Les évêques du Nicaragua ont finalement accepté le 24 avril d’être «des médiateurs et des témoins du dialogue» dans la crise sociale qui oppose les nicaraguayens au président Daniel Ortega depuis sa décision de réformer le système des retraites.
Depuis près d’une semaine, le Nicaragua s’enfonce dans la crise et connaît une vague de manifestations et de heurts, déclenchée par des étudiants contre une réforme des retraites réduisant le montant des pensions. Selon le Centre nicaraguayen des droits de l’homme (Cenidh), ces manifestations ont fait 34 morts, mercredi 25 avril, dont une majorité d’étudiants. Deux policiers ont également été tués ainsi qu’un cameraman, abattu en plein reportage. Un bilan qui pourrait encore s’aggraver dans les prochaines heures, puisque 66 blessés sont à l’hôpital, dont 12 « dans un état grave et en soins intensifs », a précisé Marcos Carmona, représentant de l’ONG. Par ailleurs, 16 personnes sont toujours portées disparues. « Nous condamnons la violence utilisée par la police et ses groupes paramilitaires », a déclaré le responsable du Cenidh. L’Union européenne, les Etats-Unis et le Vatican ont critiqué à l’unisson la force excessive utilisée par la police. L’ONU a même dit soupçonner de possibles « exécutions illégales ».
Appel du pape et des évêques à la réconciliation
Au terme de la prière du Regina Coeli, dimanche 22 avril 2018, le pape François a souhaité «que cesse toute violence» au Nicaragua: «Je suis très préoccupé par ce qui se passe ces jours-ci au Nicaragua, où, suite à une protestation sociale, il y a eu des affrontements, qui ont même fait plusieurs victimes», a déclaré le souverain pontife qui a exprimé sa «proximité dans la prière à ce pays bien-aimé», et s’unit aux évêques du pays «pour demander que cesse toute violence, que soit évité un bain de sang inutile et que les questions ouvertes soient résolues pacifiquement et avec le sens des responsabilités».
Les évêques du Nicaragua ont aussi appelé à la réconciliation et à «rechercher à tout prix la paix et la sagesse», exhortant à «entendre le cri des jeunes qui revendiquent leurs droits et la voix de ceux qui se sont exprimé contre la réforme des retraites».
Face à cette situation, le président nicaraguayen Daniel Ortega (photo) a assuré que son gouvernement allait renouer le dialogue. «Le gouvernement est totalement d’accord pour reprendre le dialogue pour la paix, pour la stabilité, pour le travail afin que notre pays ne soit pas confronté à la terreur que nous vivons en ces moments», a t-il déclaré à la télévision nationale. Les autorités ont également libéré des dizaines d’étudiants arrêtés lors des manifestations, et levé la censure appliquée à une télévision locale. Suspendus depuis jeudi dernier, les cours ont repris dans la matinée dans les écoles du pays. Néanmoins, malgré cette capitulation présidentielle, les manifestations, les plus importantes depuis dix ans dans le pays, se sont intensifiées.
Dès lors, pour éviter toute aggravation de la situation, l’archevêque de Managua, le cardinal Leopoldo Brenes, a accepté de servir de « médiateur et témoin » du dialogue, en insistant pour que le gouvernement « évite tout acte de violence ». L’objectif et le principal souci de la médiation épiscopale sont d’éviter les violences. L’évêque auxiliaire de Managua, Mgr Silvio Báez, très visible et influent, notamment sur les réseaux sociaux, a lui appelé sur son compte Twitter à participer ce samedi 28 avril à une manifestation « pour que les Nicaraguayens montrent leur foi et leur amour du Nicaragua. Désormais, le chemin est ouvert pour construire de façon pacifique et civique un nouveau pays», a assuré l’évêque auxiliaire.
J.J.D. (avec Vatican News)