La Campagne de Carême sur Haïti bat son plein en Belgique, avec de nombreuses animations d'Entraide et Fraternité. Reportage à Bertrix.
"Comme des maraîchers, nous semons et nous verrons ce qui poussera…", constate Amandine Henry, coordinatrice d'Entraide et Fraternité dans la province de Luxembourg. Comme dans les autres régions, la période de Carême est l'occasion de sensibiliser au sort des habitants du monde. Cette année 2015, Haïti est à l'honneur, et plus spécifiquement la situation des paysans de ce pays. Pour ce faire, Entraide et Fraternité organise des rencontres dans les régions, entre des témoins d'Haïti et la population belge. Par exemple, Juliette Eliezer (cf photo ci-contre) qui accompagne les paysans démunis dans leurs combats pour faire respecter leurs droits au sein de la PAPDA (plateforme haïtienne pour le développement alternatif) est arrivée dans la province de Luxembourg depuis dix jours pour répondre aux questions des citoyens belges.
A un rythme soutenu, ce témoin haïtien rencontre les écoles, elle participe à des débats, etc. Le public qui l'interroge commence inévitablement par la question: "Qu'en est-il de la reconstruction d'Haïti, cinq ans après le séisme?" Elle répond inlassablement: "ça va mieux, même si les améliorations sont à peine perceptibles." Mais surtout, Juliette Eliezer, comme les autres Haïtiens invités, font passer le message qu'ils aimeraient devenir autonomes, et non plus être dépendants de l'aide humanitaire.
Juliette Eliezer précise que la catastrophe de 2010 a eu un double effet: d'un côté, les familles vivant à la campagne ont montré leur solidarité avec les victimes de Port-au-Prince en apportant de la nourriture pour les rescapés, puisque les magasins de la ville étaient détruits. Mais le tissu social haïtien a subi les inconvénients de l'aide internationale: "avec toutes les ONG qui se sont installées après le séisme, plein de gens se sont déplacés de la campagne vers Port-au-Prince, juste pour avoir un sac de riz. Même si aujourd'hui la reconstruction du pays se fait petit à petit, nous sommes interpellés par l'importation des produits étrangers qui envahissent le marché local et qui casse le marché national."
Cette réflexion sur le sort de la paysannerie haïtienne fait écho avec le constat posé par le Mouvement d'action paysanne (MAP) du Luxembourg. Serge Peereboom, co-président de l'antenne régionale, assistait au débat avec Juliette Eliezer: "Un problème commun à nos deux pays est le fait de pouvoir vivre de son métier. Les paysans n'arrivent plus à vivre de leur travail. Dans beaucoup de pays, ils doivent aller travailler à l'extérieur et ce qu'ils gagnent ne leur donne pas de quoi vivre. Chez nous aussi, des agriculteurs sont au CPAS. C'est fou que quelqu'un qui nourrit les autres doive recevoir des colis alimentaires!"
Anne-Françoise de BEAUDRAP
Infos: www.entraide.be
Les prochaines animations auront lieu:
- jeudi 26 mars à "La Gaumaise" (Florenville), une conférence-témoignage avec Juliette Eliezer dès 20h.
- Dimanche 29 mars, le spectacle "Une assiette formidable" (à 11h, Halle de Han (Tintigny)). Ce théâtre-action sera suivi d'un débat sur la maîtrise de notre alimentation. La matinée se terminera évidemment par un repas Bol de riz.