Mère Bénédicte Witz, l’actuelle abbesse, est la dernière sœur à pratiquer l’art de l’enluminure. Elle revoit toujours avec admiration mais aussi avec émotion le chef-d’œuvre réalisé par sa communauté durant la Première Guerre mondiale. Photo © Yves Van Cranenbroeck.
La lettre pastorale « Patriotisme et Endurance » du Cardinal Mercier fut calligraphiée et enluminée dans la clandestinité par les sœurs bénédictines de Maredret en 1915 et 1916. Le temps d’une conférence, Dominique Vanwijnsberghe, chercheur à l’Institut royal du Patrimoine artistique, reviendra sur l’histoire de ce chef d’œuvre le samedi 8 novembre à 15h à l’abbaye de Maredret.
Après l’invasion de la Belgique par l’armée allemande et son long cortège de violences, de massacres et de destructions, le découragement est bien palpable dans la population belge au moment de passer de 1914 à 1915. La guerre de mouvement s’est transformée en guerre de position et elle s’annonce plus longue que prévue.
C’est dans ce climat de morosité que le Cardinal Désiré-Joseph Mercier a publié la lettre pastorale Patriotisme et Endurance le jour de Noël 1914. Celle-ci était destinée à être lue dans toutes les églises du diocèse de Malines à partir du 1er janvier 1915. Elle fit grand effet, que ce fût en Belgique ou à l’étranger, et suscita la colère des occupants allemands, lesquels empêchèrent par tous les moyens sa diffusion officielle… ou clandestine.
En janvier 1915, les sœurs de l’abbaye bénédictine de Maredret, au cœur de la vallée de la Molignée, entre Namur et Dinant, vont prendre connaissance du contenu de cette lettre pastorale. Dès la fondation de l’abbaye, en 1893, un atelier a cherché à retrouver les techniques anciennes utilisées par les scribes et les enlumineurs du Moyen Âge. Il a fallu de nombreuses années aux sœurs pour se familiariser avec tous les secrets du métier : maîtrise des écritures anciennes, préparation des parchemins et des pigments et pose de l’or. L’importance de la lettre pastorale n’ayant pas échappé à la communauté bénédictine, totalement cloîtrée, la décision est prise très rapidement de la calligraphier et de l’enluminer.
Un acte de courage risqué
Ce travail a été exécuté dans la clandestinité du début de l’année 1915 au 15 août 1916, jour où le Cardinal Désiré-Joseph Mercier, en visite à l’abbaye de Maredret, a pu découvrir ce chef-d’œuvre de 35 planches. Celles-ci ont été réalisées dans le style médiéval que les sœurs maîtrisaient à la perfection tout en adaptant celui-ci, avec un sens de l’humour peu commun, à la réalité des événements dramatiques de la Première Guerre mondiale.
La lettre pastorale calligraphiée et enluminée par les sœurs de Maredret fera l’objet d’une conférence de Dominique Vanwijnsberghe, Docteur en Histoire de l’Art et chercheur à l’Institut Royal du Patrimoine Artistique (IRPA) (Bruxelles). Spécialiste reconnu au niveau international des manuscrits médiévaux, Dominique Vanwijnsberghe s’attache depuis plusieurs années à étudier l’atelier d’enluminure de Maredret et sa riche production.
La conférence aura lieu le samedi 8 novembre 2014 à 15 heures à l’abbaye de Maredret. L’entrée sera gratuite. Cette rencontre est organisée par l’association Les amis de l’abbaye de Maredret asbl avec le soutien de la Commune d’Anhée et de la Province de Namur dans le cadre des commémorations de la Première Guerre mondiale.