Lors de la messe dans le parc O’Higgins de Santiago, le 16 janvier 2018, le pape a appelé les Chiliens à « se salir les mains » pour œuvrer à la réconciliation de leur pays.
Après un discours aux autorités et une rencontre avec la présidente Michelle Bachelet, le pape François a débuté le 16 janvier 2018 le volet véritablement pastoral de sa visite au Chili par la célébration de la messe devant près de 400 000 fidèles.
« Se salir les mains »
Les Béatitudes, a expliqué le pontife dans son homélie, « naissent du cœur miséricordieux de qui ne se lasse pas d’espérer« , loin de ceux qui se contentent de « bavardages » et bloquent toute possibilité de reconstruction de la société. Elles sont donc un « jour nouveau » pour ceux qui acceptent de « se salir les mains » pour œuvrer à la réconciliation.
Le pontife a ainsi lancé un appel aux habitants de Santiago à faire grandir l’esprit de réconciliation afin de bâtir un « Chili nouveau ». Toutefois, pour « recoudre une réalité qui risque de s’effilocher« , ne pas faire le mal ne suffit pas, a-t-il indiqué: il faut « semer la paix » par la proximité. Pour cela, les Chiliens doivent mettre mesquineries et ambitions égoïstes de côté, afin de voir en chacun « un enfant de ce pays« . Les fidèles présents pour la messe, très attentifs durant l’homélie, ont applaudi ces mots.
Couronnement de la Vierge
A l’issue de son homélie, le pape François a couronné une sculpture d’une Vierge à l’Enfant. Le pontife a ainsi encensé deux couronnes et les a déposées successivement sur la tête de l’Enfant Jésus et de la Sainte Vierge. Puis, la sculpture a de nouveau été encensée. Cette tradition remonte au 17e siècle et est réservée à l’évêque de Rome. Il y a environ 400 Vierges couronnées dans le monde.

Autochtones Mapuches lors d’une cérémonie religieuse et civile. Crédit image : Temucuicui. Guillatun, novembre 2013. Photo : Comabe
Question sensible des Mapuches
Par ailleurs, lors de la procession des offrandes, le pain et le vin ont été apportés par des familles de peuples autochtones du Chili, des Mapuches. Ceux-ci, adultes et enfants, étaient habillés en tenue traditionnelle, notamment avec chapeaux, couronnes de fleurs et poncho. Lors de ce premier jour de visite, les médias chiliens ont annoncé que trois nouvelles églises venaient d’être attaquées. Ces actes de vandalisme n’ont toutefois pas été revendiqués. Deux églises ont entièrement brulé dans le sud de l’Araucanie, territoire d’origine des Mapuches. Ces Indiens revendiquent la restitution de leurs terres ancestrales saisies par l’Etat chilien à la fin du 19e siècle. La piste d’activistes mapuches avait été évoquée lors d’attaques ultérieures. Depuis 2015, 27 églises catholiques ou protestantes auraient été détruites par les Mapuches, dans les endroits les plus reculés du pays.
Après la célébration eucharistique, le pape a déjà déjeuné en privé à la nonciature apostolique. Plus tard dans la journée, il fera une brève visite à la prison pour femmes de Santiago, une première pour un successeur de Pierre.

(c) Vatican Media
Femmes en prison
Pendant un peu moins d’une heure, le pape François a rendu visite au femmes incarcérées dans la prison de Santiago. Considérer la détention seulement comme une punition est « mauvais », a déclaré le pape aux détenues les invitant à se tourner résolument vers la réinsertion. Les 600 détenues de ce centre, rassemblées dans le gymnase, ont réservé une véritable fête au souverain pontife. En entrant, François, très souriant, a pris le temps d’embrasser plusieurs enfants de détenues. Pour cette visite, les détenues avaient composé un hymne rythmé, intitulé Pasteur à l’odeur de brebis.
Devant le pape, Janet, une des prisonnières a partagé ses douleurs et demandé pardon. Au début de son discours, le pape a salué cette attitude de courage et d’humilité, qui rappelle que « chaque jour nous sommes invités à prendre un nouveau départ ». Le pape François a emmené exhorté les détenues à exiger de la société qu’elle les aide dans leur chemin de réinsertion car la prison ne peut se réduite à une « simple » punition.
Abus sexuels
Lors de cette même journée, en début d’après-midi, le pape François a également rencontré des victimes d’abus sexuels commis par des prêtres, à la nonciature apostolique. L’évêque de Rome était seul avec les victimes pour cette rencontre, afin qu’elles puissent témoigner librement. Le pape a écouté les victimes et a prié et pleuré avec elles. Le directeur du Bureau de presse du Saint-Siège n’a pas apporté de précision sur le nombre ou l’identité des victimes, déclarant seulement qu’il s’agissait d’un petit groupe. Cette rencontre ne figurait pas au programme officiel du pape François mais le Chili a en effet été secoué par plusieurs cas d’actes de pédophilie commis par des membres du clergé.
(cath.ch/imedia/xln/be)