Le pape François s’est rendu pour la première fois, dimanche 17 janvier 2016, à la grande synagogue de la capitale italienne, située dans le quartier du ghetto, au bord du Tibre. Il est le troisième souverain pontife à faire cette visite après Jean-Paul II en 1986 et Benoît XVI en 2010.
Entourée de mesures de sécurité importantes - quelque 800 policiers, soldats et carabiniers étaient chargés d'assurer la sécurité, des catacombes ont été fouillées et des poubelles scellées - cette visite a permis à François de dire à quel point les relations entre juifs et catholiques lui tenaient à cœur. Quelque 1.500 personnes ont été invitées à cet événement, suivi par 300 journalistes accrédités.
Accueilli et accompagné par la présidente de la communauté juive de Rome, Ruth Dureghello, et par le président de la communauté juive d’Italie, Renzo Gattegna, le pape s’est arrêté devant deux plaques commémoratives: l'une rappelant la grande rafle d'octobre 1943, dans laquelle 1.024 juifs avaient été déportés à Auschwitz; l'autre un attentat palestinien qui avait blessé 37 juifs romains en 1982 et causé la mort de Stefano Gay Taché, un enfant de deux ans, dont le successeur de Pierre a rencontré la famille dimanche.
A l’entrée de la synagogue, le Grand rabbin de Rome, Riccardo Di Segni, a ensuite chaleureusement invité le pape à entrer. Il a été applaudi et accueilli par des "shalom", "vive notre pape" et des youyous. Un chœur a interprété plusieurs psaumes. François a alors rencontré plusieurs survivants des camps d’extermination nazis. Il a pris le temps de saluer chacun.
A la tribune, les présidents de la communauté juive d’Italie et de Rome se sont adressés au souverain pontife, suivis du Grand rabbin de Rome. Puis François a pris la parole devant les membres de sa délégation composée notamment des cardinaux Koch et Kasper, respectivement président et président émérite du Conseil pontifical pour la promotion de l’Unité des chrétiens, ainsi que devant des rabbins venant de plusieurs pays d'Europe et de Terre sainte.
"Nos relations me tiennent vraiment à cœur", a dit le pape qui a évoqué ses visites fréquentes en diverses synagogues du temps où il était évêque de Buenos Aires. Trente ans après Jean-Paul II qui effectuait la première visite d’un pape dans la synagogue de Rome, François a souscrit à l'expression de son prédécesseur: "Les juifs sont nos frères aînés dans la foi". François a insisté sur le fait que nous appartenons tous à une unique famille humaine, celle de Dieu. "Ensemble, juifs et catholiques qui ont des liens si particuliers, inséparables, en raison des racines juives du christianisme doivent se sentir frères, unis par le même Dieu, dotés d’un riche patrimoine spirituel commun", a-t-il poursuivi. Cinquante ans après la déclaration de Nostra aetate, qui a rendu possible un dialogue systématique entre l’Eglise catholique et l’Hébraïsme, le pape François a rendu à nouveau grâce à Dieu, car "l’indifférence et l’opposition se sont muées en collaboration et bienveillance. D’ennemis et étrangers, nous sommes devenus amis et frères". Un demi-siècle plus tard, le pape a réaffirmé les racines juives du christianisme et sa condamnation de toute forme d’antisémitisme.
Des questions théologiques sont encore à résoudre et le pape a encouragé ceux qui, avec "persévérance et discernement", mèneront "d’ultérieures et nécessaires réflexions", précisant que la dimension théologique du dialogue hebreo-catholique mérite d’être toujours plus approfondie.
François a encore rappelé qu'aujourd’hui, juifs et catholiques sont appelés à assumer leur responsabilité commune pour résoudre les problèmes de Rome et affronter ensemble les défis du monde. Et de citer la violence et la sauvegarde de notre planète. "Juifs et catholiques doivent offrir au monde le message de la Bible concernant la protection de la Création. Guerres, violences et injustices blessent profondément l’humanité et nous appelle à redoubler d’efforts en vue de la paix et de la justice. La violence de l’homme sur l’homme est une contradiction avec toute religion digne de ce nom", a poursuivi le Saint-Père, qui a rappelé la sacralité de la vie, don de Dieu.
François a ensuite rendu hommage aux six millions de victimes de la Shoah, "une barbarie inhumaine", et de la rafle de 1943 à Rome, tout en soulignant que le passé doit nous servir de leçon pour le présent et le futur. Un discours qui a été chaleureusement applaudi.
Avec Radio Vatican