Cinéma – Quand l’insulte révèle un passé occulté !


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Cinéma – Quand l’insulte révèle un passé occulté !
Par La rédaction
Publié le - Modifié le
3 min

Avec L’insulte, le réalisateur libanais Ziad Doueiri aborde une réalité très complexe par le biais d’un banal conflit entre un chrétien libanais et un réfugié palestinien qui devient une affaire d’Etat. Un film remarquable dans lequel l’insulte trahit l’innommable d’un passé douloureux.

L’insulte pourrait être une comédie voire un film de procès, un séjour en "absurdie". Et pourtant, ce n’est rien de tout cela. Après avoir réalisé le très remarquable "L’Attentat" qui se déroulait à Tel Aviv et confrontait Palestiniens et Israéliens, Ziad Doueiri place cette fois son intrigue au Liban. Il y est question également de Palestiniens mais aussi, voire surtout, de leur place dans la société libanaise et même "arabe" en général. Le propos de Ziad Doueiri est éminemment politique. Le réalisateur libanais rend compte des difficultés d’être Palestinien hors de son pays (si tant est qu’il en soit encore un!) mais pas seulement.

Le point de départ de ce film semble bien mineur: une bête querelle, même pas digne d’une Justice de Paix. Lors de la rénovation d’un immeuble à appartements à Beyrouth. Toni, un chrétien libanais, et Yasser, un réfugié palestinien, se disputent au sujet d’un problème de plomberie. La discussion s’envenime et Yasser finit par insulter Toni. Ce dernier, blessé dans son orgueil, décide de porter plainte. Et, ce qui était d’une banalité triviale va mener à des conséquences insoupçonnables. Cela démarre dans une surenchère de réactions, pas nécessairement violentes ou voulues, mais qui poussent les uns et les autres dans leurs retranchements. Les voilà rapidement entraînés dans une spirale infernale dont la portée ira bien au-delà des murs du tribunal.

L’un parle, l’autre se tait

Bien plus qu’une question de procès et de droit, il s’agit ici d’une blessure ou de blessures intimes et collectives jamais cicatrisées! Toni parle, crie pour défendre son droit d’une façon qui dépasse l’entendement (et nous jouons ici volontairement sur le mot), tandis que Yasser, le réfugié, lui, se tait. Et ce pour d’autres blessures infligées par les siens à cause... d’une cause non entendue. Et voilà qu’apparaissent alors les thèmes difficiles du pardon et de l’oubli.

Sortant de la salle, le spectateur aura probablement pris conscience que tout ce qui a trait à la Palestine et à la défense du peuple palestinien est bien plus complexe que tout ce qu’il peut en penser et en dire. Que tout n’est pas en noir et blanc et ne peut pas être réduit aux antagonismes primaires entre bons et mauvais. Il comprendra aussi que malgré ou à cause du poids du passé, le Palestinien n’est bienvenu nulle part, même pas chez les siens, entendons dans ce que l’on appellera de manière triviale et au risque de la caricature, chez "les Arabes". Et, en quelque sorte, par un étonnant retournement de situation, nous serions probablement face désormais au "Palestinien errant".

Charles DE CLERCQ -RCF

Retrouvez les sorties de la semaine et les critiques de Charles De Clercq sur le site cinecure.be ou rendez-vous dans l’émission Cinécure sur RCF Bruxelles (107.6 FM ou rcf.be), le mercredi à 13h10 et 19h15, le samedi à 13h30 et 18h15 ou dans « Cinécure l’intégrale », le dimanche à 17h30. Cette émission est disponible en podcast.

A découvrir également, l’émission « Les 4 sans coups »: deux fois par mois, Charles De Clercq invite ses amis critiques cinéma à partager leur passion pour les films du moment. Une discussion riche en échanges contradictoires, mais toujours dans la bonne humeur! Les 1er et 3e vendredis du mois à 21h, le lendemain à 17h et le surlendemain, dimanche à 13h. Egalement accessible en podcast sur rcf ou sur les4sanscoups.be.

Catégorie : Culture

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