Quand l’Europe et l’Afrique se mobilisent pour des migrations sûres et régulières


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Quand l’Europe et l’Afrique se mobilisent pour des migrations sûres et régulières
Par La rédaction
Publié le - Modifié le
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Un dialogue euro africain nommé le processus de Rabat cherche à aborder tous les aspects du phénomène de la migration. Retours, intégration, réintégration. Tandis que la Belgique et la Tunisie mettent en oeuvre le nouveau concept de migration circulaire, l’ONG catholique ICMC s’inquiète du peu d’attentions apportés aux conséquences sociales des retours.

La Belgique clôture ce jour la présidence du Processus de Rabat. Ce dialogue euro-africain sur la Migration et le Développement, au nom inconnu du grand public rassemble pays européens et africains dans un objectif unique : confronter les pays du nord et du sud de la Méditerranée pour qu’ils réfléchissent ensemble au phénomène des migrations, qui, ces dernières années, a connu d’innombrables tragédies humaines. Ce Processus connait une activité intense depuis quelques années notamment dans le cadre des rencontres de la Vallette « L’esprit qui caractérise le Processus de Rabat est de fournir un lieu pour avoir un dialogue sur les questions -parfois sensibles- des migrations » soulignait le ministre des Affaires étrangères, Didier Reynders présent à Marrakech où s’est tenu la 5e conférence depuis 2006, « et parvenir à long terme à avoir des migrations sûres, régulières et ordonnées ».

Durant la présidence belge, le Processus aura adopté un plan d’action concret qui repose sur plusieurs piliers: la lutte contre l’immigration irrégulière et ses causes, la promotion de l’immigration régulière, la promotion des migrations en termes de développement et l’aide aux retours. La question des migrations est restée longtemps un sujet marginal dans les rencontres entre pays africains et européens, les premiers ne se souciant pas prioritairement des personnes qui quittaient la terre natale et les seconds se contentant de gérer les flux migratoires au compte goutte, avec pour outil essentiel la Convention de Genève de 1951, qui accorde un statut de réfugiés aux personnes ayant subi des persécutions dans leur pays d’origine. Mais l’importance des flux récents des pays d’Afrique et du Moyen Orient vers l’Europe, estimé par Eurostat, en 2016 à 1,26 millions de personnes a donné à cette question des migrations toute son importance. Pour autant, le point de vue des Africains et des Européens est loin d’être identique. Si les pays européens cherchent à limiter l’arrivée des migrants, la préoccupation des Africains est selon Didier Reynders, « de s’attaquer aux causes profondes des migrations et à la promotion d’une migration légale ». A ce sujet, quelques idées nouvelles ont été initiées, notamment par la Belgique. Entre la Belgique et la Tunisie, un projet pilote est actuellement mis en oeuvre sous l’appellation de migration circulaire. De quoi s’agit-il? D’augmenter les chances de travail des jeunes diplômés tunisiens. Après avoir sélectionné quelques entreprises qui ont des activités dans les deux pays, les jeunes diplômés auront ainsi l’occasion de faire des stages en Belgique avant d’être accompagnés dans la recherche d’un emploi dans leur propre pays.

Comment réussir un retour au pays?

Mais en marge de ce sommet multilatéral, ce sont également les accords bilatéraux qui préoccupent les pays. La diplomatie belge s’est activée ainsi pour dupliquer l’accord signé avec le Maroc sur la sécurité et la migration en avril 2016, à d’autres pays parmi lesquels la Tunisie, l’Algérie, la Mauritanie ou le Togo. Le secrétaire d’Etat à l'asile et aux migrations, Théo Francken également présent, ainsi que le ministre de l’Intérieur Jan Jambon en ont fait leur objectif parallèle. « Chacun a évidemment ses priorités », expliquait à ce sujet le secrétaire d’Etat, « la question des migrants ne peut être la seule question abordée » Dans ces accords donnant-donnant, les sujets vont de l’échange de renseignements, à la sécurité des stades, en passant par l’assurance de garanties sur les conditions de retour de migrants. C’est précisément ce point qui fait débat actuellement en Belgique. Le retour de trois Marocains condamnés pour participation à des entreprises terroristes, ayant purgé leurs peines pose problème. En effet, le Conseil du Contentieux des Étrangers estime que les garanties au sujet du traitement réservé à leur retour, ne sont pas suffisantes pour les rapatrier au Maroc. Venus pour tenter de régler ces trois cas en suspens, Théo Francken espère trouver un accord, car d’autres cas similaires vont suivre dans les années à venir.

Sous la houlette de la Belgique, le Processus de Rabat doit déboucher sur des actions concrètes et impliquer des acteurs de la société civile. « Pour notre mission catholique sensible aux catégories les plus vulnérables, il est important d’intégrer les églises de base qui ne bénéficient pas de financement » témoigne Petra Hueck d’ICMC, l’International Catholic Migration Commission, présente à Marrakech. Du côté belge, une attention particulière est accordée aux causes des migrations irrégulières. A cet égard, le Secrétaire d’Etat se veut offensif: Theo Francken multiplie en effet les campagnes de dissuasion, -opérations où il semble exceller puisqu’à chaque fois qu’il se déplace dans un pays pour expliquer aux migrants les difficultés de la migration, le nombre de migrants du pays se divise au moins par deux, voire tombe parfois à zéro… Mais il a également annoncé des actions concrètes pour aider à la réintégration des migrants chez eux. Sur la question du retour, Petra Hueck rappelle cependant combien les politiques européennes de retour ont « une vision limitée qui prend peu en compte les aspects sociaux et le sentiment d’échec qui accompagnent ces retours ».

Laurence D'HONDT - Illustration: Migration (CC0 - Pixabay) et Processus de Rabbat (c) Laurence D'Hondt

Catégorie : International

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