On aurait peur de lire la presse, d’écouter les journaux parlés et de regarder les infos aux JT. On en retire l’impression que rien ne va plus dans notre pays. Gardiens de prison en colère, policiers exténués, militaires appelés en renfort un peu partout et magistrats qui n’hésitent pas à tacler le gouvernement sur sa gestion du département de la Justice… autant de faits qui montrent que notre Belgique ne « tourne plus rond ». De fait, quand le premier magistrat du pays, en l’occurrence le premier président de la Cour de cassation, affirme qu’un pays qui affaiblit sa justice est un « état voyou » (sic) et qu’il affirme de surcroît qu’il n’y a plus vraiment de différence entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, il y a de quoi être interpellé. C’est le fondement même de la démocratie qui est ébranlé!
Ce qui m’inquiète, c’est la réponse du monde politique. Une fois de plus, nous assistons à des déclarations « c’est pas moi, c’est l’autre ». L’heure n’est pas aux règlements de compte. La situation que nous traversons n’est pas neuve, elle est la résultante de nombreuses années au cours desquelles la Justice a été délaissée par l’exécutif. Pour quelles raisons? Peu importe. L’urgence n’est pas à chercher le pourquoi de la situation actuelle, mais bien de dégager des pistes pour trouver des solutions à une situation qui devient intenable pour les prisonniers et qui finira mal si on ne se met pas rapidement autour de la table pour un véritable dialogue, tant il est vrai qu’on assiste actuellement à des monologues de chacune des parties concernées. Que le gouvernement doive prendre des mesures pour assainir l’économie, on peut le comprendre. Mais camper sur ses positions, sans dialogue et surtout sans laisser de marge de manœuvre, ne permet pas d’avancer. Quand la colère gronde et amplifie et que les gens ont le dos au mur, ils n’ont pour seule alternative que le « jusqu’au-boutisme », peu importe les conséquences.
Dès lors, il nous faut retrouver au plus vite le sens de la raison. En chinois, le mot « crise » se dit « weiji », combinaison de deux mots qui sont « danger » et « opportunité ». Mgr De Kesel le déclarait aussi dans nos colonnes: la crise est une « grâce ». Il faut donc voir la crise comme une chance pour imaginer demain autrement. Avec l’objectif de mettre en place les conditions d’un monde meilleur où l’ensemble des acteurs avance dans la même direction. Faire de la crise un moteur en proposant une vision à long terme qui motive et donne du sens et en réunissant toutes les forces en présence pour coopérer différemment dans l’intérêt de tous.
Jean-Jacques Durré
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