En milieu professionnel, on connaît bien le phénomène du burn-out. Mais l’épuisement peut aussi toucher les bénévoles. Quelle est l’ampleur du phénomène? Et surtout, comment éviter de basculer? Eléments de réponse.
Ils sont partout. Dans l’enseignement, le sport, la culture… Avec cœur, ils donnent et se donnent. Au nom de la justice et de la fraternité, ils se mettent au service des jeunes, des vieux, des réfugiés… Ils constituent un pilier de notre société. Mais le pilier est fragile. Car si les bénévoles s’engagent parfois sans compter, il peut leur arriver de s’oublier.
Commencer par une demi-journée L’ampleur du phénomène? Impossible de la quantifier: aucune étude ne s’est jamais penchée sur l’épuisement des bénévoles. « On sait que ce problème existe mais on pense qu’il est relativement rare », explique Emmeline Orban, secrétaire générale de la Plateforme francophone pour le volontariat. « Cela tient principalement au lien tissé avec l’organisation: bien plus qu’un travailleur, un volontaire peut décider de ne pas collaborer avec une organisation dans laquelle il ne se sent pas bien. Ou la quitter lorsque ça ne va plus. » Si le phénomène est donc plutôt rare, il n’est pas absent. Il existe même des proies idéales. « Je pense à ces personnes qui, à peine pensionnées, veulent s’engager à fond dans une association », détaille Emmeline Orban. « Après trois mois, il leur arrive de tout arrêter. En réalité, il vaut mieux commencer par offrir une demi-journée par semaine plutôt que de venir tous les jours. » Un autre cas est celui de ces personnes que les hasards de la vie amènent à créer une ASBL. « Il y a alors un lien affectif très fort », reprend Emmeline. « Il peut arriver que ces personnes aillent au-delà de leurs ressources. »
La fatigue des hébergeurs Au cœur de l’engagement bénévole se trouve la question du sens et de la motivation. Formateur de longue date au Centre de formation Cardijn (Cefoc), Thierry Tilquin a croisé des centaines de bénévoles. « Ceux qui travaillent chez nous veulent mettre des compétences au service d’une association dont ils partagent les orientations. Ils veulent aussi être reconnus dans leur travail et être pris au sérieux. Mais ils souhaitent également qu’on leur permette d’apprendre. Enfin, ils entendent prendre un certain plaisir et s’inscrire dans un collectif. » Pour aider le bénévole à fixer ses limites et à trouver du sens, le rôle de l’organisation employeuse n’est pas mince.
« Il est incontournable d’offrir aux bénévoles un encadrement professionnel », souligne Mehdi Kassou, porte-parole de la Plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés. Sur la seule année 2018, la Plateforme a offert 200.000 nuitées. Inévitablement, au fil des nuits, la fatigue guette les hébergeurs. « Il peut s’agir d’une fatigue physique », explique Mehdi Kassou. « En général, après un petit break, on peut repartir. Mais chez d’autres, c’est une fatigue émotionnelle. Certains hébergeurs décident alors d’arrêter d’héberger. Ils peuvent éventuellement changer d’activité: distribuer de la nourriture ou des vêtements, par exemple. » Pour accompagner ses volontaires, la Plateforme a mis sur pied des groupes de parole. L’initiative est heureuse! Car en prenant du recul par rapport à leurs pratiques, les bénévoles réduisent aussi le risque d’un jour tout envoyer en l’air.
Vincent DELCORPS