Combien de temps allons-nous supporter, impuissants, d’assister aux naufrages répétés d’innocents précipités, chaque jour plus nombreux dans les flots? Et les Occidentaux d’avaler les images à l’heure des repas. « Qui veut encore du potage? », s’inquiètent les mères de famille, pendant que les journalistes lancent des chiffres et totalisent les morts. Non, la vie n’est pas un jeu et nous ne sommes pas dans « Touché, coulé ». La mise en scène d’émissions stupides confine souvent à glorifier l’argent et les probabilités qui en découlent. Quand mettrons-nous à l’honneur les vrais héros du quotidien? Tous ces gens animés de mobiles justes qui, là où ils sont, tentent d’aider leur prochain.
Les manuels scolaires enseignent la fin de l’empire romain, avec une date de basculement entre deux mondes, comme si, un matin, il était apparu qu’il y avait un avant et un après. Ce glissement entre les certitudes d’autrefois et les nouveautés du lendemain, nous le vivons à présent, vous et moi. Pourtant, me direz-vous, nous ne disposons pas de pouvoirs décisionnels conséquents. Certes. Mais nous détenons la clairvoyance qui pousse à agir et à réagir aux événements contemporains. Le risque de perdre le confort de nos vies est réel. Mais combien de temps accepterons-nous un reflet de paillettes dans la glace quand tant d’innocents périssent, faute d’attention? Loin des querelles intestines d’ego surdimensionnés, les politiciens doivent maintenant prendre à bras le corps les drames du moment. Oui, l’engagement de l’Europe ne sera pas sans meurtrissures. Oui, le sang risque de couler. Mais il a déjà coulé à Madrid, à Londres, à Paris et à Bruxelles. Ne fermons pas les yeux, le monstre de la terreur est réapparu dans nos murs. Pour autant, se murer dans la colère et le dépit ne mène pas à la liberté. Le repli identitaire n’a jamais gagné les cœurs généreux.
Angélique TASIAUX
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