L’année 2020, une année à marquer d’une pierre noire? Inédite en tout cas, à cause de la pandémie du coronavirus. Le monde entier a été touché, toutes les couches sociales et l’Eglise aussi, bien sûr. Rétrospective non exhaustive d’une année jalonnée de mises à distance, d’incertitudes mais aussi d’espérance.
En se répandant dans tous les pays, la Covid-19 a fait vaciller bien des certitudes et des habitudes. Mesures de précaution sanitaire par excellence, la distanciation et le confinement ont été de mise dès le mois de mars. Fin décembre, le mot de l’année plébiscité par les néerlandophones a été « knuffelcontact », parce que cela fait plus de 9 mois que l’on ne peut plus s’embrasser ni se serrer dans les bras (knuffelen).
Janvier et février sont déjà sous tension face à l’extension de l’épidémie mais la vie suit cependant (encore) son cours normal. Dans le monde ecclésial belge, un événement à marquer d’une pierre blanche est, le 23 février, l’ordination épiscopale de Lode Van Hecke. Il devient le successeur de l’évêque de Gand , Luc Van Looy âgé de 78 ans. Depuis 2007, Lode-le-flamand était devenu Gaumais et surtout père abbé de l’abbaye d’Orval. Il est le tout premier abbé trappiste à rejoindre l’épiscopat belge.
Le coronavirus n’occupe pas encore toute l’actualité. Le 12 février, paraît l’exhortation apostolique Querida Amazonia du pape François. Son objectif principal est de soutenir une région durement touchée par l’exploitation commerciale et la pauvreté.
Les jours passent dans une inquiétude de plus en plus palpable. Début mars, dès l’apparition des premiers cas de Covid-19 en Belgique, les évêques prennent les choses en main. Avant même les premières décisions prises par le gouvernement de Sophie Wilmès, ils invitent à adopter des mesures de prévention. Alors que le Carême débute, beaucoup de chrétiens comprennent que le jeûne aura un goût particulier cette année: ils se retrouvent privés de messes dès le 14 mars jusqu’au 3 avril. Si les chrétiens ne peuvent plus se rendre dans les églises, ce sont les églises qui entrent dans les maisons par la magie des ondes. Il se tisse en effet un vaste réseau de solidarité collaborative entre les médias.
Adaptation
Chacun se nourrit encore de l’espoir de célébrer tous ensemble la messe de Pâques, la fête de l’espérance et du renouveau. Las! Elle doit se faire en mode confiné. Même le pape célèbre quasi seul la messe et prononce sa bénédiction Urbi et Orbi devant une place Saint Pierre vide. Seule la pluie est présente, et heureusement aussi les caméras de télévision.
Mais les Conseils nationaux de sécurité tenus par le gouvernement et les experts se suivent et se ressemblent, tenant tous les Belges en haleine. Au fil des mois, les évêques veillent au bon équilibre entre respect des mesures qui évoluent sans cesse et possibilité de célébrations. Très vite, les paroisses et les associations font preuve d’une impressionnante solidarité en mettant en place des réseaux d’aide. Internet permet de rester partiellement en contact. Toujours est-il que la pandémie bouleverse la vie de l’Eglise. C’est pourquoi, fin septembre, Mgr Delville et Mgr van Hecke invitent les chrétiens à répondre à une enquête en ligne sur l’impact du coronavirus dans leur vie. En novembre, ils remercient tous ceux qui y ont répondu – croyants individuels, congrégations, équipes paroissiales, fabriques d’églises, mouvements, ASBL, groupes de prière, groupes de jeunes et tant d’autres. Les résultats de cette enquête donnent un éclairage sur les atouts, faiblesses, opportunités et menaces auxquels font face les chrétiens.
Autres crises et questionnements
Entretemps, dans le monde, l’Eglise est secouée par des « affaires » qui interpellent ou continuent d’interpeller. La révélation, le 22 février, des abus sexuels commis par Jean Vanier, le fondateur de l’Arche, décédé en 2019, est un coup de tonnerre dans le monde catholique. Lui qui a lutté toute sa vie pour l’intégration des personnes porteuses d’handicap mental dans la société bénéficiait chez beaucoup d’une très haute estime. Par ailleurs, le 6 mars, le pape François accepte la démission du cardinal Philippe Barbarin, ancien archevêque de Lyon, qui avait été relaxé, fin janvier, du délit de non-dénonciation d’abus sexuels. L’affaire a durement écorné l’image de l’Eglise catholique en France. Le 7 avril, la justice australienne tranche elle aussi en faveur du cardinal australien George Pell qui est acquitté des accusations d’abus sexuels sur mineurs. Une fois de plus, nombreux sont ceux qui estiment que ces procès ont jeté un discrédit sur la haute hiérarchie de l’Eglise. Début octobre, une autre figure vénérée de l’Eglise voit son aura s’assombrir: un livre accuse Marthe Robin, co-fondatrice des Foyers de Charité, de « fraude mystique ». Un doute qui vient s’ajouter à la mise en cause du Père Georges Finet, co-fondateur des Foyers. Un audit externe publié en mai accusait ce dernier d’abus sexuels sur des filles mineures. Le Vatican affiche sa volonté de transparence face aux scandales en publiant, le 10 novembre, le « Rapport McCarrick ». Ce document décrit comment l’ex-cardinal a pu s’adonner à ses agissements pédophiles sans être inquiété. Cela suscite de vives interrogations sur les mécanismes de contrôle à l’intérieur de l’Eglise.
En automne, un autre type de scandale – financier cette fois – fait la une de l’actualité au Vatican. Il concerne l’un des plus hauts dignitaires de l’Eglise, le cardinal Angelo Becciu. Le 24 septembre, celui-ci quitte son poste de chef du bureau chargé de superviser les causes des saints et renonce aux droits liés au cardinalat. L’affaire n’est toujours pas conclue.
Certains, et surtout certaines, auraient souhaité que les remises en question concernent aussi la place des femmes dans l’Eglise. Ainsi, le 25 mai, la théologienne française Anne Soupa pose sa candidature comme archevêque de Lyon, poste laissé vacant par le cardinal Barbarin. Elle désire ainsi attirer l’attention sur la place ‘mineure’ réservée à la femme dans l’Eglise. Mgr Olivier de Germay, jusque-là évêque d’Ajaccio, est toutefois nommé le 22 octobre archevêque de Lyon. Le collectif Toutes Apôtres!, qui a soutenu la candidature d’Anne Soupa, exprime « son immense déception ».
Maladie et confinement
L’Eglise de Belgique, quant à elle, connaît des heurts et malheurs liés à la maladie; comme ailleurs bien sûr. Des prêtres – souvent restés en première ligne pour accompagner les malades et les mourants – décèdent du coronavirus. Mgr Warin est lui-même touché mais s’en sort. Le 14 avril, l’archevêque de Malines, le cardinal Jozef de Kesel, doit interrompre l’exercice de ses fonctions pour raisons de santé. Prenant le temps de se soigner et d’entamer une revalidation, il réussit heureusement à rejoindre les évêques pour le message de Noël.
En Belgique, la situation sanitaire s’améliore peu à peu au cours du printemps. Les offices religieux sont à nouveau autorisés à partir du 8 juin. Des mesures sanitaires strictes sont toutefois mises en place. Malgré un été relativement déconfiné, le grand pèlerinage de Lourdes n’a pas lieu fin août. Seule une petite délégation menée par le Père Charles Delhez se rend dans la ville mariale qui semble endormie. Pas de chants mariaux ni de groupes joyeux d’aidants poussant les malades jusqu’aux bains ou à la grotte. C’est le reflet de la situation que vivent les personnes handicapées qui sont particulièrement malmenées et démunies face à cette crise, en témoigne une opinion d’une lectrice et maman de deux enfants handicapés .
L’automne arrive. Le coronavirus n’a pas fini de faire parler de lui. En particulier les effets des déplacements vacanciers et le retour des étudiants sur les bancs de l’université font craindre un second confinement. Le mois d’octobre est celui des incertitudes quant aux mesures qui seront prises. Les cérémonies de mariage, de baptême et d’enterrement s’adaptent en fonction des décisions du Conseil national de Sécurité. Les évêques se préparent au pire (fermeture des églises) mais aussi à argumenter pour un maintien raisonnable. Tous les cultes sont concernés. Divers rebondissements font espérer une ouverture des églises à plus de monde mais, à la veille de Noël, le couperet tombe: le conseil d’Etat maintient la limite de 15 personnes à la messe.
Au vu de la situation qui se dégrade par rapport aux taux de contaminations et d’hospitalisations, les chrétiens sont appelés à manifester cette fraternité et la solidarité en respectant un protocole strict dans les églises. Le 2 novembre, les évêques rappellent encore et toujours qu’il faut rester raisonnable. L’Avent aura aussi un goût de Carême et de jeûne eucharistique…
Espérance
La détresse face à ce petit virus a montré que les hommes sont tous égaux devant la maladie. Mais le 4 octobre, le pape François rappelle qu’ils sont tous frères, en publiant sa nouvelle encyclique Fratelli tutti, sur la fraternité humaine. Le texte est salué pour l’accent qu’il met sur la solidarité dans ces heures difficiles pour l’humanité.
En Belgique, l’espérance refait surface quand, après des mois d’un gouvernement en affaires courantes, une coalition se forme enfin pour mettre en place un gouvernement de plein exercice. Sophie Wilmès, la première femme ‘Première ministre’ cède le flambeau à Alexander De Croo. Ironie de l’histoire, celle qui a géré pendant plusieurs mois la crise de la Covid-19 se retrouve hospitalisée à cause du virus.
Au mois de novembre, le monde entier retient son souffle lors de l’élection présidentielle aux Etats-Unis. A l’image de cette année si particulière, l’incertitude a régné quelques jours quant au vainqueur. Joe Biden est finalement appelé à prêter serment le 20 janvier prochain et à devenir le second président catholique de l’histoire de son pays.
Au même moment, la radio 1RCF fête son premier anniversaire. Tout comme la rédaction de Cathobel, les journalistes n’ont pas hésité à adapter leurs missions pour être au plus près des réalités et des besoins des auditeurs.
L’espoir se profile aussi pour l’année qui vient avec l’annonce, le 7 décembre, d’un voyage du pape François en Irak, en mars 2021. Le premier voyage du pontife depuis l’apparition du coronavirus aura notamment pour objectif d’encourager les chrétiens du pays, durement meurtris par des années de guerre et décimés par l’émigration.
Au terme de cette année, un constat: les familles se sont retrouvées grâce – ou à cause – du confinement. Comme l’a annoncé ce 28 décembre, le pape François, elles seront l’objet de toutes les attentions de l’Eglise qui leur dédie l’année 2021, sous la bienveillance de Saint Joseph.
Pour clore cette rétrospective de l’année 2020, l’espérance est de mise. Et ce malgré les bouleversements vécus au sein même de l’équipe de Dimanche et de Cathobel. En effet, le 6 novembre dernier, Jean-Jacques Durré, notre rédacteur en chef décède inopinément. Il n’y avait pas que ses collègues qui l’appréciaient, en témoignent les hommages et intentions de prières adressées à Cathobel.
Jean-Jacques faisait partie de ceux que l’on appelle les « bons vivants ». Jovial, nous l’avons toujours connu avec le sourire même lorsqu’il traversait une période difficile. Nous nous souviendrons aussi de sa gentillesse, mot souvent galvaudé mais auquel il a donné ses lettres de noblesse. Nous pourrions encore ajouter sa générosité, son empathie, sa gratitude…
Mais c’est avec son espérance que nous conclurons ici. Elle était sa boussole. Il nous la lègue en héritage.
Puisse cette espérance guider chacun et chacune pour l’année 2021. C’est pourquoi la rédaction de Cathobel vous souhaite une année bonne et d’animer ou de raviver de nombreuses flammes d’espérance et de joie.
Nancy Goethals (avec la rédaction de Cathobel et Cath.ch)