Depuis plusieurs jours, le landerneau politique est agité par « l’affaire Chovanec » du nom de ce ressortissant slovaque décédé à l’aéroport de Charleroi, à la suite d’une interpellation policière musclée. L’enquête est en cours et des auditions ont lieu en commission conjointe de la Justice et de l’Intérieur à la Chambre. Espérons que cela puisse aboutir à faire toute la lumière sur ce triste épisode qui a coûté la vie à un être humain.
Indépendamment du fond de l’affaire, on assiste malheureusement à un regrettable spectacle quant à la reconnaissance des responsabilités. Si deux hauts fonctionnaires de police ont démissionné, il n’en est rien du côté de l’actuel chef de la police fédérale, qui a pourtant avoué avoir été averti de cet incident il y a deux ans, lorsqu’il occupait une fonction de relation entre la police et le cabinet de l’Intérieur. Même attitude chez l’ancien ministre de l’Intérieur, qui reconnaît néanmoins « avoir fait des erreurs de communication ». Devrait-il faire un pas de côté? A chacun de faire son opinion.
Ce dossier montre aussi la déliquescence de certaines mœurs politiques. L’ancien ministre a ainsi convoqué une conférence de presse le week-end dernier, avant son audition au Parlement, pour se justifier, court-circuitant ainsi la démocratie parlementaire. C’est inacceptable! Lorsqu’on détourne les règles de fonctionnement de l’Etat – qui auraient voulu que les députés aient la primeur des explications -, on porte un coup sérieux à la démocratie et aux institutions.
En 1998, le ministre de l’Intérieur de l’époque avait démissionné, estimant que sa responsabilité politique avait été engagée après que Semira Adamu, demandeuse d’asile nigériane, ait été étouffée, à l’aide d’un coussin, par deux policiers lors d’une tentative d’expulsion du territoire à l’aéroport de Zaventem.
Dans une société démocratique, il est vital que les populations aient foi dans les institutions et qu’elles les respectent. Fuir ses responsabilités ou les minimiser donne du grain à moudre aux théories du complot, a fortiori lorsqu’on est en charge de faire régner l’ordre et la justice. Il ne faut donc pas s’étonner de l’émergence des manifestations contre le pouvoir politique ou les médias accusés de mentir ou de cacher des vérités. Il n’y a pas de déshonneur à reconnaître sa faute. Mais il y en a quand on s’estime ni coupable ni responsable!
Jean-Jacques DURRÉ