
Le Père Paolo Dall’Oglio, à Dieu ?
Celui qui se voulait solidaire jusqu’au bout de ses frères syriens aurait eu, ou aura, 63 ans ce 17 novembre. Le célèbre prêtre a disparu alors qu’il tentait à Raqqa une médiation particulièrement risquée. La chute des derniers bastions syriens de Daech n’a livré aucune preuve, ni information fiable quant à sa possible exécution.
Expulsé de Syrie en 2012 suite à ses prises de position en faveur de la révolution, le Père Paolo était rentré clandestinement dans la ville confrontée depuis peu aux atrocités des islamistes les plus radicaux. Après avoir été chaleureusement accueilli par la population, leur héros qui, raconte Eglantine Gabaix-Hialé, « arrivait à passer dans des trous où une abeille ne serait pas passée et enterrait avec eux leurs morts », s’est rendu le 29 juillet 2013 au siège de la sinistre organisation au drapeau noir pour obtenir la libération d’otages. Il n’en est jamais revenu.
Bavure d’islamistes ou vengeance du régime?
Selon certaines sources, le jésuite aurait été exécuté tantôt deux heures après sa séquestration, tantôt plusieurs jours après, par des responsables de Daech, dont les noms diffèrent. Pour d’autres, il aurait été vu vivant début 2014 à la frontière turque ou encore en septembre 2015, dans une prison tenue par un bataillon ouzbek. Jamais deux fois la même version, ni aucun élément vérifiable. Les pistes semblent délibérément brouillées.
A chaque assaut, Daech n’hésitait pas à liquider ses otages, excepté ceux qui valaient leur pesant d’or en termes de rançon ou de monnaie d’échange. Or, c’était le cas pour le Père Paolo.
Comment comprendre d’ailleurs l’appel du pape à libérer ce « religieux estimé » trois ans après sa disparition s’il n’y avait de sérieux indices de vie??? Pour Riccardo Cristiano, correspondant au Vatican et auteur du récent ouvrage « Paolo, la prophétie réduite au silence », ce dernier partageait avec le pape François un credo en l’Evangile, pas en l’empereur Constantin (qui avait rattaché le christianisme au pouvoir).
Que penser des annonces récentes de sa mort par des (ex)islamistes de Daech?
« Si Daech l’avait tué, il l’aurait revendiqué, trophée à l’appui. Mon avis très subjectif est que le régime soudoie des anciens membres de Daech pour annoncer qu’il a été tué dès son enlèvement. C’est le régime qui avait tout intérêt à le faire disparaître. Etant donné les liens avérés avec le régime syrien, Daech pourrait l’avoir donné ou vendu à ces derniers. Ce serait la pire des options. Parce que je connais trop ce qui se passe dans les prisons syriennes », commente Eglantine Gabaix-Hialé.
Ce qui est sûr, c’est que son retour clandestin en Syrie pour la seconde fois depuis son expulsion, dérangeait au plus haut point le régime. Les terroristes libanais du Hezbollah, allié de Bachar el Assad, comme Daech, auraient-ils conclu un accord secret? Tant de désinformation ou de silence de multiples côtés…
Quoi qu’il en soit, l’annonce de la mort de ce messager de réconciliation en ferait un martyr. A éviter à tout prix pour les commanditaires du crime!
Béatrice PETIT
Retrouvez la suite de cet article, avec le témoignage d’Eglantine Gabaix-Hialé, journaliste, écrivain et amie ainsi que celui de Yahia H, un jeune manifestant musulman sauvé par Père Paolo Dall’Oglio sur le site www.cathobel.be dès demain après-midi.