En ce 2e dimanche de Carême, l'abbé Pascal Roger nous partage son commentaire de l'évangile selon saint Luc "Pendant qu'il priait, l'aspect de son visage devint autre" (Lc 9, 28b-36).
Depuis quelques semaines, les mesures sanitaires ont été assouplies. Les occasions de rencontre se multiplient et les jeunes peuvent de nouveau fréquenter les soirées qu’ils apprécient. Ce jour-là, Diego se prépare à rejoindre ses copains. Ils vont passer une "nuit d’enfer", dit-il. Dans les jours qui suivent, ses parents et ses proches s’étonnent de l’attitude de Diego. Ils ne le reconnaissent plus car il est véritablement rayonnant. Ils en connaîtront vite la cause. En soirée, Diego a rencontré une jeune fille et il est amoureux. Tous affirment qu’il est véritablement transfiguré.
Dans le langage commun, "transfiguré" signifie un changement radical. Pour Diego, sa vie est profondément bouleversée. Il est habité d’un bonheur qu’il n’avait jamais connu jusque-là et qui transparaît sur son visage. Cette fois, c’est l’amour véritable qui habite le cœur du jeune homme; un amour qui dépasse les flirts d’un soir et les aspects futiles de l’existence. D’une telle expérience, on ne sort pas indemne. On mesure alors que notre vie ne peut se satisfaire de plaisirs faciles et de superficialités. Il y a en chaque être un désir plus profond, plus radical que seul l’amour véritable peut rencontrer.
Telle est bien l’expérience de Jésus révélée au baptême et confirmée sur la montagne: l’expérience de l’amour infini du Père pour son fils. Cet amour, Jésus ne cesse de le goûter dans l’intimité de la prière, dans le cœur à cœur avec son Père dont nous parle si souvent le troisième évangile. Leur proximité est telle qu’elle rayonne sur le visage de Jésus. Cet amour est si puissant qu’il transfigure son apparence.
Ne croyons pas que cette relation est exclusive. Bien au contraire, elle est largement ouverte sur l’humanité tout entière. En Jésus, nous sommes appelés, nous aussi, à entrer dans l’intimité du Père pour devenir, à notre tour, ses fils et filles de prédilection. Le rayonnement qui émane de Jésus sur la montagne l’atteste car il bouleverse les témoins. Vraiment, cet amour est destiné à tous.
De la montagne à la plaine, nous retrouvons dans ce récit le rythme de la vie évangélique. D’abord, l’importance capitale de la prière dans la vie du fils et de la fille qui se tient dans l’intimité du Père. Touché au cœur, il/elle le laisse transfigurer sa vie, la renouveler par sa grâce et l’abreuver de sa tendresse. Mais de la montagne, il faut aller dans la plaine pour rayonner de Dieu au cœur du quotidien et partager généreusement ce qui a été reçu gracieusement. La mission du chrétien, enracinée dans la relation filiale avec le Père, fait découvrir à toute personne rencontrée sa dignité extraordinaire: elle aussi est aimée de Dieu.
Quel bonheur si, au terme de ce carême, au petit matin de Pâques, on pouvait dire de nous: "Vraiment ils sont transfigurés et rayonnants."
Abbé Pascal Roger