Force est de constater que ces temps confinés ont pu coïncider avec un certain repli sur soi. Ce n’est certainement pas étrange, et ce n’est pas forcément un mal. Individuellement, puisqu’on ne pouvait plus voir grand monde, on a été contraint de passer plus de temps avec… soi-même. Et on a tenté de prendre soin de ses besoins. Voire d’assurer sa survie. La même logique a prévalu au niveau des familles, des collectivités, des secteurs. Les restaurateurs se sont surtout préoccupés de la situation des restaurateurs. Les organisateurs de grands festivals ont essentiellement défendu le point de vue des organisateurs de grands festivals. Et lorsqu’on les a entendus, les représentants des enseignants ont surtout pris le parti des enseignants.
Les représentants des cultes n’ont pas tout à fait échappé au phénomène. Même s’ils ont régulièrement montré leur préoccupation pour l’ensemble des acteurs de la société, c’est la situation… des cultes qui les a le plus mobilisés. C’est pour annoncer, dénoncer ou détailler les « nouvelles mesures en vigueur » qu’on les a le plus souvent entendus.
Idem dans nos paroisses et communautés. Nous avons passé un temps fou à attendre les règles et à annoncer qu’on les attendait. Nous avons passé un temps dingue à tenter de nous y plier. A installer des gels, à créer des systèmes d’inscription et à nous demander si c’était une bonne idée, à bloquer des dates pour les confirmations, puis à confirmer le report des dates pour les confirmations. Tout cela nous a parfois rendus un peu « marteaux ».
Tout cela a pu aussi nous écarter d’un défi essentiel: celui de la mission. Au cours des derniers mois, nous avons tenté de prendre soin de nous, de nos communautés, de nos liens. Et c’est très bien. Mais un autre défi nous attend aujourd’hui. A l’heure de nous retrouver, il ne va pas seulement falloir identifier les présents et regretter les absents. Il faudra aussi penser aux autres – à tous les autres. Ceux qui n’étaient pas là avant, et qui ne sont toujours pas là. Ceux qui ne connaissent pas le Christ. Ceux qui ne sont jamais entrés dans une église. Ceux que l’Eglise ne parvient pas à toucher. Et qui constituent pourtant la grande majorité de la population. Alors que l’Esprit s’apprête à souffler puissamment, c’est à eux, aujourd’hui, que nous devons penser.
Vincent DELCORPS