Avec Worth (A quel prix), le cinéma revient sur les attentats qui ont frappé les Etats-Unis en 2001, mais sous un angle original: la mise en place du fonds d’indemnisation des proches des victimes.

Le 11 septembre 2001, des terroristes s’emparaient des commandes de quatre avions de ligne dont deux s’écrasaient sur les tours du World Trade Center à New York. Cette terrible catastrophe qui a fait près de 3.000 morts, a marqué à jamais les Etats-Unis et le reste du monde occidental. Cet attentat aura également eu un impact sur la vie de centaines de milliers de personnes, les proches des victimes ou celles estropiées à jamais. On a beaucoup parlé des conséquences à l’échelle géopolitique au cinéma, mais on a rarement abordé la question humaine. Le film Worth répare cette erreur.
Tout débute par cette affreuse journée, paradoxalement ensoleillée. Dans le train en route vers New York, l’avocat Kenneth Feinberg apprend comme tout le monde la nouvelle et n’en croit pas ses oreilles. Heureusement pour lui, il ne connaît aucune victime. Sa vie sera pourtant bouleversée à jamais par cet événement. Quelques semaines plus tard, Kenneth participe à une réunion avec les gros bonnets de l’administration américaine. Le but de cette rencontre est de désigner un avocat qui travaillera sur l’indemnisation des victimes. En d’autres termes, il s’agira pour cette personne de déterminer le prix des vies humaines volées lors de ce 11 septembre 2001. Une tâche ingrate, d’une grande difficulté à la fois émotionnelle et technique. Malgré tout, Kenneth se porte volontaire. Il accepte même de travailler bénévolement.
Commence alors pour lui un exigeant cheminement qui lui fera rencontrer les pères, mères, maris, épouses et enfants des victimes. Car pour pouvoir mettre une somme sur la tête des personnes décédées, il faut évaluer leur train de vie, ce que la société a perdu. Chaque cas est différent, chaque histoire est déchirante. Au départ assez froid et distant, Kenneth va peu à peu réaliser la portée historique de ce que lui et ses collaborateurs sont en train de mettre en place. Un tel fonds n’existait pas aux Etats-Unis avant les attentats du World Trade Center. Il faut donc tout créer.
La voix des proches
Worth nous fait donc le récit de la création de ce fonds. On suit pas à pas les déconvenues et les victoires de l’avocat, en écoutant avec lui les témoignages bouleversants des proches des victimes. De cette manière, le film donne un visage humain à la catastrophe. Assez didactique dans sa forme, il n’en oublie pas l’émotion en prenant le temps de développer plusieurs histoires de vie. Riches, pauvres, célibataires, mariés, tous ces gens ont vu leur existence brutalement arrêtée. Comment faire pour évaluer ce que ça vaut en termes financiers? Cette question cynique amène à découvrir les dessous de la Commission, le jeu des lobbyistes, les enjeux pour l’Etat. Grâce à la prestation tout en retenue de Michael Keaton (Birdman, Beetlejuice), on se laisse gagner par l’émotion sans être gêné par un excès de pathos. Ce subtil équilibre fait de Worth un film solide, un rien classique, mais tout à fait pertinent. Une belle façon de se souvenir des tragiques événements qui se sont déroulés il y a vingt ans déjà.
Elise LENAERTS