
Le Président du Conseil Pontifical Justice & Paix, le Cardinal Peter Turkson (à droite) avec les co-Présidents Mgr Kevin Dowling (à gauche) et Me Marie Dennis (deuxième de droite) et la Secrétaire générale Greet Vanaerschot (deuxième de gauche) de Pax Christi International.
Le monde catholique peut-il continuer de soutenir sans équivoque la théorie de la ‘Juste Guerre’, maintenant que se globalisent de nouvelles techniques militaires ‘propres’ mais plus destructives que jamais? A l’issue d’une Conférence internationale, les représentants de Justice et Paix appellent le pape à rédiger une encyclique sur la non-violence et la ‘Juste Paix’.
Cette théorie de la ‘Juste Guerre’ n’empêche-t-elle pas souvent d’envisager des pistes plus créatives et non-violentes? Les catholiques ne doivent-ils pas s’engager davantage pour une ‘Juste Paix’? Cette réaction non-violente suffit-elle pour combattre la guerre et l’oppression telle que notre planète les vit aujourd’hui? Le Conseil Pontifical Justice & Paix vient de consacrer une conférence de trois jours à Rome à ces questions, en collaboration avec entre autres Pax Christi International. Marie Dennis, co-Présidente de Pax Christi International, s’est expliquée sur les ondes de Radio Vatican. « En tout cas, a-t-elle souligné, quand on lit les Evangiles, on ne peut que constater que Jésus a toujours prôné la non-violence, malgré le contexte d’une occupation violente et oppressive de la Palestine qui était celui de son temps. Il a été partisan de cette non-violence jusque sur la Croix. »
Vaincre la violence
« Mais n’est-il pas plus facile de prôner cette non-violence quand on est Américaine comme moi », confesse Mme Dennis, « que quand on vit au Soudan du Sud ou en Irak ou Syrie ou en Colombie… ? » Il y a eu pourtant, ne l’oublions pas, des exemples historiques de non-violence vainquant l’oppression: les renversements des dictatures aux Philippines et en Europe de l’Est par exemple. « Notre démarche se veut inductive: nous devons écouter attentivement ce que nos sœurs et frères qui vivent dans les parties du monde en conflit nous apprennent sur la non-violence et ‘Juste Guerre’ ou ‘Juste Paix’. »
Le point de départ de cette conférence romaine de trois jours était l’hypothèse que la référence classique du monde catholique à la théorie de la ‘Juste Guerre’ peut empêcher des alternatives non-violentes créatives à se développer. « Quand il y a conflit, ne nous limitons-nous pas trop vite à la seule conclusion: ‘quelques bombes de plus suffiront pour arrêter la violence’? », explique la co-Présidente de Pax Christi International. « Ne faut-il pas davantage appuyer une théologie de la non-violence et de la ‘Juste Paix’ en juxtaposition avec la théorie de la ‘Juste Guerre’. »
Une revitalisation des instruments de la non-violence
Le pape François, dans un message adressé aux participants à la conférence internationale par l’intermédiaire du Cardinal Peter Turkson, Président du Conseil Pontifical Justice & Paix, s’est réjoui de cette « revitalisation des instruments de la non-violence ». Le pape plaide en faveur de la non-violence active: « une arme qui nous permet de nous battre pour la paix ». Le document final de la conférence appelle le souverain pontife à développer sa pensée dans une encyclique consacrée à la non-violence et la ‘Juste Paix’.
D’après ce document final, l’Eglise doit davantage intégrer l’annonce prophétique de la non-violence évangélique partout où elle est active: dans les diocèses, les paroisses, les écoles, les associations etc., mais également dans sa vie sacramentelle. Par ailleurs, l’Eglise doit promouvoir avec toutes ses forces les pratiques et stratégies de non-violence dont elle a déjà expérimenté l’efficacité (résistance non-violente, justice réparatrice, protection non-armée des populations civiles, techniques de consolidation de la paix, et bien d’autres). Enfin, le document demande à l’Eglise de continuer sa lutte contre les armes de destruction massive (dont les armes nucléaires) et… « de ne plus se servir de la doctrine de la ‘Juste Guerre' ». La conférence se base sur des analyses scientifiques récentes qui démontrent « que des stratégies de résistance non-violente sont doublement plus efficaces que toutes stratégies ayant recours à la violence ». Les participants à la conférence rejettent l’idée de la ‘Juste Guerre’: « elle mine la volonté de développer les capacités et instruments de transformation non-violente des conflits ».
La déclaration ‘An appeal to the Catholic Church to recommit to the centrality of Gospel nonviolence’ est consultable à partir de Pax Christi.
Benoit LANNOO
Photo: Le Président du Conseil Pontifical Justice & Paix, le Cardinal Peter Turkson (à droite) avec les co-Présidents Mgr Kevin Dowling (à gauche) et Me Marie Dennis (deuxième de droite) et la Secrétaire générale Greet Vanaerschot (deuxième de gauche) de Pax Christi International.