démocratique du Congo.