La clé reliquaire de saint Hubert est l'une des pièces majeures conservées au Trésor de la Cathédrale de Liège. Grâce aux technologies de pointe, le chef d'œuvre d'art mosan a désormais une jumelle parfaitement identique. Explications.
Partenaire du programme e.thesaurus*, le Trésor de la Cathédrale entend bénéficier des techniques de pointe (hologramme, scanning, impression 3D) pour explorer des œuvres difficiles à manipuler en raison de leur fragilité et de leur valeur patrimoniale. Ainsi, en partenariat avec le Pôle Numérique 3D de Liège, une reproduction de la clé de saint Hubert vient d'être réalisée en impression 3D. Comme ce joyau du patrimoine mosan est classé, une double autorisation a dû être obtenue auprès de la Fédération Wallonie-Bruxelles et de l’évêque du diocèse, Mgr Jean-Pierre Delville, seul compétent canoniquement pour autoriser la sortie et/ou l’ouverture d’une relique.
Prouesse technique
Depuis plusieurs années, DO Design, société de design industriel, dessin 3D et scanning dans le secteur de l’automobile, a (ré)orienté ses activités dans le domaine de la culture et du patrimoine. A son actif, une copie d’un pinacle de pierre de la Grand-Poste à Liège, un plan de la ville de Liège en 3D ou encore la statue de Toutankhamon qui a trôné pendant plusieurs mois sur le quai n°1 de la Gare des Guillemins, à Liège.
Leur dernière réalisation est cette modélisation de la clé de saint Hubert, conservée au Trésor de la Cathédrale de Liège. Un patrimoine qui, jusqu’ici, résistait à la technologie et obligeait les spécialistes à repousser les limites de leurs compétences. DO Design (membre du Pôle Numérique 3D de Liège) est en fait parvenu à réduire les interférences dues à la surface brillante du laiton pour scanner la clé reliquaire, explique Olivier Defêche, fondateur et manager de DO Design. Aspérité, gravure, pièce creuse, autant d’éléments à prendre en compte pour parvenir à une copie fidèle à l’identique dans ses moindres détails, « le résultat est extraordinaire », d’après l’avis du directeur du Trésor, Julien Maquet.
Le procédé utilisé repose sur une combinaison entre photogrammétrie et des techniques propres à DO Design dont le secret restera bien gardé. Après une demi-journée de prise d’images, sans toucher la pièce, les équipes regroupées au sein du Pôle Numérique 3D de Liège ont travaillé pendant une semaine au traitement des données pour obtenir le fameux modèle 3D. Une première impression de l’objet en matière synthétique a été réalisée, la prochaine étape sera l’impression d’une copie en acier inoxydable.
Enrichir l'expérience muséale
Dans quel but me demanderez-vous ? « Ce modèle permettra de développer le versant marketing », explique Olivier Defêche, notamment par la production d’objets souvenirs miniatures. Mais, pour le directeur du Trésor, avant tout, « la réalisation 3D permettra d’enrichir nos animations pédagogiques en permettant aux visiteurs de découvrir autrement, physiquement ces pièces exceptionnelles ». Manipuler une copie constituera une activité sensorielle particulièrement intéressante pour le jeune public ou des personnes malvoyantes ou encore porteuses de handicap.
Pour une institution muséale comme le Trésor, l’avantage des techniques de pointe est aussi de pouvoir répondre aux exigences des organes prêteurs, ajoute le directeur. Ainsi le Trésor vient de se voir confier plusieurs pièces statuaires de grande valeur avec pour contrepartie la livraison de copies à replacer dans le site d’origine.
Le jeune directeur de DO Design, quant à lui, espère pouvoir bientôt "s’attaquer" au reliquaire de Charles le Téméraire, autre pièce majeure du patrimoine liégeois, conservée au Trésor.
Sophie DELHALLE
Illustrations: DO Design
*Le projet e.thesaurus a pour objet d’étude l’orfèvrerie septentrionale des XIIe-XIIIe siècles, avec un axe majeur consacré à la modélisation (3D) et à la restitution en réalité augmentée des objets, deux apports essentiels pour une meilleure compréhension des techniques d’assemblage et, associées aux analyses physico-‐chimiques, des techniques de fabrication des objets et de leurs matériaux. Les informations ainsi recueillies viendront nourrir une base de données, consultable en ligne. Par ailleurs, le projet permettra de mieux faire connaitre ces œuvres au grand public, par le biais d’expositions virtuelles, commentées sur les aspects historiques, artistiques et techniques de création.