L’Ecole des sciences philosophiques et religieuses est une institution au sein de l’université bruxelloise. Cette année, elle propose un cycle orienté sur la façon dont certains philosophes ont pu développer une réflexion sur Dieu. Jean Ladrière est au programme de la première conférence.

« Penser (à) Dieu n’a jamais été, et n’est pas aujourd’hui, la chasse gardée des théologiens, ni des ‘croyants' », pose d’emblée Guillaume de Stexhe, professeur émérite de philosophie et engagé dans l’organisation du cycle, « c’est un souci constant des philosophes ». Aristote, Descartes, Kant n’ont-ils pas, chacun à sa façon, creusé cette question? Au 19e siècle, même Marx ou Freud n’abandonnent pas l’idée de Dieu, la plaçant plutôt au coeur des illusions qui égarent l’expérience humaine. « Et c’est avec tout cet héritage qu’au XX° siècle, nombre de philosophes majeurs – de Bergson à Lévinas, en passant par Whitehead ou Ricoeur, jusqu’à Bruno Latour qui vient de nous quitter, continuent à penser, chacun à sa façon, ce qui, dans la structure même de l’expérience humaine, peut faire signe vers l’énigme qu’évoque le mot « Dieu » – aussi multiples, ambigues, ou même incompatibles, que soient ses significations.
Ce mardi 18 octobre, à 17h, le professeur Paulo Rodrigues (doyen de la Faculté de Théologie de l’Université de Lille) inaugurera le cycle par un cours intitulé « Dieu chez Jean Ladrière ». Une deuxième leçon sera donnée le 25 octobre (inscriptions ici). En février, c’est la figure d’Emmanuel Lévinas qui sera à l’honneur. Et en mars, Jean-Luc Marion développera lui-même sa propre pensée (voir le programme complet ici).
A la suite de Soeur Emmanuelle!

L’Ecole des Sciences philosophiques et religieuses de St Louis perpétue là une bien belle tradition. N’est-ce pas là qu’une certaine Madeleine Cinquin (future soeur Emmanuelle) suivit des cours dans les années 1920, avant de s’engager dans la vie religieuse? Près d’un siècle plus tard, l’Ecole demeure. Guillaume de Stexhe nous en explique le projet: « L’idée reste de mettre à profit les ressources d’un milieu universitaire pour donner à un large public l’occasion de participer librement à « la vie des idées », dans le champ philosophique et dans celui de l’intelligence de la foi chrétienne – et, plus généralement, de la réalité religieuse ; et de l’entraîner à penser, sur ces deux plans, à la fois de façon critique et rigoureuse, et au plus près des enjeux concrets et actuels de notre vie commune. »
Foi et raison seraient-elles des choses distinctes? Certainement pas! « Nous voulons refuser la paresse d’un partage des territoires qui séparerait, d’un côté, le travail de la pensée critique, de la philosophie et des sciences humaines, et de l’autre l’engagement de foi et les « traditions religieuses » vivantes », reprend le professeur émérite. Qui s’en explique: « A l’inverse de ce cloisonnement, le travail sans cesse relancé auquel invitent les activités de l’Ecole tâche de croiser la rationalité et la foi, cherche les résonances – et les dissonances – entre le philosophique et le religieux , entre la rationalité réglée par l’universel et, en christianisme, la singularité d’une histoire et d’un engagement de salut. Le pari sur le croisement fécond entre ces deux registres, d’abord reconnus dans leur différence, est un geste caractéristique de la tradition catholique« .