Dans la grande tradition des sondages religieux, Olivier Servais a présenté avec Justine Vleminckx, doctorante de l’UCLouvain, les principaux résultats d’une enquête sur les valeurs et la quête de sens. Les réponses divergent selon l’âge des personnes interrogées.
Nouveau tableau des questions de sens chez les Belges francophones. Le magazine l’Appel a fait réaliser un sondage par la société Sonecom auprès d’un échantillon représentatif de 650 Belges francophones de plus de 16 ans. Précision importante : l’enquête conçue et supervisée par Olivier Servais (UCL) a été réalisée courant 2019, en amont de la crise du Covid19. Il sera intéressant et instructif de voir si les résultats auront évolué après que les épreuves de la maladie, du deuil mais aussi de la solidarité au sein de nos sociétés aient été imposés.
De quelle religion ou de quel courant philosophique les Belges interrogés se revendiquent-ils ?
46% d’entre eux se déclarent de l’une ou l’autre branche du christianisme (catholicisme très majoritairement, mais aussi quelques pourcentages de protestants et orthodoxes). A cette question, 35% se déclarent athées ou agnostiques. Plus bas dans le tableau, on constate que les répondants ont souffert de quelques imprécisions dans leurs identités confessionnelles, certains indiquent « islam plus une autre religion » par exemple. A part les trois premières réponses qui rassemblent le plus grand pourcentage, les autres identités religieuses se partagent moins de 3% des déclarations de ce sondage.
Les statistiques ont ensuite été différenciées en fonction de l’âge du répondant. Les 65 ans et plus se sont majoritairement déclarés catholiques (56%) et seulement 27% athées et agnostiques. A l’inverse, chez les moins de 25 ans, c’est le courant de l’athéisme ou de l’agnosticisme qui obtient le plus de réponses (52%), suivi des musulmans (14%)°; Les catholiques viennent bien après, avec seulement 11% des répondants de moins de 25 ans.
La prise de distance par rapport à la pratique religieuse se confirme dans la suite du sondage. A 77% les Belges interrogés déclarent ne pas appartenir à une communauté religieuse ou spirituelle. Puis, en détaillant les 23% de pratiquants, une personne interrogée sur 10 participe à la vie religieuse une fois par semaine au moins, 4% seulement aux occasions particulières, autant n’y vont qu’une fois par mois…
Sur quels sujets les Belges s’interrogent-ils en matière religieuse et philosophique ?
Parmi les principales réponses, les personnes interrogés posent la question de la vie après la mort, mais aussi de « ma propre nature intérieure ». La place de l’humain dans un monde en transformation est cité en troisième lieu, tout autant que « le destin et le devenir des humains » ou encore « la place de l’humain dans l’ordre de la nature ». Ces questions sont principalement soulevées lorsqu’un évènement dramatique survient pour un proche (décès, accident ou maladie). Comme l’analyse le magazine l’Appel qui commandait ce sondage, « les drames (et les bonheurs) qui nous touchent de près incitent toutes les catégories d’âges à se poser des questions de sens. »
Les Belges ont ensuite été interrogés sur les valeurs les plus importantes à leurs yeux. L’amour a presque toujours été cité, de même que la liberté, suivi un peu plus tard de la justice ou de la fraternité. Les valeurs plus religieuses comme la foi, la spiritualité n’arrivent qu’en bas de liste. Sur cette question, les tranches d’âges n’ont pas la même sensibilité: les moins de 25 ans placent la liberté en première position, alors que tous les répondants des âges supérieurs répondent l’amour en premier.
Le sondage portait ensuite sur ce qui est plus ou moins important dans la vie quotidienne. Les réponses sont tiraillées entre l’envie de « vivre en harmonie avec soi-même » d’un côté et la volonté d’ « être au service des autres ». Être à l’écoute de son corps et de ses besoins, puis s’ouvrir et se relier aux autres sont les réponses citées ensuite. Intériorité et altruisme se succèdent, et se complètent selon ce sondage.
Comment cette quête spirituelle se traduit-elle chez les Belges interrogés ?
Les motifs pour lesquels les répondants s’engagent dans cette recherche spirituelle sont très différents: à 23%, il s’agit de trouver la paix intérieure; à 21% d’œuvrer à un monde meilleur, à 12% d’éprouver des sensation de plénitude et de bien-être… Cette quête passe par des temps de silence, ainsi que par la prière ou la méditation. 31% des répondants disent prier tous les jours (38% ne prient jamais). A l’inverse le geste d’allumer une bougie ne correspond plus à une pratique « religieuse » habituelle, puisque 54% des répondants disent ne jamais allumer une bougie ni faire brûler de l’encens, 13% le font occasionnellement, et seulement 5% tous les jours.
Quand les personnes interrogées veulent s’entretenir de questions spirituelles, elles se tournent d’abord vers leurs familles ou leurs amis. Les conseillers spirituels (prêtre, imam, rabbin…) n’arrivent qu’en quatrième place.
En conclusion, le professeur Olivier Servais relève que « la mobilité religieuse est devenue une pratique intégrée chez nos contemporains ». Les Belges interrogés sont moins fidèles à leurs religions d’origines, cela se vérifie notamment chez les moins de 25 ans.
AF de B.