2016 est la dernière année du mandat de Barack Obama à la présidence de Etats-Unis. Il a fait du contrôle des armes à feu son dossier prioritaire.
Il est sans doute trop tôt pour analyser ce que le 44e président des Etats-Unis laissera dans l’Histoire. Ses deux mandats à la tête du pays ont en tous cas été marqués par l’adoption d’une loi ouvrant l’accès aux soins de santé à des millions d’Américains qui en étaient privés, souvent les plus pauvres d’ailleurs. Surnommée « Obamacare » par ses détracteurs, la loi sur la couverture sociale est entrée en application le 1er janvier 2014. Elle a pour objectif de permettre aux 50 millions d’Américains qui ne bénéficient pas de couverture sociale d’avoir enfin une assurance. Mais pour arriver à l’imposer, l’hôte de la Maison Blanche a dû batailler ferme, notamment contre les Républicains farouchement opposés à cette législation, qui oblige tous les Américains à cotiser. Le combat n’est d’ailleurs pas encore gagné, dans la mesure où l’obligation de s’assurer est un réel changement culturel de l’autre côté de l’Atlantique. Il faudra sans doute des années pour voir se réaliser l’objectif de Barack Obama, à savoir 100 % d’Américains couverts par la loi sur la santé. Rien, en outre, ne dit que, si les Républicains gagnent les élections présidentielles en novembre prochain, ils ne reviendront pas sur cette législation.
30.000 morts par an
L’autre grand combat – qui est probablement le dernier du mandat de Barack Obama – se rapporte à la législation sur les armes à feu. Les Etats-Unis ont connu ces dernières années une vague de fusillades, dans des écoles notamment. En décembre 2012, l’émotion soulevée par le massacre de l’école primaire de Sandy Hook (20 enfants et six adultes tués), à Newtown, dans le Connecticut, avait convaincu le président Obama, tout juste réélu, qu’il serait possible de trouver un terrain d’entente avec le Congrès. L’administration avait plaidé en faveur d’une limitation de l’accès aux armes d’assaut et pour la généralisation de l’examen des antécédents des acheteurs d’armes. Mais le locataire de la Maison Blanche avait été mis en échec en avril 2013, au Sénat, par une partie de son propre camp. Il faut savoir que nombre d’Américains n’entendent pas que l’on touche au deuxième amendement de la Constitution qui garantit pour tout citoyen américain le droit de porter des armes. Même la tuerie de Sandy Hook n’a donc pas infléchi les positions d’une partie de la population, malgré l’émotion qu’elle avait suscitée. Or, quelque 30.000 personnes trouvent la mort par armes à feu chaque année aux Etats-Unis!
La présidence de Barack Obama été ponctuée par plusieurs tueries de masse. A chaque fois, il a fait preuve de compassion tentant de consoler des dizaines de familles de victimes et promettant de lutter pour modifier la législation. C’était sans compter sur la farouche opposition des Républicains, majoritaires au Congrès, soutenu par le puissant lobby des armes, la NRA (National Rifle Association).
Soutien des évêques catholiques
Barack Obama le sait: l’opinion est profondément divisée sur le sujet. Plus de 53 % des Américains sont en faveur de la vente de fusils d’assaut! Devant le blocage du Congrès, il a décidé de contourner ce dernier. Lors d’une rencontre avec des familles de victimes de dizaines de fusillades, Barack Obama a annoncé – visiblement très ému – une série de décrets présidentiels qui viseront à lutter contre « le fléau » de la violence des armes, tout en préservant le sacro-saint deuxième amendement de la Constitution. Du côté républicain, on dénonce l’initiative présidentielle, allant jusqu’à promettre que toute législation contrôlant les armes à feu sera abolie si un des candidats du parti remportait les élections présidentielles de l’automne prochain. Mais Barack Obama n’entend pas pour autant faire marche arrière.
Dans son combat, le président a reçu le soutien de plusieurs évêques catholiques. Ils ont publiquement soutenu la démarche du président Obama visant à renforcer le contrôle des armes à feu dans le pays. L’archevêque de Miami, Mgr Thomas G. Wenski, a salué les « efforts raisonnables visant à sauver des vies et à rendre nos communautés plus sûres », tout en reconnaissant qu’aucune action ne pouvait éliminer tous les actes de violence par armes à feu. Il espère que le Congrès prendra en considération de façon plus sérieuse tous les aspects en jeu dans cette problématique. « Dieu merci, quelqu’un a finalement eu le courage de combler les lacunes de notre pitoyable législation sur les armes à feu, afin de réduire le nombre de fusillades, de suicides et de meurtres, qui sont devenus un fléau dans notre pays », a déclaré Mgr Kevin Farrell, évêque de Dallas, relayé par le site internet catholique Crux. Tout en regrettant une proposition présidentielle malgré tout modeste, le prélat a fustigé un Congrès « vendu de manière éhontée au lobby des armes ».
De fait, les mesures qui seront adoptées par décret présidentiel resteront limitées, car le recours à ces décrets oblige le président à se montrer modeste dans ses ambitions. Concrètement, deux mesures présentées au début du mois portent sur la vérification systématique des antécédents des acheteurs pour les ventes sur Internet ou à l’occasion des foires aux armes. Jusqu’ici, ce contrôle des antécédents judiciaires et psychiatriques des acheteurs échappait aux foires itinérantes et au Net. Autre point fort: les vendeurs réguliers seraient tenus de posséder une licence les obligeant à pratiquer ces contrôles. Le président américain veut aussi renforcer les interdictions d’achat pour les personnes souffrant de troubles mentaux et supprimer les dispositions qui permettent d’acquérir une arme d’assaut sans vérification des antécédents des acheteurs. Il entend enfin renforcer le service qui centralise les données sur les antécédents des acheteurs tout comme le service fédéral chargé de la lutte contre les ventes d’armes clandestines.
Barack Obama sait qu’une majorité de citoyens américains soutient ces mesures. Un récent sondage a montré que 89 % des sondés se déclarent pour un renforcement du contrôle du passé des acheteurs. De même, une enquête réalisée en 2013 par l’agence d’information américaine Religion News Service (RNS) avait révélé que 62% des catholiques du pays étaient en faveur d’un contrôle des armes plus strict.
J.J.D