Commentaire d’évangile – Père Philippe Robert, sj : “Le premier mot”


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Commentaire d’évangile – Père Philippe Robert, sj : “Le premier mot”
Par Angèle Mamuza
Publié le
3 min

En ce 4e dimanche du Temps Ordinaire A, dans son commentaire, le père Philippe Robert demande: "Comment mieux suggérer que Jésus est le Maître du Bonheur?"... Voyez ce qu'il répond.

Impossible d’y voir un simple fruit du hasard. C’est plutôt une occasion savoureuse d’expérimenter l’inspiration des Ecritures: le tout premier mot prononcé par Jésus dans le tout premier évangile est: "Heureux". Comment mieux suggérer que Jésus est le Maître du Bonheur? Telle est la Bonne Nouvelle qu’annonce le jeune rabbi de Nazareth: le chemin du Bonheur est ouvert – dit autrement: "le Royaume des Cieux est déjà parmi vous". Plus tard, les récits évangéliques nous en diront davantage: qu’il est cette Bonne Nouvelle, qu’il est lui-même ce chemin. Pour le moment, Matthieu nous le montre inaugurant sa vie publique par un long discours sur la montagne. On nous dit sobrement que, sur cette montagne, Jésus s’est assis, bientôt entouré de ses disciples, mais c’est la posture traditionnelle du guide spirituel qui a toute autorité pour enseigner une sagesse, un art de vivre. De la Grèce à la Chine, l’Antiquité est riche de tels maîtres qui invitent à tirer de leur enseignement des préceptes de vie, qui introduisent à la voie du bonheur. Comme certains d’entre eux, Jésus déconcerte, avec son éloge de ce que les sociétés humaines hésitent à valoriser: la douceur, la soif de justice... Il devient même scandaleux, en osant déclarer heureux des pans de vie proches de ce qu’on lie spontanément à l’épreuve du malheur: les pleurs, la persécution, l’insulte, etc.

Entrons dans la scène, mêlons-nous à ceux qui écoutent Jésus enseigner ce jour-là. En présence d’un homme qui trace les contours d’une vie pleinement heureuse, une exigence s’impose à mon intelligence comme à mon cœur, celle de m’interroger: est-il crédible? Me paraît-il jouir du bonheur qu’il annonce? Ecouter Jésus proclamer les Béatitudes m’enjoint de regarder comment en lui-même elles se déploient. Dans ses rencontres avec les foules, avec les puissants du pays, avec les exclus de son peuple, face aux contradicteurs, aux violents, quels fruits de paix, de liberté, de joie? Rayonne-t-il de la lumière qu’il prétend apporter? Bonne et belle chose, vraiment, que d’entendre "Heureux" au tout début des Evangiles; c’est comme une clef de lecture qui m’est offerte. Tout au long des événements qui me sont racontés par la suite, je vais pouvoir prendre Jésus au mot. Guetter les moments où il est pleinement l’homme des Béatitudes, en qui jaillissent, dans une paradoxale fraternité, l’âpreté de l’épreuve et le mystère de la joie.

Guetter aussi, comme on guette l’aurore, à travers ceux et celles qui forment désormais son Corps. Car au long des siècles, le bonheur vécu et promis par Jésus trouve à s’épanouir dans l’existence de ses disciples. Pour la plus grande déroute de mes certitudes en matière de bonheur et de malheur, je suis témoin de la joie du persécuté, de la fécondité des larmes, ma route croise celle des cœurs purs, des artisans de paix… Que ces hommes, ces femmes m’aident à faire du premier mot de Jésus le maître-mot de ma vie!

Père Philippe ROBERT, sj

Catégorie : L'actu

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