Plus les racines sont profondément ancrées, plus la plante poussera haut et bien. Une nouvelle association s'est lancée autour de cette philosophie. La Rhizosphère – c'est le nom de cette association- fait appel aux bonnes volontés et aux dons pour soutenir d'autres projets en cours.
Prenons deux personnes : l'une hérite de ses parents un bout de terrain de 3 hectares ainsi que d'un vieux tracteur, l'autre veut se lancer comme maraîcher. Pour Jean-Marc, la première difficulté vient de l'acquisition d'un espace pour cultiver bio et du matériel nécessaire. Alors que la première personne, qui a hérité de cela, cherchera à le vendre pour obtenir de l'argent, les deux ne pourront faire affaire ensemble que si quelqu'un les met en contact. Cet exemple à la double facette est cité par Pierre Heldenbergh, l’administrateur délégué de l’asbl Rhizosphère. A travers cette association au nom légèrement mystérieux, lui et huit autres administrateurs aux profils variés veulent assurer le soutien des porteurs de projets.
Les hommes et les femmes qui se lancent dans l'activité entrepreneuriale ont besoin de puiser des ressources dans leur environnement. Il ne s'agit pas seulement de trésorerie, mais aussi d'une possible main d'œuvre concrète et ponctuelle ou de la disponibilité de compétences spécifiques. Cette aide humaine ou matérielle ne sera sans doute pas visible des clients de l'affaire quand l'entrepreneur se sera lancé, mais sans elle, le porteur de projets n'aurait pas eu la même énergie pour booster son affaire. Dans le milieu végétal, la rhizosphère désigne justement cette région sous la terre où les micro-organismes peuvent échanger et enrichir les êtres vivants qui y prennent racine.
Un remède contre l'isolement
“Avec la Rhizosphère au printemps, des projets prennent racine.” Sous ce slogan, les initiateurs de l'asbl Rhizosphère veulent attirer l'attention sur le microcosme humain nécessaire à la réussite d'une entreprise individuelle. Pierre Heldenbergh reconnaît qu'en amont : "les agences conseils épaulent ceux qui ont des idées, pour la phase d'étude de marché, le plan business, etc. Puis le porteur de projets se retrouve seul pendant les premiers mois de son activité !" Par exemple, un jeune maraîcher "passera plus de temps derrière l'ordinateur que sur le terrain", ajoute notre interlocuteur de la Rhizosphère. Dans ces mois d'isolement, un coup de main ponctuel pour la comptabilité et la TVA par exemple soulagerait le maraîcher qui pourra se focaliser sur d'autres parties plus passionnantes de son travail.
L'idée que la Rhizosphère voudrait développer d'ici l'été prochain prendrait la forme d'une datasphère, une sorte de carnet d'adresses informatique où chaque porteur de projets recenserait les ressources disponibles dans son entourage. Sa "communauté" se compose des personnes qui peuvent le soutenir financièrement, mais aussi ceux qui auraient du temps pour l'aider, et des compétences à lui apporter. Les neuf administrateurs de la Rhizosphère ont un tel carnet d'adresses qu'ils ont déjà pu apporter une aide précieuse à quelques projets. La mise en association permet justement de mutualiser les efforts et les connaissances pour que des jeunes (et moins jeunes) puissent se faire à leur tour un réseau. Pierre Heldenbergh raconte notamment le premier projet qui a donné l'idée de la Rhizosphère : "Un collectif citoyen voulait sauver l'un des derniers terrains à bâtir de leur quartier pour éviter qu'il ne devienne un immeuble, mais plutôt y installer un jardin collectif." De fil en aiguille, ces citoyens ont eu recours à une coopérative immobilière, puis ils ont procédé à une levée de fonds en urgence, pour pouvoir acquérir le terrain lors d'une enchère publique. Ces différentes démarches en l'espace de quelques semaines ont sollicité les connaissances des uns et les relations des autres. "Cela a permis de créer une dynamique d'animation, bien au-delà des limites du quartier", soulève Pierre Heldenbergh.
Trouver du sens
Il faut attendre quelques mois pour observer la floraison des projets, tels qu'ils auront été enrichis par le soutien de la Rhizosphère. 15 projets étaient dès l'origine accompagnés par l'association, dix autres demandes se sont ajoutées depuis que la Rhizosphère a commencé sa campagne de communication. Le contexte économique contribue à cette floraison, même si "malheureusement beaucoup d'activités ferment et demandent à être reprises". La crise sanitaire a aussi donné du temps à chacun de réfléchir à ce qui faisait du sens dans sa vie tant professionnelle que personnelle. Des voisins qui donnent un coup de main pour conduire, d'autres qui aident à rédiger un texte, d'autres encore qui partagent leurs compétences sur l'ordinateur, ce réseau humain fait la beauté de nos communautés. C'est là le terreau sur lequel certains vont pouvoir faire pousser leurs projets professionnels.
AF de Beaudrap