Ne vous y trompez pas, les douze petits mois ne courent pas sur une année ! Ce sont, en réalité, les douze jours qui tiennent entre le 26 décembre et le 6 janvier. Marie Rouanet livre un journal intime aux observations intemporelles.
"Dans les campagnes où la météorologie était si importante on croyait que ces jours privilégiés des ténèbres annonçaient les temps du ciel pour toute l'année à venir." A ces préoccupations d'usage pour les semailles, Marie Rouanet préfère incliner vers le dépouillement et considérer ce temps propice à la relecture des mois ou des années passées, un temps qui invite au désencombrement des armoires et de l'âme. Douze jours durant, dans l'après Noël et le début de l'année nouvelle, l'écrivaine va délester ses placards de l'encombrant et alléger son cœur des oripeaux du superflu. "Ce qui a besoin d'un vestige pour être fixé et rappelé est sans importance. L'important, rien ne pourra le balayer."
Femme du terroir et profondément croyante, Marie Rouanet relit la vie ordinaire avec acuité et authenticité. La simplicité gagne les couches ordinaires de l'apparence, même le sentiment d'utilité se trouve évacué. Accueillir l'instant présent dans sa fragilité, le savourer… L'auteure occitane, originaire de Béziers, invite au détachement matériel pour tendre vers la grâce. Après les six jours de l'an neuf, restent "trois cent soixante bouchées. A chacune son goût, ses arrière-goûts, ses amertumes, son miel, sa nuit, ses demi-lumières". Publiés pour la première fois en 1998, ces textes n'ont pas pris une ride.
Angélique TASIAUX
Marie Rouanet, "Douze petits mois". Desclée de Brouwer, collection "Les carnets DDB", novembre 2019, 112 pages.