A Milan, la grande ville du nord de l'Italie, la "guerre des mosquées" dure depuis plus de dix ans. Le parti de la Ligue du Nord s’oppose par tous les moyens à la construction d’un lieu de culte pour les musulmans. Une loi vient d'être votée au parlement régional, rendant pratiquement impossible toute autorisation de construction.
Plus de 450.000 musulmans vivent dans la région de Lombardie, dont 100.000 pour la seule ville de Milan. Pourtant, aucune mosquée n'existe dans celle-ci. Les fidèles se voient réduits, par conséquent, à prier dans des caves d'immeubles ou d'autres lieux plus ou moins inadaptés au culte. Dans le centre de Milan, un chapiteau a même été installé, où quelque 2.000 musulmans se réunissent chaque semaine pour la prière du vendredi.
En 2014, la commune, administrée par la gauche, avait individualisé des terrains pour autoriser la construction de plusieurs mosquées. Mais c'était sans compter l'opposition farouche de la Ligue du Nord, qui a déposé un projet de loi pour transformer en parcours du combattant bureaucratique tout projet de construction d’un nouveau lieu de culte. Le texte impose, par exemple, une grande distance obligatoire entre les éventuelles mosquées et les églises catholiques existantes.
Liberté de culte entravée?
A la suite des attentats de Paris, le mois dernier, le vote de la loi en commission et en assemblée plénière a été accéléré, pour déboucher sur une approbation du texte ce mardi 3 février par la majorité de droite. "Tous les prétextes sont bons pour ne pas reconnaître nos droits. Même sans les attentats de Paris, la Ligue du Nord aurait trouvé autre chose, mais c’est grave, c’est honteux, d’instrumentaliser des faits tragiques, utiliser la perte de vies humaines pour nier les droits de toute une communauté de citoyens. Nous ferons tout le nécessaire pour que la justice reconnaisse nos droits à construire notre mosquée", s’emporte Davide Piccardo, le président de l’association des centres islamiques de Milan. Il annonce le dépôt d’un recours devant la cour constitutionnelle à Rome, convaincu que cette loi ne respecte pas la constitution italienne et son article sur la liberté de culte.
De son côté, Massimiliano Romeo, chef de groupe de la Ligue du Nord au Parlement régional, déclare: "A part prier, que font-ils dans leurs mosquées? Ils font de la politique". "Que cachent-ils derrière ces centres culturels islamiques, vont-ils seulement là pour prier, pour parler de leurs traditions, ou vont-ils là pour inciter à la haine envers l’Occident?" , se demande encore Romeo, faisant un parallèle douteux entre l'incendie d'églises dans certains pays et le "contrôle" des lieux de culte musulmans en Lombardie.
On peut toutefois se demander si le fait de "compliquer" l'exercice du culte des musulmans est de nature à favoriser le vivre ensemble entre différentes communautés religieuses ou, au contraire, à attiser "la haine envers l'Occident", pour reprendre les termes de l'élu de la Ligue du Nord.
C.H. (avec www.lalibre.be)
Légende photo: le dôme de Milan