Quelle est la réalité des centres fermés aujourd’hui? Plusieurs ONG ont mené l’enquête de manière indépendante sur les conditions de détention administrative des étrangers en Belgique. La conclusion n’est pas brillante.
La situation des migrants en centres fermés semble s’être aggravée depuis dix ans. C’est ce qui ressort de la comparaison entre le rapport publié lundi 23 janvier par le CIRé (Coordination et Initiatives pour Réfugiés et Etrangers), et le même relevé réalisé en 2006. Les ONG (Caritas international, la Ligue des droits de l’homme et le JRS, Jesuit Refugee Service) constatent que les recommandations formulées il y a dix ans n’ont pas été suivies par le gouvernement belge. Au contraire, « on assiste même à une régression du respect des droits: enfermement de femmes enceintes, de personnes malades ou âgées, séparation des familles, durée arbitraire de détention, difficultés d’accès à l’aide juridique, détention quasi-systématique des demandeurs d’asile à la frontière… »
Ce constat alarmant s’appuie sur la rencontre de quelque six cents personnes sur l’année 2014, soit 10% de l’ensemble des ‘détenus’. La force de cet état des lieux tient à la méthodologie employée: l’association de défense des droits des étrangers a croisé les chiffres officiels fournis par l’Office des étrangers avec les données recueillies par les visiteurs des centres fermés.
Une prison
Maaike Vanderbruggen, visiteuse de centres fermés pour JRS, témoigne à l’occasion de la sortie de ce rapport: « Il y a des grilles, cela ressemble vraiment à une prison en fait. La différence, c’est qu’en prison, vous savez quand vous sortez. Pas là. » Pourquoi les migrants en attente de reconduite à la frontière doivent-ils être traités comme des criminels, dans des espaces confinés et privés de liberté? C’est l’autre question soulevée par le CIRé.
Les témoignages recueillis dans le cadre de ce rapport 2016 font état de la difficulté par les personnes enfermées de faire valoir leurs droits. Maaike Vanderbruggen raconte encore dans les colonnes du Soir: « Les migrants ont beaucoup de questions sur leur situation juridique. » Ce domaine fait face à une pénurie d’avocats spécialisés. La complexification du recours au pro deo n’arrange rien à cette situation.
A.-F. de BEAUDRAP
Photo: Centre fermé de Vottem – (c) CRER