Mgr Éric de Moulins-Beaufort, président de la CEF, s'est exprimé au sortir d’une audience avec le pape François. Revenant sur la liberté d’expression, le pontife a rappelé qu’on ne pouvait en faire usage pour "humilier" des personnes.
Une fois par an, le président de la Conférence épiscopale de France et ses deux vice-présidents se rendent à Rome pour échanger avec le pape. Mgr de Moulins-Beaufort était accompagné de Mgr Olivier Leborgne et Mgr Dominique Blanchet ainsi que du secrétaire général, le Père Hugues de Woillemont.
"Le Saint-Père a montré son intérêt sur les questions de laïcité et des caricatures", explique à I.MEDIA Mgr de Moulins-Beaufort. Durant l’audience qui a duré une heure, le pape François est revenu sur le long échange qu’il a eu le 30 octobre dernier avec le président Emmanuel Macron au lendemain de l’assassinat de trois personnes dans la basilique Notre-Dame de l’Assomption de Nice. La mémoire des victimes a été évoquée, tout comme celle de Samuel Paty, enseignant décapité pour avoir montré des caricatures du prophète par Charlie Hebdo. "Sur la liberté d’expression, le pape a expliqué qu’on ne pouvait pas humilier des personnes", rapporte l’archevêque de Reims.
Loi sur le séparatisme musulman
"Nous avons parlé de la loi sur le séparatisme [qui vise à lutter contre l’islam radical en France, NDLR] , de sa légitimité et puis des inquiétudes qu’elle peut susciter ; notamment celles qui concernent le contrôle de la parole, sans doute nécessaire… Mais qui pourrait aussi tourner vers une police de la pensée", détaille l’archevêque français.
Le pape François a par ailleurs insisté sur le fait qu’un État devait être laïc, c’est à dire "non-confessionnel dans le sens qu’un État ne devrait pas promouvoir une religion plutôt qu’une autre", développe Mgr de Moulins-Beaufort. Durant les échanges, d’autres modèles que celui de la laïcité à la française ont été évoqués. Le cas de l’Italie a alors été mis en avant. "Dans ce pays, il y a des discussions avec chaque culte, chaque confession et non pas une discussion collective où chacun est obligé de s’aligner sur le même fonctionnement indépendamment des particularités", souligne-t-il.
Les évêques français ont profité de ce moment avec le pontife pour revenir sur leur bras de fer avec le gouvernement français au sujet de la limitation du nombre de personnes pouvant assister à la messe en raison de la crise sanitaire. "Le pape était content d’avoir des explications de première main sur nos relations avec le gouvernement, la teneur de nos discussions, notre recours devant le Conseil d’État", confie l’archevêque.
Un voyage en France très hypothétique
D’autres sujets tels que la nouvelle Ratio concernant les séminaires, l’écologie ou les abus ont été abordés. Ce temps avec l’évêque de Rome a également permis aux prélats français de renouveler l’invitation pour un voyage du pape en France. "Il ne nous a pas encore donné la date !", sourit Mgr de Moulins-Beaufort, qui rappelle que, l’an passé, le pape François leur avait précisé qu’il visitait d’abord les petits pays. "Il a quand même accepté qu’on lui en reparle", souligne le prélat.